Une réorganisation des banques de données juridiques est apparue nécessaire en raison des difficultés financières rencontrées par leurs promoteurs, de l'excessive dispersion de leurs initiatives, et de la réserve manifestée longtemps par les utilisateurs potentiels.
Après études et concertations, les pouvoirs publics (en conseil des ministres du 8 août 1984) ont défini les orientations d'une coordination entre les efforts des éditeurs privés qui accepteraient de participer à la construction d'un ensemble cohérent, ceux des professions organisées, ceux des administrations publiques et le soutien de la Caisse des dépôts et consignations.
En application de ces directives, le décret du 24 octobre 1984 a créé et organisé les structures de coordination de production et de distribution des bases de données juridiques.
La circulaire adressée le 11 février 1985 par M. le Premier ministre à tous les ministres (JO du 7 mars 1985) a précisé les modalités d'application de cette réforme.
Le 1er janvier 1985 a été institué le Centre national de l'informatique juridique (CNIJ), reprenant les bases antérieurement constituées par le CEDIJ et par les services du Premier ministre (système LEX). En mai 1985 a été constituée la société Juridial chargée de commercialiser, en "guichet unique", toutes les bases.
La société Questel (filiale de Télésystèmes) a été désignée comme serveur unique, fonction qui sera pleinement assurée au 1er janvier 1986 (jusqu'alors, les bases du CNIJ seront accessibles par le GCAM).
Il est également apparu opportun de normaliser les rapports des différents producteurs publics et privés traitant la jurisprudence: il s'agit d'éviter les doubles emplois, et de présenter aux clients les meilleurs produits au moindre coût.
L'étape suivante sera celle du développement des bases dites "encyclopédiques" à partir du fonds important constitué par la société Sydoni: celles-ci, spécialisées par grands domaines, apportent à des questions de droit précises des réponses synthétiques.
L'ensemble de ces bases sera, au cours des prochains mois, à des dates et selon des modalités qui seront précisées ultérieurement, accessibles aux magistrats pratiquant déjà l'interrogation des données du CNIJ.
En considération des résultats déjà obtenus par le G.I.E. Jurisdata pour la constitution d'un fichier informatisé de jurisprudence (abstracts et résumés) des cours et tribunaux, il a été décidé, après avis de la commission de coordination de l'informatique juridique, émis le 18 avril 1985, d'en favoriser le développement grâce à des participations financières de l'Etat et d'un certain nombre de barreaux et de le soumettre à des finalités et obligations de service public.
Le CNIJ, pour sa part, renonce à enregistrer des arrêts de cours d'appel et des jugements des tribunaux, en raison, notamment, de l'impossibilité de les faire sélectionner, analyser, résumer par des fonctionnaires des Services judiciaires. Mais il assurera la diffusion, en texte intégral enrichi, des arrêts des cours Suprêmes (Conseil constitutionnel, Cour de cassation, Conseil d'Etat, Cour des comptes) analysés, résumés et "titrés" par les services de documentation de ces juridictions.
Ces services, en particulier celui de la Cour de cassation, n'en continueront pas moins à rassembler et publier un certain nombre de décisions des juridictions de première instance et d'appel méritant d'être remarquées particulièrement. Les dispositions de l'article R. 131-17 du Code de l'organisation judiciaire et son arrêté d'application doivent, dès lors, toujours être respectées.
La sélection, l'analyse, la confection des résumés et abstracts des décisions devant être enregistrées dans la base Jurisdata seront exécutées selon des méthodes rigoureuses et uniformes. Celles-ci seront définies par un comité scientifique constitué de façon à garantir la compétence de ses membres et l'impartialité des critères de sélection. L'exécution de ces tâches sera confiée à des ateliers régionaux animés par des universitaires et des représentants des barreaux et associant, dans la mesure du possible, des magistrats et des greffiers en chef, selon des modalités pouvant varier en fonction des contingences locales. Un G.I.E. spécialisé, Edidata, est chargé de définir les implantations et l'organisation de ces ateliers, de coordonner leurs activités et d'assurer leur financement.
Pour alléger les coûts de constitution de la base de jurisprudence, il a été convenu que les greffes des cours d'appel et des tribunaux fourniront gratuitement des copies des décisions aux responsables des ateliers régionaux (sauf la fourniture du papier nécessaire aux photocopies lorsque les greffes connaissent des difficultés d'approvisionnement). Les modalités pratiques de sélection des documents seront arrêtées en concertation entre les responsables des ateliers régionaux et les chefs de juridiction ainsi que le greffier en chef afin que soit évitée la délivrance systématique par les greffes des copies de l'ensemble des décisions.
La gratuité accordée pour la constitution de la base citée de jurisprudence des cours d'appel et tribunaux se limite à la fourniture des arrêts et jugements de ces juridictions. En ce qui concerne les arrêts de la Cour de cassation, elle ne s'applique qu'au profit exclusif du CNIJ (sans possibilité pour lui d'en vendre copies sur papier ou sur support magnétique).
Pour toutes autres finalités, notamment l'édition dans des revues (y compris celles des associés de Jurisdata, qui verseront une contribution spéciale à cet effet), une rémunération pour service rendu doit être perçue.
Le montant de cette rémunération sera fixé prochainement par arrêté.
Lorsque la délivrance des décisions judiciaires sera assurée par la Cour de cassation, le produit continuera d'être rattaché par la voie du fonds de concours existant au budget de la Justice pour être affecté aux dépenses de fonctionnement du service de documentation et d'études.
Si cette délivrance est assurée directement par les greffes des cours et tribunaux, un dispositif identique, actuellement à l'étude, devra permettre un rattachement budgétaire au bénéfice des juridictions. Cependant, à titre provisoire, jusqu'à la parution des textes nécessaires, il y aura lieu de procéder de la façon suivante:
Les demandes de copies des décisions devront parvenir au service de documentation et d'études de la Cour de cassation comme c'est le cas actuellement (s'il est saisi directement, le greffe de la juridiction concernée transmettra la demande à ce service). Ce dernier établira un devis correspondant à la participation versée au titre d'offre de concours.
Le devis sera adressé au demandeur pour accord. Un titre de perception sera ensuite adressé au comptable (le plus souvent le trésorier-payeur général), qui invitera le demandeur à s'acquitter de son montant. Les juridictions délivreront les photocopies des décisions sous bordereau après accord du service de documentation et d'études de la Cour de cassation: copie du bordereau devra être adressée à ce dernier. Il sera mis fin dès que possible à cette procédure relativement lourde mais, en l'état, seule compatible avec la réglementation en vigueur (le seul fonds de concours existant est rattaché à la Cour de cassation).
L'ensemble des éditeurs devront bénéficier, à égalité, de la nouvelle organisation pour obtenir, en nombre, des copies des décisions.
A la condition qu'ils s'efforcent de grouper leurs demandes, les représentants des éditeurs non associés de Jurisdata bénéficieront dans les greffes des mêmes possibilités que celles consenties aux ateliers régionaux pour l'accès aux documents originaires ou aux copies, voire à leur tri par le greffe, et cela dans les mêmes délais, la seule différence étant celle de la rémunération. Au cas où des agents du service public collaboreraient, à titre privé, à l'un ou à l'autre des entreprises ou ateliers, ils devraient veiller rigoureusement à éviter qu'il n'en résulte quelque discrimination dans les délais d'accès aux informations publiques.
Si pour la confection de leurs revues ou de "bases encyclopédiques" reconnues parties prenantes de l'ensemble coopératif des banques de données juridiques, des éditeurs souhaitent obtenir certains services de sélections, voire d'analyses, le service de documentation de la Cour de cassation s'efforcera, sur leurs demandes, de les leur faire assurer directement ou par sous-traitances (éventuellement auprès d'ateliers régionaux).
En tant que de besoin, de nouvelles mesures seront prises pour que la réorganisation en cours améliore progressivement, sans alourdir sensiblement les tâches des greffes, la diffusion de la documentation juridique sous toutes ses formes.
D'ailleurs, le développement de l'informatique documentaire est soumis à de constantes évolutions techniques et économiques. L'organisation définie ci-dessus sera, dès lors, nécessairement adaptée à l'avenir, et cela d'autant plus que son efficacité dépendra de l'effectivité de la coopération entre partenaires divers. Il est éminemment souhaitable que les autorités judiciaires et les responsables des professions judiciaires ou juridiques contribuent à la cohérence de l'ensemble. Leurs représentants dans les instances de concertation instaurées par le décret du 24 octobre 1984 et les conventions subséquentes recueilleront toutes leurs suggestions d'évolutions à telles fins.
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