SECTION 1 : GRANDEUR ET DECADENCE DE LA LANGUE FRANçAISE
La langue n'est pas un simple instrument de communication mais elle est également l'expression vivante de l'esprit et de l'âme d'un peuple, c'est à dire le creuset où s'élabore depuis l'enfance notre vision du monde, notre façon de raisonner et de créer notre comportement social voire nos rêves[120]. La langue française, à la fois reflet et inspirateur d'une pensée et d'une culture, rassemble donc ceux qui l'emploient dans une même communauté. Parler la même langue, c'est poser sur le monde un même regard, le comprendre avec la même intelligence. C'est appartenir à une communauté linguistique et au-delà, à une histoire, une culture. Par sa clarté, la langue française serait le lieu des interprétations fidèles. Par sa justesse, par la précision donnée à la signification des mots, par la variété et la souplesse d'un vocabulaire qui fournit, en toute circonstance les mots les mieux appropriés, par la richesse de conjugaisons dont le temps et les modes savent traduire les plus fines nuances de la pensée, la langue française apparaît comme la langue avec laquelle " l'homme ne peut pas tromper l'homme "[121], à savoir que le génie de la langue française serait de transmettre avec exactitude toutes les nuances de la pensée. Ainsi " la langue française se prêtait mieux qu'aucune autre langue à la défense des valeurs universelles "[122].
La langue est donc un élément clé de la politique culturelle d'un pays car elle n'est pas seulement un instrument de communication dont il faut promouvoir l'emploi afin d'endiguer son recul sur le plan international et sur le plan national[123], mais aussi un outil d'identification, un signe d'appartenance à une communauté linguistique, un élément du patrimoine national que l'Etat entend défendre contre les atteintes qui y sont portées.[124]
I - LA LANGUE FRANçAISE EN SITUATION DE CRISE
Depuis le début des années 70, des voix s'élèvent non seulement dans le milieu des linguistes ou des lettrés mais également dans les milieux politiques et juridiques pour s'inquiéter des atteintes portées à l'intégrité de la langue française, élément fondamental de la personnalité et du patrimoine de la France [125]par l'invasion des termes anglo-saxons. En effet, la pénétration abusive et incontrôlée des termes anglo-saxons dans le vocabulaire des français a eu pour effet d'actionner le processus de dégradation de la langue française. Sans aller jusqu'à estimer que la langue française est en danger de mort, on peut dire que l'intégrité de la langue française est altérée.[126] Face à cette situation préoccupante pour la langue française, l'Etat a estimé qu'il était de son devoir d'intervenir dans ce domaine pour réglementer le contenu de la langue française.
Au-delà de la nostalgie que l'on peut légitimement éprouver en pensant à ce que fut la langue française, on s'est beaucoup interrogé à notre époque sur la réaction que la situation actuelle de la langue française peut et doit susciter. La question de l'attitude à tenir face à l'altération de la langue française implique donc pour y répondre de s'interroger sur son origine. Pour envisager les remèdes mis en place par l'Etat pour défendre la langue française, il est en effet important de connaître les causes de cette dégradation. Ensuite, il faudra envisager la question des remèdes prescrits par l'Etat qui, nous le verrons, consiste à réglementer la langue française en recourant à l'adoption d'un corps de règles de droit qui s'expriment par des impératifs, des interdits, voire de simples directives linguistiques[127].
A - LA DEGRADATION DE LA LANGUE FRANçAISE
Outre le fait que l'emploi de la langue française soit en déclin supplanté au plan international par l'anglais, celle-ci subit les assauts de l'anglo-américain contre son " corpus "
et souvent y succombent.
Certes la langue française évolue, comme toute langue vivante, en intégrant dans son vocabulaire usuel des termes de diverses sources, qu'il s'agisse d'expressions issues de langues régionales, de vocables populaires ou de mots étrangers. Ainsi, la langue française a annexé, dans le cours des temps, un certain nombre de termes étrangers qui sont entrés dans l'usage courant pour combler les lacunes de notre vocabulaire lorsqu'un terme français de même sens n'existait pas. C'est le cas, par exemple de termes utilisés en matière de denrées alimentaires à savoir : beefsteak, golden, sandwich, toast, spaghetti, pizza.... C'est le cas également de termes utilisés en matière de produits textiles : blue-jean, tee-shirt, sweat-shirt ou dans le domaine sportif : corner, penalty, smash, goal[128]....
Par conséquent, lorsque le vocabulaire présente des lacunes, il est légitime d'avoir recours à des emprunts de termes étrangers dés lors que ceux-ci ont pour effet d'enrichir la langue française. Cependant, s'il est incontestable que la langue française s'est enrichie d'emprunts étrangers, en revanche, la pénétration abusive de la langue française par des termes étrangers notamment d'origine anglo-saxonne constitue une menace pour son intégrité.[129] Selon la formule imagée de M.JESTAZ, " la cueillette même nombreuse de pépites n'a rien à voir avec l'importation massive d'assignats ".[130] La langue française est donc un " joyau "[131]qui peut-être enrichi par quelques termes étrangers mais aussi terni par leur utilisation abusive. En effet, on peut constater depuis une vingtaine d'années qu'un nombre important de mots venus d'outre-Manche et surtout d'outre-Atlantique se répandent en France sans justification légitime et s'imposent au détriment de termes français équivalents notamment dans le monde des affaires, les médias , le sport, la publicité....
Cette évolution inquiétante de la langue française a été constatée, dans un premier temps à travers les médias[132]dont le rôle est essentiel pour la diffusion de la langue puisqu'ils concurrencent souvent les structures éducatives notamment auprès des jeunes. Les médias[133], moyens privilégiés de communication et de culture sont en effet le plus souvent accusés de maltraiter la langue française en acclimatant abusivement des mots et des tournures ou des constructions empruntés à d'autres langues et en l'appauvrissant par le recours systématique à des termes étrangers alors qu'il existe des équivalents français. Les écoutes linguistiques, qui ont été faites en 1990, font apparaître que la qualité de la langue pratiquée laisse à désirer dans certains domaines de l'audiovisuel. Ainsi, pour les commentaires sportifs et les émissions de variétés et de jeux, beaucoup d'animateurs recourent à un vocabulaire déficient et cèdent à la facilité en employant des anglicismes qui n'ont pas toujours été consacrés par l'usage.[134] On peut citer à titre d'exemples illustrant le processus de dégradation de la langue française, le recours abusif à certains termes étrangers tels que hit parade, blind test, prime-time, live, best of, showtime, reality show, talk show.... Cette évolution peut également être observé dans le domaine du sport fortement dominé par le sport américain, élément important de la culture américaine qui connaît un large engouement chez les jeunes. Ainsi, on peut citer des termes tels que dunk, bash, face to face, airball, alley-hoop, playground, jam propres au basket ball américain ou des termes tels que pole position, best laps, team, remaining propres à la Formule 1. D'autres sports auraient pu être cités mais le basket ball et la Formule 1 mettent en lumière l'altération de la langue française par des termes étrangers car dans la plupart des cas il existe un équivalent français à ces termes. Le monde des affaires semble également touché par ce phénomène dans la mesure ou l'on y emploie de nombreux termes anglo-saxons tels que : deal, phoning, packaging, telemarketing, marketing, book, turn over, rate, engineering....
Si l'on a choisi ces domaines d'activité, c'est qu'ils sont révélateur du processus d'appauvrissement de la langue française. Ce qui est en cause, c'est non seulement l'emploi de termes empruntés à une autre langue alors qu'il existe dans le lexique de la langue française des termes courants équivalents mais également le recours systématique à des termes étrangers pour combler les lacunes du vocabulaire français, sans avoir recours à la création terminologique. Une langue qui n'est plus capable de créer ses propres termes pour désigner des réalités nouvelles est une langue morte.
La langue française ne suit donc plus une évolution naturelle à savoir que son évolution n'est plus soumise aux lois spontanées de l'usage mais à la dictature de la mode et à la puissance économique des américains. En effet, la mode "tyran de notre âme", culte de la nouveauté, menace l'intégrité de la langue française notamment en attachant à n'importe quelle expression étrangère " un parfum d'exotisme et de modernité "auquel cède assez facilement les médias et les jeunes, beaucoup plus exposés aux phénomènes de mode[135]. La langue française doit donc s'enrichir mais ne doit pas ignorer un minimum de sécurité sous peine de virer au jargon[136].
Au-delà du processus de dégradation de l'intégrité de la langue française, il convient d'en rechercher les conséquences notamment à l'égard de la communauté francophone et de ceux qui la composent.
B - LES DANGERS LIES à L'ALTéRATION DE LA LANGUE FRANçAISE
L'altération de la langue française porte atteinte à l'esprit de la langue française élément fondamental de la personnalité et du patrimoine de la France et tout autant à sa compréhension. En effet, la langue française n'est pas seulement signe, communication, elle est également histoire, usage, culture. En tant qu'outil de communication, la langue est faite pour comprendre et être compris et ceci du plus grand nombre. Or, l'utilisation de mots anglo-saxons rend la langue française approximative voire parfois incompréhensible ce qui permet à SAUVAGEOT[137] d'écrire qu'avec la pénétration des sabirs d'origine outre-Atlantique, de nombreux jargons se développent, qui ne sont compris que par les intéressés.[138] Par conséquent, la pénétration abusive de la langue française par des termes étrangers, dans la mesure où elle se prolongerait et s'amplifierait pourrait provoquer une régression culturelle. La langue française ne serait donc plus capable de créer ses propres mots pour désigner les réalités nouvelles. La France perdrait ainsi sa souveraineté linguistique en ayant recours de façon excessive à des termes anglo-saxons, véhicules d'une autre culture. Il s'agit donc d'éviter qu'"un jargon anglais n'envahisse la langue française", faisant ainsi disparaître la spécificité culturelle non seulement de la France, mais de toute la francophonie.
La dégradation de l'intégrité de la langue française pourrait être rapprochée du déclin de l'emploi de la langue française sur le plan international. Dans la mesure où le processus de dégradation de la langue française se prolongerait, son emploi risquerait d'être moins attractif sur le plan international pour ceux qui ne l'ont pas comme langue maternelle notamment par la perte de certaines de ses qualités à savoir la clarté et la justesse.
Une langue est l'âme d'un peuple.
La promouvoir, la défendre si elle est attaquée, c'est préserver sa culture, son identité et donc une part essentielle de sa liberté.
Face à la pénétration linguistique et culturelle du monde anglo-saxon, il faut s'interroger sur les réactions que la situation actuelle de la langue française doit et peut susciter notamment de l'Etat.
II - LES DIVERGENCES QUANT à L'OPPORTUNITé DE L'INTERVENTION DE L'ETAT DANS " LE CORPUS " DE LA LANGUE FRANçAISE
La question de l'attitude à tenir face à la dégradation de la langue française n'a pas donné lieu à une réponse unanime. Cette controverse autour de la défense de la langue française oppose d'un côté ceux " les laxistes "qui trouvent naturel qu'une langue, au mépris de son génie propre, s'ouvre à toutes les influences au point de perdre son sens et sa logique et qui donc s'opposent à toute intervention du droit pour protéger l'intégrité de la langue française, et ceux " les puristes ", défenseurs de la langue française, qui estiment que la langue française est en danger, et qui militent pour la création d'un droit de la langue française qui viendrait la protéger contre les atteintes à son intégrité.
Ce débat se doit d'être rapporté parce qu'il permettra d'expliquer les difficultés à réglementer la langue française. En effet, en matière de langue, l'usage est souverain. Par conséquent, la langue française parait à priori fort mal s'accommoder d'une rigidité normative et donc se prêter difficilement à des mesures d'encadrement et de contrôle nécessaires à sa défense[139].
A - LES RéACTIONS D'OPPOSITION A L'INTERVENTION DE L'ETAT
Les réactions suscitées par la dégradation de la langue française peuvent être classées en deux catégories à savoir celles qui nient la situation de crise de la langue française et celles qui ont conscience des dangers auxquels la langue française est exposée mais qui rejettent l'idée d'une réglementation impérative de celle-ci.
L'une des premières réactions d'opposition consiste donc à estimer que le droit n'a pas à s'immiscer dans le domaine linguistique puisque l'analyse selon laquelle la langue française serait en déclin est inexacte. En effet, ce n'est pas le français qui régresse, fait-on valoir, c'est l'anglais qui progresse. Au regard des faits, cette position n'est guère tenable. D'une part, selon une formule courante, celui qui n'avance plus recule, et telle est bien la situation de la langue française, qui sur bien des plans cède du terrain à l'anglais, comme nous l'avons vu précédemment. D'autre part, le nombre de personnes utilisant la langue française ne traduit pas de manière satisfaisante le véritable rapport de force entre la langue anglaise et la langue française et, plus encore, occulte la question qui nous intéresse à savoir celle de l'altération de la langue française.
Une autre réaction suscitant les mêmes critiques que la précédente s'inscrit dans le même courant. Elle consiste à dire que la question est mal posée, qu'il n'existe pas un problème de la langue française, mais seulement un probléme lié à son emploi. L'argumentation consiste donc à dire " que la langue française est en excellent état de marche, mais les mécaniciens, et en premier lieu, les enseignants, ne savent plus la faire marcher "[140].
Certaines personnes font valoir enfin que la langue française n'est pas sérieusement menacée car une langue est faite dans sa phonologie d'abord, puis de sa syntaxe et de son vocabulaire. Or, ce dernier est des trois le facteur le moins important. L'invasion de la langue française par les termes anglo-saxons ne serait qu'un épiphénomène. Du moment que la phonologie[141] et la syntaxe ne sont pas remises en cause, il n'y aurait pas à s'alarmer outre mesure de la situation actuelle. La défense de la langue française ne serait donc qu'un thème récurrent donnant lieu à une agitation inutile.
Au-delà de cette position, il existe une réaction plus mesurée qu'il faut également rejeter. Celle-ci reconnaît la situation de crise de la langue française mais ne propose qu'une réponse jugée par les défenseurs de la langue française inefficace et inadaptée face aux atteintes portées à l'intégrité de la langue française. Pour les tenants de cette solution, le droit n'a pas à intervenir pour régir la langue française qui se prête difficilement à des mesures d'encadrement et de contrôle. C'est à l'Académie Française et à elle seule qu'il convient de défendre la langue française et de donner à la langue des règles certaines car c'est ce rôle qui lui a été attribué à sa création en 1635 par RICHELIEU[142]. A plusieurs reprises d'ailleurs, l'Académie Française a déclaré " qu'il n'appartenait pas au pouvoir politique, ni à l'administration de légiférer ou de réglementer en matière de langue ". Néanmoins, l'Académie Française n'a jamais prétendu jouer un rôle gouvernemental et a toujours refuser une intervention impérative sur la langue. Au contraire, elle préfère exercer une magistrature qui l'amène à consacrer l'usage.
Face à l'urgence de la situation et aux enjeux liés à la langue française, l'Etat n'a pu rester indiffèrent.[143] La situation de la langue française nécessite en effet de part sa gravité une intervention de l'Etat. Seul l'Etat est a priori en mesure de mener une action efficace et globale de protection de la langue française. Il a donc pris une position marquant sa volonté politique d'intervenir, dans l'intérêt général, dans ce domaine qui jusqu'à présent lui était étranger[144] pour défendre non seulement l'emploi de la langue française mais également son intégrité.[145]
B - LES REACTIONS FAVORABLES A L'INTERVENTION DE L'ETAT
Depuis une vingtaine d'années, les consciences s'éveillent donc face à la dégradation de la langue française. Beaucoup ne se satisfaisant pas de l'état de la langue française ont réclamé la création d'un corps de règles de droit voué à la défense de l'intégrité de la langue française. Ainsi, dés 1966, ETIEMBLE fait paraître un ouvrage corrosif intitulé "Parlez-vous franglais ? [146], dans lequel il dresse l'état de santé de la langue française, requiert sa défense et prône le recours au pouvoir normatif de l'Etat. Il en est de même pour l'académicien JEAN DUTOURD qui n'a pas hésité à écrire que " la langue française est un monument national.
Or, on en prend moins soin que du Château de Versailles, on empêche personne de la souiller, de la dégrader, de la couvrir de graffitis...Il serait donc temps de la classer "[147].
En effet, il leur est apparu inacceptable de laisser l'anglo-américain s'insérer dans notre langue, sous la forme du " franglais ", par des emprunts incongrus que ne justifient ni la nécessité, ni l'opportunité.
Outre les arguments déjà développés en faveur de l'édification d'un droit voué à la défense de l'intégrité de la langue française, un argument est régulièrement invoqué en raison de l'urgence à prononcer des décisions coercitives[148]d'application générale dans ce domaine notamment par les hommes politiques[149]pour faire du contenu de la langue française une préoccupation d'ordre public. Cet argument consiste à dire qu'en cherchant à préserver l'intégrité de la langue française, l'Etat français n'intervient pas uniquement pour protéger un bien français mais ce qui est devenu le bien de millions d'hommes répartis dans le monde. Ainsi, la création d'un corps de règles voué à la défense de la langue française trouverait sa justification par le devoir de l'Etat et de tous les français à l'égard de tous les pays qui ont adopté la langue française.
A travers ces différentes prises de position, on peut constater que l'action visant à la défense et à l'enrichissement de la langue française n'est plus aujourd'hui le domaine réservé des linguistes ou des lettrés, mais est devenue le domaine de prédilection du droit depuis les années 70 en raison de l'aggravation des atteintes portées " au corpus " de la langue française justifiant l'adoption de mesures d'urgence. C'est cette action menée par les pouvoirs publics qui fera l'objet de notre étude et plus particulièrement la détermination des modalités de celle-ci qui nous le verrons sont originales en raison de la spécificité de la matière à régir.
SECTION 2 : LES PROCEDES D'ENDIGUEMENT DU PROCESSUS DE DEGRADATION DE LA LANGUE FRANçAISE
L'Etat est donc intervenu pour endiguer la pénétration abusive des termes anglo-saxons qui appauvrie la langue française et constitue une menace d'uniformisation qui à terme pourrait condamner la France à avoir recours systématiquement à la terminologie anglo-saxonne pour désigner des réalités nouvelles, la langue française perdant ainsi sa capacité à créer ses propres termes. La France perdrait aussi sa souveraineté linguistique. La langue française a donc été l'objet d'une intervention étatique modérée ni trop exclusive ni trop répressive.
Au cours de nos développements, nous nous attacherons à déterminer les moyens juridiques mis en oeuvre par l'Etat pour défendre la langue française notamment par le recours à une politique de création terminologique.
Cette action menée par l'Etat peut se résumer par une formule tenant lieu de " leitmotiv ": " Il est souhaitable que la France trouve en elle-même les mots nouveaux "[150]. En effet, une langue, pour demeurer vivante, a besoin d'accueillir des mots étrangers. Mais, si, une langue doit, pour vivre et s'enrichir, adopter des termes venus d'ailleurs sans équivalents dans son propre lexique, en revanche, il lui appartient de repousser l'invasion de ceux qui lui sont inutiles, la défigurent et menacent d'en faire un sabir.
I - LA POLITIQUE DE CREATION TERMINOLOGIQUE
C'est, donc, à travers la création terminologique que s'inscrit la politique française de défense et d'enrichissement de la langue. En effet, une langue qui ne sécrète pas assez de vocabulaire en son sein pour s'adapter aux nouveautés est condamné à terme. C'est tout l'enjeu de cette politique linguistique qui a vocation à redonner à la langue française son dynamisme terminologique pour endiguer la pénétration abusive des termes étrangers.
De cette politique, on étudiera les différents organes sur lesquels s'appuie le dispositif de défense de l'intégrité de la langue française et leur rôle au sein de celui-ci.
A - LES ORGANES DU DISPOSITIF DE CREATION TERMINOLOGIQUE
Une politique active de protection de l'intégrité de la langue française destinée à trouver immédiatement à tout nouveau terme étranger un équivalent français suppose, pour sa mise en oeuvre, l'existence d'un support administratif qui puisse servir d'aiguillon et coordonner les actions.
Les pouvoirs publics, sous la Vème République, ont été sensibilisés à ce problème, défense et enrichissement de la langue française s'inscrivant dans le grand rêve gaullien " d'une nation forte, respectée et écoutée ". En 1966 fut ainsi crée un Haut Comité pour la Défense et l'Expansion de la Langue Française[151]qui pour remplir sa mission consistant à étudier les mesures propres à assurer la défense et l'enrichissement de la langue française a sollicité la création de commissions à travers lesquelles il pourrait conduire son action. Le décret du 7/01/1972[152]est venu répondre aux attentes de cet organisme en créant les commissions de terminologie. De par leur rôle déterminant dans l'action de défense et d'enrichissement de la langue française, elles feront l'objet de notre étude.
1) LES COMMISSIONS DE TERMINOLOGIE
L'ambition des pouvoirs publics qui s'exprime à travers les règles de droit ne s'est pas bornée à la création d'institutions, mais à la mise en place de moyens permettant l'accomplissement de sa mission à savoir défendre et enrichir la langue française par le biais de commissions de terminologie créées par le décret du 7/01/1972[153]. Le décret du 11/03/1986 régit actuellement le statut des commissions de terminologie également appelées " commissions de vocabulaire ". Son article premier dispose: " Des commissions de terminologie sont instituées par arrêté ministériel auprès des administrations centrales sur proposition du délégué général de la langue française et après consultation du ministre de l'éducation nationale ".
C'est donc autour d'un organisme administratif à savoir les commissions de terminologie que s'est organisé le dispositif de défense de l'intégrité de la langue française. Le choix en faveur de cette méthode propre à la France se justifie par la nature de la matière à régir et par le résultat à atteindre à savoir " le nettoyage de notre langue des souillures du franglais "[154].
Etre social, l'homme ne peut se suffire à lui-même. Le libre jeu des initiatives privées lui permet de pourvoir à certains de ses besoins, mais il en est d'autres qui ne peuvent recevoir satisfaction par cette voie parce que communs à tous les membres de la collectivité, ils excèdent par leur ampleur les possibilités de n'importe quel particulier. Ces nécessités auxquelles l'initiative privée ne peut répondre, et qui sont vitales pour la communauté tout entière et pour chacun de ses membres, constituent le domaine propre de l'administration. L'administration semble avoir les qualités et les capacités nécessaires en raison de son autorité, de sa neutralité, de sa mission visant à satisfaire l'intérêt général, pour régir la langue française[155], élément insaisissable, fluide par sa nature même, et pour convaincre ceux qui l'utilisent et contribuent à la dégradation de la langue française à suivre la politique linguistique qui consiste à repousser l'invasion des termes étrangers inutiles à la langue française. Des commissions de terminologie ont donc été créées auprès de chaque administration centrale en fonction de leur besoin d'adapter et d'enrichir leur vocabulaire.
Au regard du rôle central qu'elles jouent au sein de la politique de défense de la langue française, il est utile de donner la liste énumérative de ces commissions pour connaître leur domaine de compétence et apprécier l'étendu de la politique menée par les pouvoirs publics.
2) LES DOMAINES DE COMPETENCE DES COMMISSIONS DE TERMINOLOGIE
Historiquement, la première de ces commissions est la commission de terminologie pour l'enrichissement du vocabulaire pétrolier français créée auprès du ministre du développement industriel et scientifique par arrêté du 7/07/1970.[156]
Puis, une commission de terminologie du tourisme est créée, auprès du secrétaire d'Etat au tourisme, par arrêté du 16/03/1972.
Une commission de terminologie de la santé est créée auprès du ministre de la santé, par arrêté du 13/06/1972.
Une commission du langage des techniques spatiales est créée auprès du ministre du développement industriel et scientifique par arrêté du 26/07/1976.
Une commission de terminologie de télédétection aérospatiale est créée auprès du ministre des universités, par arrêté du 20/04/1978.
Une commission de terminologie des télécommunications est créée auprès du secrétaire d'Etat aux postes et télécommunication, par arrêté du 21/08/1979.
Une commission de terminologie de l'informatique est créée auprès du ministre de l'industrie par arrêté du 7/09/1979.
Une commission de terminologie de l'audiovisuel et de la publicité est créée auprès du ministre de la culture par, arrêté du 18/12/1980.
Une commission du vocabulaire de l'urbanisme et du logement est créée auprès du ministre de l'équipement et du logement, par arrêté du 7/04/1982.
Une commission de terminologie est créée auprès de la mer, par arrêté du 8/12/1982.
Une commission de terminologie du commerce extérieur est créée auprès du ministre du commerce extérieur et du tourisme, par arrêté du 15/12/1983.
Une commission de terminologie du ministère des relations extérieures est créée par arrêté du 18/02/1984.
Une commission de terminologie relative du vocabulaire concernant les activités féminines est créée, par décret du 29/02/1984.
Une commission de terminologie de la qualité de vie est créée par arrêté du 6/04/1984.
Une commission de terminologie des sports est créée auprès du ministre du temps libre, de la jeunesse et des sports, par arrêté du 15/05/1984.
Une commission de terminologie de l'éducation nationale est créée auprès du ministre de l'éducation nationale, par arrêté du 9/05/1985.
Une commission de terminologie du ministère de l'intérieur est créée par arrêté du 20/05/1985.
Une commission de terminologie de la chimie est créée par arrêté du 15/12/1992.
Une commission de terminologie de l'environnement est créée par arrêté du 2/02/1993.
C'est en tout plus d'une trentaine de commissions de terminologie qui sont aujourd'hui en place en vue de défendre la langue française par la création de termes nouveaux, l'ensemble étant coordonné par la Commission Générale de Terminologie. Au regard de cette liste énumérative, on peut noter qu'il existe une étroite corrélation entre le champ d'application des commissions de terminologie et les domaines notamment économique, sportive, scientifique dans lesquels la propagation de l'anglo-américain a été rapide en raison de la part prise, surtout depuis la dernière guerre mondiale, par les Etats Unis dans l'histoire du monde, et au poids acquis par sa technologie, son commerce, et sa monnaie et dans lesquels il existe un risque important de dégradation de la langue française. Certaines commissions de terminologie ont été également instituées en vue de créer un vocabulaire dans des domaines notamment pétrolier, nucléaire, informatique où la langue française brillait par son absence.
Dans ces domaines où le vocabulaire anglo-américain se propage rapidement et massivement, l'objectif des commissions de terminologie est de trouver des équivalents français à ces termes.
B - LA CREATION DE TERMES NOUVEAUX
- clef de voûte du dispositif de défense de l'intégrité de la langue française -
Pour endiguer le processus de dégradation de l'intégrité de la langue française, la France s'est donc dotée d'un instrument de création terminologique propre à combler les lacunes de la langue française soit en créant des termes nouveaux pour désigner des réalités nouvelles soit en informant les locuteurs de langue française de l'existence de termes du lexique français délaissés au profit des termes anglo-saxons.
1) LE MANDAT DES COMMISSIONS DE TERMINOLOGIE
Le travail des commissions de terminologie consiste principalement à établir, pour un secteur déterminé, un inventaire des lacunes du vocabulaire français en tenant compte des besoins manifestés par les usagers, à recueillir, proposer et réviser les termes et néologismes nécessaires pour désigner les réalités nouvelles, à contribuer à la collecte et à l'harmonisation des données terminologiques en tirant profit des richesses du français parlé hors de France[157].
La France s'est donc donnée les moyens de combler les lacunes de son vocabulaire afin de limiter les emprunts à des termes étrangers, notamment anglais, langue qui démontre un formidable dynamisme terminologique en créant sans état d'âme des mots à partir de l'anglo-saxon ou des racines gréco-latines et par sa capacité à assimiler et métisser les apports d'autres langues. C'est ainsi que les commissions de terminologie proposent voire imposent, dans de nombreux secteurs d'activité[158], l'usage de termes français, de néologismes[159]et de termes francisés d'origine étrangère pour remplacer les emprunts injustifiés à des termes étrangers[160]et éviter ainsi le recours à des lexiques étrangers pour désigner les réalités nouvelles. De ce travail d'enrichissement de la langue française, il en résulte la publication d'arrêtés ministériels[161] établissant des listes représentant prés de 3000 mots nouveaux dont on précise pour chacun d'entre eux la définition, et l'équivalent anglo-saxon qui doit primer .[162]
Pour illustrer notre propos, il est utile de donner un aperçu du travail de création terminologique des commissions. Parmi les termes nouveaux ainsi crées, certains peuvent être considérés comme des équivalents heureux aux termes anglo-saxons. Leurs qualités ont en effet convaincu les locuteurs de langue française de les employer. D'autres équivalents peuvent paraître, à priori, surprenant ou saugrenu non seulement parce qu'ils ont vocation à remplacer des termes étrangers entrés dans les moeurs et qu'ils désignent souvent des choses provenant de la culture anglo-américaine mais également parce qu'ils n'ont pas fait l'objet d'une promotion suffisante auprès des locuteurs de langue française.
Ainsi, certains exemples de termes crées par les commissions de terminologie doivent être données afin d'apprécier leurs qualités dans une présentation proche de celle des arrêtés ministériels publiés.[163]
Aéroglisseur, nom masculin.
Domaine : Transport.
Définition : Véhicule terrestre, marin ou amphibie glissant sur coussin d'air.
Terme à remplacer : Hovercraft.
Animateur, nom masculin.
Domaine : Audiovisuel.
Définition : Présentateur d'une émission composée de disques de variétés.
Terme à remplacer : Disc-jockey.
Annonceur, nom masculin
Domaine : Sport.
Définition : Personne qui fait les annonces au cours d'une rencontre sportive.
Terme à remplacer : Speaker.
Arrêt de jeu, nom masculin.
Domaine : Sport.
Définition : Interruption du jeu décidée ou constatée par un arbitre.
Terme à remplacer : Time out.
Baladeur, nom masculin.
Domaine : audiovisuel/son.
Définition : appareil portatif de reproduction sonore dont l'écoute s'effectue au moyen d'un casque léger.
Terme à remplacer : Walkman.
Bazarette, nom féminin.
Domaine : Commerce.
Définition : Petit établissement commercial de moins de 120 m<= dans lequel un personnel réduit offre des produits et services variés de nécessité courante.
Terme à remplacer : Convenience store.
Capitaux flottants, nom masculin.
Domaine : Finance.
Définition : Capitaux en quête de placements permettant la meilleure rentabilité à court terme.
Terme à remplacer : Hot money.
Centre commercial, nom masculin.
Domaine : Commerce.
Définition : Grande surface de vente.
Terme à remplacer : Shopping-center.
Coussin gonflable, nom masculin.
Domaine : Transport.
Définition : Protection frontale.
Terme à remplacer : Air bag.
Départage, nom masculin.
Domaine : Sport.
Définition : Prolongation d'une épreuve sportive.
Terme à remplacer : Play-off.
Départeur, nom masculin.
Domaine : Sport.
Définition : Personne qui donne le signal du départ.
Terme à remplacer : Starter.
Emission publique, nom féminin.
Domaine : Audiovisuel.
Définition : Emission qui se déroule en public.
Terme à remplacer : Audience show.
Jeu décisif, nom masculin.
Domaine : Sport.
Définition : Jeu de conclusion d'une manche destinée à départager les joueurs.
Terme à remplacer : Tie-break.
Mercatique, nom masculin.
Domaine : Commerce.
Définition : Ensemble des actions destinées à détecter les besoins et à adapter en conséquence et de façon continue la production et la commercialisation.
Terme à remplacer : marketing.
Parrainage, nom masculin.
Domaine : Sport/Art.
Définition : Soutien financier
Terme à remplacer : Sponsor.
Position de tête, nom féminin.
Domaine : Sport automobile.
Définition : Première place sur la grille de départ d'une course automobile.
Terme à remplacer : Pole position
Squatteur, nom masculin.
Domaine: Urbanisme.
Définition: Personne prenant abusivement possession d'un local vacant.
Terme à remplacer: Squatter.
Téléachat, nom masculin.
Domaine : Economie.
Définition : Achat à distance utilisant les techniques de télécommunication ou de radiodiffusion.
Terme à remplacer : Teleshopping.
Voyagiste, nom masculin ou féminin.
Domaine : Tourisme.
Définition : Personne morale ou physique concevant et commercialisant des voyages à forfait.
Terme à remplacer : Tour-operator.
Certains de ces équivalents français auront sans doute du mal à s'imposer dans le langage courant, en particulier dans celui des jeunes générations séduites par la culture américaine. Néanmoins, il est souhaitable que la France continue sa politique d'enrichissement de la langue française pour qu'elle trouve en elle-même les mots nouveaux au lieu d'avoir recours à des emprunts de termes étrangers pour combler les lacunes de son vocabulaire. La création terminologique doit donc être poursuivie mais celle-ci exige, pour qu'elle soit efficace, le respect de certaines règles propres à permettre la substitution des termes anglo-saxons par les équivalents français notamment les néologismes. Ainsi, on peut dire qu'un néologisme est enrichissant pour la langue française lorsqu'il désigne une réalité nouvelle ou améliore une désignation ancienne. Il peut également ne rien apporter de nouveau, un ou plusieurs mots étrangers existant déjà, et même appauvrir la langue française.
Outre la mission visant à favoriser la diffusion des terminologies nouvelles auprès des usagers, les commissions de terminologie doivent informer ces derniers de l'existence dans le lexique de la langue française de termes français. En effet, pour les défenseurs de la langue française, il est inacceptable qu'un terme français longtemps utilisé soit abandonné au profit de termes étrangers.[164] Pour stopper cette évolution, il apparaît important de sensibiliser les locuteurs de langue française. Par conséquent, ce n'est pas uniquement par décret que l'on peut faire en sorte qu'une population utilise pour communiquer d'abord les termes qui lui sont propres au lieu de ceux issus de lexiques étrangers. C'est peut-être également affaire de sensibilisation. Cette action visant à sensibiliser les usagers de la langue française aux richesses de celle-ci doit porter au premier chef sur les moyens de communication de masse, parce qu'ils sont devenus les moyens privilégiés de communication et de culture. Les médias doivent ainsi veiller à la sauvegarde de la langue française " en jouant leur rôle dans l'enrichissement de la langue et dans son respect "[165].
Dans ce domaine de la langue où la liberté d'expression commande, il est essentiel de convaincre les usagers plutôt que de les contraindre. Ce combat pour la défense de la langue française ne doit pas se muer en une chasse aux sorcières xénophobes.
2) UNE PROVOCATION à LA PURIFICATION LINGUISTIQUE
Avec l'intervention de l'Etat dans le domaine de la langue, certains ont pu craindre à l'ouverture d'une chasse aux mots étrangers. Or, ils ne sont pas immiscés dans ce domaine pour réglementer la langue française avec le souci de préserver la pureté de la langue mais avec celui de mettre fin à la pénétration abusive et injustifiée des termes étrangers. En effet, pour les pouvoirs publics, il n'était pas question d'interdire l'emploi d'un mot étranger si l'on n'a pas su créer le mot français correspondant, ni de justifier la création de mots français inutiles, faisant double emploi avec un mot existant. Ainsi, il n'y a pas lieu en principe de remettre en cause l'emploi de certains termes étrangers entrés dans le langage courant notamment lorsqu'ils n'ont pas d'équivalents français.
C'est le cas, par exemple, de termes comme[166] :
En matière de denrées alimentaires :
Beefsteak Spaghetti
Sandwich Toast
Pizza Corn flakes
Paella T.Bone
Chips Merguez
En matière de produits textiles :
Pull-over Jean
Tee shirt Polo
Short
En matière de sport :
Lob Lift
Corner Swing
Penalty
C'est le cas également de:
Week end Wagon
Scout Scotch
Script
D'autre part, l'obligation d'utiliser la langue française est assortie de certaines exceptions car elle ne doit pas aboutir à des excès comme la traduction de termes intégrés dans notre langage. Sont ainsi exclues du champ d'application des lois mettant en oeuvre la politique de création terminologique, les dénominations de produits typiques et spécialités d'appellation étrangère connus du plus large public. Sont de même exclues, les marques de fabrique ou de commerce et les raisons sociales. En effet, rien n'interdit de donner un nom étranger à un produit, dés lors que celui-ci fait l'objet d'un dépôt de marque et dés lors que sa présentation et son mode d'emploi sont libellés en langue française.
L'action des commissions de terminologie ne se limite pas à proposer aux usagers de la langue française des équivalents français aux termes anglo-saxons mais également à créer avec l'appui du législateur des obligations de terminologie à leur charge pour nettoyer la langue française " des souillures du franglais "[167]. C'est pourquoi, il faut nous intéresser aux effets attachés à la création terminologique.
II - LES EFFETS ATTACHES A LA CREATION TERMINOLOGIQUE
Le travail des commissions de terminologie aboutit, sur proposition de chaque Président des commissions, après avis du délégué général à la langue française, du Conseil International de la Langue Française, du premier ministre et du ministre de l'éducation nationale à la publication des arrêtés fixant la liste des termes approuvés. Ces arrêtés sont publiés au journal officiel et dans les bulletins officiels des ministres concernés.[168]
Les commissions de terminologie n'ont donc pas été créées uniquement pour proposer aux usagers de la langue française des équivalents français aux termes étrangers dans l'espoir de les convaincre de changer leurs habitudes linguistiques. En effet, si la publication des arrêtés de terminologie se limitait à une simple déclaration d'intention, les chances d'endiguer le processus de dégradation de l'intégrité de la langue française seraient inexistantes. C'est pourquoi, les pouvoirs publics sont intervenus pour soutenir l'action des commissions de terminologie en conférant à leurs arrêtés des effets obligatoires[169]. A travers la loi du 4/08/1994[170] relative à l'enrichissement de la langue française qui reprend exactement les dispositions de la loi du 31/12/1975 qu'elle abroge, le législateur manifeste son intention d'étendre le champ d'application des arrêtés de terminologie toujours dans l'optique de leur conférer une plus grande efficacité.
1) L'EXTENSION DE L'EFFET OBLIGATOIRE DES ARRÊTES DE TERMINOLOGIE
Dans un premier temps, les travaux des commissions ont abouti à la publication de plusieurs listes de mots dont l'emploi était obligatoire dans tous les actes émanant des services de l'Etat.[171]
Estimant avec raison que cette méthode n'était pas assez efficace pour nettoyer notre langue des souillures du franglais notamment au regard des enquêtes menées pour connaître l'accueil des travaux des commissions de terminologie, le législateur a pris une position plus répressive et énergique en adoptant la loi du 31/12/1975 comportant des dispositions relatives à l'enrichissement de la langue française abrogée par la loi du 4/08/1994 qui en reprend d'ailleurs le contenu.[172] La loi du 31/12/1975 a étendu le champ d'application de la politique de création terminologique prohibant le recours aux termes étrangers pour lesquels existent des équivalents, à toutes les opérations qu'elle vise et non plus aux seuls actes administratifs. Ainsi, dés l'entrée en vigueur des arrêtés, les termes ou expressions obligatoires figurant sur les listes devront être utilisés dans les décrets, les arrêtés, circulaires, instructions, et directives des ministres. Ils seront également impératifs dans les correspondances et documents de quelque nature que ce soit qui émanent des administrations, services, ou des établissements publics de l'Etat dans les textes des marchés et contrats auxquels l'Etat ou les établissements de l 'Etat sont parties, dans les informations et présentations de programmes de radiodiffusion ou de télévision. Ils doivent être obligatoirement utilisés dans les ouvrages d'enseignement, de formation ou de recherche utilisés dans les établissements, institutions ou organismes dépendant de l'Etat, placés sous son autorité ou soumis à son contrôle ou bénéficiant de son concours financier à quelque titre que ce soit. Dans un délai de 6 mois après la publication des arrêtes de terminologie, les termes ou expressions obligatoires devront être utilisés dans les textes, documents et inscriptions mentionnés dans la loi du 31/12/1975 et du 4/08/1994 à savoir des actes de droit privé.[173]
En étendant le champ d'application des arrêtés de terminologie aux particuliers, le législateur s'est donné les moyens de mener à bien sa politique de défense de l'intégrité de la langue française qui nous le verrons ne sont pas sans poser certaines questions quant à leur efficacité et quant à la constitutionnalité des dispositions imposant à des personnes privées l'obligation, sous peine de sanctions, d'employer certains mots ou expressions définis par voie réglementaire sous forme d'une terminologie officielle.
2) LES SANCTIONS DE L'INOBSERVATION DE L'OBLIGATION D'UTILISER LA TERMINOLOGIE OFFICIELLE
Sur cette question des sanctions encourues en cas d'inobservation de l'obligation d'employer les termes contenus dans les arrêtés de terminologie, on rejoint ce qui a été dit sur la question des sanctions pénales prescrites à défaut d'emploi de la langue française.
Il est tout de même utile de rappeler que l'une des raisons qui a conduit le législateur à adopter une nouvelle loi est l'inadaptation du régime des sanctions prévu par la loi du 31/12/1975. En effet, l'arsenal répressif se limitait aux sanctions peu élevées prévues par le code de la consommation et aucun droit particulier n'était reconnu aux associations de défense de la langue française. La loi du 4/08/1994 innove sur ces deux points puisqu'elle prévoit des sanctions pénales spécifiques et un droit pour les associations agréées de se porter partie civile devant les tribunaux.
La politique de défense de l'intégrité de la langue française aurait pu prendre avec la loi du 4/08/1994 un tour plus répressif par l'adoption de sanctions plus dissuasives qui auraient pu être prononcées notamment contre des personnes privées, si le Conseil Constitutionnel n'avait pas estimé que certaines dispositions de la loi relative à l'enrichissement de la langue française n'étaient pas conformes à certaines normes supérieures.
B - LES EFFETS REELLEMENT ATTACHES A LA CREATION TERMINOLOGIQUE
Alors que le législateur ambitionnait de mettre en place un instrument efficace de création terminologique, le conseil constitutionnel brise la politique française de défense de la langue française. Grâce à un champ d'application étendu et à un dispositif de sanctions adapté, la loi du 4/08/1994 devait permettre de lutter avec efficacité contre la pénétration abusive dans la langue française de termes étrangers.
Or, l'invalidation partielle de la loi du 4/08/1994 par le Conseil Constitutionnel a pour effet paradoxal d'entraîner un amoindrissement des dispositions applicables à la langue française en 1994 par rapport à loi de 1975 qui n'avait pas été déféré au Conseil Constitutionnel.
1) LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL REFUSE A L'ETAT LE DROIT D'IMPOSER UN FRANçAIS CODIFIE
Saisi le 1/07/1994 par soixante députés socialistes d'un recours concernant la loi relative à l'emploi de la langue française, le conseil constitutionnel a rendu une décision le 29/7/1994 invalidant des dispositions concernant la politique de création terminologique, en les jugeant contraires au principe de liberté de pensée et d'expression proclamée par l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme[174]. Reconnaissant que la langue française évolue comme toute langue vivante et s'enrichit incessamment, par l'usage de nouveaux apports, y compris de langues étrangères, le conseil constitutionnel a affirmé la liberté de toute personne privée de s'exprimer comme elle l'entend sans qu'on puisse lui imposer, sanctions pénales à la clé, d'user de mots ou d'expressions définis par voie réglementaire sous forme d'une terminologie officielle.
" Considérant que la liberté d'expression implique le droit pour chacun de choisir les termes jugés par lui les mieux appropriés à l'expression de sa pensée; que la langue française évolue, comme toute langue vivante, en intégrant dans le vocabulaire usuel des termes de diverses sources, qu'il s'agisse d'expressions issues de langues régionales, de vocables dits populaires ou de mots étrangers.
Considérant qu'il était loisible au législateur d'imposer dans les cas et conditions qu'il a prévus l'usage de la langue française.
Considérant que, s'agissant du contenu de la langue, il lui était également loisible de prescrire aux personnes morales de droit public comme aux personnes privées dans l'exercice d'une mission de service public, l'usage obligatoire d'une terminologie officielle[175].
Considérant que toutefois, eu égard à la liberté fondamentale de pensée et d'expression, il ne pouvait imposer, sous peine de sanctions, pareille obligation aux organismes et services de radiodiffusion sonore et télévisuelle, qu'ils soient privés ou publics et aux personnes privées, hors l'exercice d'une mission de service public ".
Par conséquent, est déclarée nulle dans huit alinéas différents du texte la formule suivante : " Le recours à tout terme étranger ou à toute expression étrangère est prohibé lorsqu'il existe une expression ou un terme français de même sens approuvés dans les conditions prévues par les dispositions réglementaires relatives à l'enrichissement de la langue française ".[176]
Ainsi, du fait de l'absence de distinction entre les personnes morales de droit public d'une part, et les simples personnes privées d'autre part, et eu regard au caractère indissociable de leur formulation, ces dispositions coercitives ont été annulées dans leur ensemble. Cela signifie qu'il faudrait aujourd'hui une nouvelle loi pour rétablir à l'égard des personnes publiques et des services publics les dispositions dont le conseil constitutionnel a admis le principe. La rigueur dont fait preuve le juge constitutionnel en exigeant une protection toute particulière pour les personnes privées non chargées d'une mission de service public est, en grande partie, liée à la rigueur de la loi elle-même. En effet, non seulement, le dispositif d'obligations mis en place reste en partie indéterminé puisqu'un renvoi est fait à une terminologie officielle définie par voie réglementaire, mais en plus, ce dispositif d'ordre public est assorti de sanctions lourdes et autonomes alors que la loi de 1975 liait ces sanctions au régime de la répression des fraudes moins répressif mais également moins dissuasif.
Le Conseil Constitutionnel s'est donc davantage attaché à la rédaction de la loi de 1994 qu'à ses objectifs que M.MARC LAURIOL définissait en ces termes :" Cette loi doit être interprétée beaucoup moins comme un texte coercitif, de simple police, que comme une invitation faite à la France de se ressaisir en enrayant certains excès. Elle doit être le support psychologique d'un état d'esprit ".[177] Ainsi, par une interprétation exigeante et rigoureuse de la liberté d'expression, le Conseil Constitutionnel admet-il que l'on puisse imposer à tous les services publics d'adopter vis-à-vis des personnes privées un langage que ces dernières ne peuvent pas s'opposer entre elles. En effet, il paraît normal que des personnes dont l'action se traduit, le plus souvent, par l'édictions d'actes administratifs s'imposant aux particuliers soient contraintes de s'exprimer en langue française et ce, y compris sous la forme de l'emploi d'une terminologie officielle définie par voie réglementaire. Il y a là, à la fois une obligation pour elles et un droit pour l'individu avec lequel elles sont en relation.
En conclusion, il faut espérer que le gouvernement et le parlement ne donnerons pas, à l'avenir, de ces principes une application distinguant trop nettement le langage administratif obligatoire de la langue librement pratiquée par les citoyens. Quel que soit le cadre dans lequel il évolue, c'est, en effet, toujours du français qu'il s'agit. Ce qui est sûr, c'est que le conseil constitutionnel prive l'Etat français d'une arme sans doute efficace pour défendre l'intégrité de la langue française à un moment où la pression du monde anglo-saxon est de plus en plus menaçante .
Au-delà de cette décision du Conseil Constitutionnel, se pose la question de l'avenir de la politique de création terminologique.
2) L'AVENIR INCERTAIN DE LA POLITIQUE DE CREATION TERMINOLOGIQUE
Certes, le Conseil Constitutionnel reconnaît au législateur la possibilité d'imposer l'usage obligatoire de la langue française dans les actes de la vie sociale, commerciale et intellectuelle. Mais, il ne peut plus prohiber l'usage de tous les mots étrangers pour lesquels il existe un équivalent validé par les commissions de terminologie.[178] Par conséquent, suite à la censure partielle du conseil constitutionnel, la loi " TOUBON " relative à l'enrichissement de la langue française devient essentiellement une pétition de principe sans portée normative. Les commissions de terminologie sont donc réduites à un rôle de simple conseiller dans le domaine linguistique que l'on pourrait résumer par une formule : " Les commissions de terminologie proposent, le peuple et l'usage dispose ". Par sa décision, le Conseil Constitutionnel a donc voulu préserver un espace de liberté pour chacun de nous en considérant que " le souverain " juge en matière de langue n'était ni un ministre, ni un tribunal, mais le bel et bon usage, auquel même l'Académie française s'est toujours pliée. Cette décision a fait l'objet de critiques parfois virulentes de la part des défenseurs de la langue française qui se voyaient ainsi priver des moyens susceptibles d'enrayer le processus de dégradation de la langue française, qui est un fait d'ailleurs incontesté. Devant l'urgence de la situation pour la langue française prise d'assaut par la langue anglaise, le Conseil Constitutionnel a préféré faire prévaloir le principe de la liberté d'expression. Reste à savoir si seuls, les locuteurs de la langue française auront le pouvoir et surtout le désir de la défendre. Cette décision du Conseil Constitutionnel est d'autant plus rigoureuse qu'il aurait pu limiter sa censure de la loi de 1994 en supprimant uniquement les personnes privées des articles imposant l'emploi d'une terminologie officielle.[179]
En outre, il reste à savoir comment les dispositions prévoyant d'une manière générale le recours à la langue française s'appliquerons dés lors que le contenu même des mots utilisés par les personnes de droit privé ne sera pas défini administrativement. Cette question permet ainsi de rapprocher les deux thèmes de notre étude à savoir l'emploi de la langue française et son enrichissement. En ce qui concerne l'article 2 de la loi de 1994, la loi impose l'emploi de la langue française dans plusieurs domaines sans distinguer entre personnes morales et personnes privées et sans imposer au service public le respect de la terminologie officielle. Cet article pose le principe de l'emploi obligatoire de la langue française et admet certaines exceptions. L'utilisation de termes étrangers n'ayant pas d'équivalents dans la langue française constitue t'elle une exception à l'article 2 ? Ainsi, en l'absence de dispositions prohibant le recours à des termes étrangers ayant un équivalent validé par les commissions de terminologie, c'est aux juges qu'il appartiendra de dire souverainement quel mot est français ou pas, et pas seulement dans les cas ou un mot étranger aurait pu être remplacé par un terme officiel. Sans aucun doute, cela aboutira à une application laxiste de cette loi et hétérogène en fonction des juridictions compétentes qui estimeront dans certains cas qu'un terme étranger est valable en l'absence d'équivalents français alors que d'autres l'estimeront contraire à l'article 2. En d'autres termes, certains mots seront acceptés comme français par tel juge et refusés par tel autre. Reste une dernière interprétation qui est la plus rigoureuse à savoir qu'aucun terme étranger ne pourra être utilisé par quiconque, entrant dans le champ d'application de la loi de 1994. C'est au juge qu'il appartiendra de trancher ces difficultés issues de la censure partielle de la loi " TOUBON " . C'est au législateur qu'il appartiendra de redonner à ce texte toute son efficacité notamment par rapport aux personnes morales de droit public et d'imaginer d'autres formes d'action sur le contenu de la langue française.
Le statut juridique de la langue française aujourd'hui homogène depuis la révision constitutionnelle de 1992 qui fait de la langue française la langue officielle de la République marque la volonté de l'Etat français de maintenir la langue française comme langue de communication internationale. Reste à savoir si cette politique de défense et de promotion de la langue française sera efficace face à la dégradation de la situation et de l'intégrité de la langue française, objet difficilement appropriable juridiquement par le droit et viable au regard de sa compatibilité avec des normes supérieures d'ordre international et des normes d'ordre interne.
[120] GOETHE, " l'âme d'un peuple vit dans sa langue ".
[121] M.DRUON, reférence déjà citée.
[122] RIVAROL, " Discours sur l'universalité de la langue française ".
[123] SUPRA emploi de la langue française.
[124] Parler de l'intégrité de la langue française, c'est parler de son contenu et non de son emploi.
[125] Article 1 de la loi du 4 Aout 1994, JORF 5/08/94 page 11392.
[126] J.RIGAUD, " La langue de chacun ", LE MONDE 4/08/94.
[127] G.CORNU, " Linguistique juridique ", ED.MONTCHRESTIEN 1990 page 45.
[128] Termes étrangers entrés dans l'usage courant mentionnés dans la circulaire du 14/3/77.
[129] Cette pénétration de termes étrangers est considérée comme abusive parce qu'elle est massive, incontrolée et injustifiée.
[130] M.JESTAZ, RTDCiv.1976 page 429.
[131] P.RICHERT.
[132] La dégradation de l'intégrité de la langue française par les médias est dénoncée sous plusieurs aspects, à la radio, à la télévision, dans le domaine publicitaire.
[133] La télévision est considérée comme le cheval de Troie de la langue anglaise en raison de son audience et de la place qu'elle occupe dans notre société.
[134] C'est le cas des animateurs d'émissions de variétés ou de divertissement.
[135] notamment attirés par la culture américaine.
[136] A.DAUZAT, " la défense de la langue française ", ED.BELIN, PARIS 1979.
[137] Note.
[138] C'est le cas notamment dans le domaine des affaires, des finances, des médias...
[139] C.Vandenbussche, La défense de la langue française, PETITES AFFICHES 22/05/91 Ndeg.61.
[140] J.CELLARD, LE MONDE 8/05/83.
[141] Phonologie: Science qui traite des phonémes du point de vue de leur fonction dans une langue donnée.
Phonéme: Elément sonore de telle ou telle langue se définissant par ses propriétés distinctives.
[142] Article XXIV du statut de l'Académie française: "La principale fonction de l'Académie sera de travailler avec tout le soin et toute la diligence possible à donner des régles certaines à notre langue et à la rendre pure, éloquente et capable de traiter les arts et les sciences ".
[143] Le terme " Etat " doit être pris dans son acception large à savoir le pouvoir executif, le pouvoir législatif.
[144] notamment parce qu'il est difficile de réglementer impérativement le contenu de la langue française, élément insaisissable, fluide par sa nature même.
[145]Les lois du 31/12/75 et du 4/08/94 contiennent des dispositions relatives à la défense de l'intégrité de la langue française.
[146] SUPRA 174.
[147] JEAN DUTOURD, Académicien, Président de l'Association de Défense de la Langue Française, REVUE DE L'ASSOCIATION ndeg.172 page 4.
[148] Force que ne possede pas les décisions de l'Académie Française.
[149] Jacques Toubon, LE MONDE, 29/07/94.
[150] M.LAURIOL, JO.Senat, Séance du 12/4/94, page 958.
[151] Remplacé en 1973 par le Haut Comité de la Langue Française et en 1989 par le Conseil Supérieur de la Langue Française et par la délégation générale à la Langue Française, décret du 2/06/1989.
[152] J.O.R.F, ED.Lois et Décret, 9/01/1972, Décret ndeg.72-19 du 7/01/1972 relatif à l'enrichissement de la Langue Française, page 388.
[153] Décret du 7/01/1972 abrogé par le décret ndeg.83-243 du 25/03/1983, J.O.R.F, ED.Lois et Décrets, 29/03/1983 page 1233, lui-même abrogé par le décret ndeg.86-439 du 11/03/1986, J.O.R.F, ED. Lois et Décrets, 16/03/1986 page 4255, toujours en vigueur sous l'empire de la loi du 4/08/1994.
[154] V.DELAPORTE, REVUE CRITIQUE DE DROIT INTERNATIONAL PRIVE, 1976, page 447.
[155] Défendre et enrichir la langue française, c'est dans un premier temps relancer la politique de création terminologique de la France, s'il le faut par le biais des pouvoirs publics, mais également convaincre les locuteurs de langue française de la suivre dans un domaine particulier(ou) ou l'on sait que domine le principe de la liberté d'expression.
[156] La liste des arrêtés publiés par ces différentes commissions ministérielles de terminologie figure en annexe.ndeg.3, 5, 6.
[157] Article 4 du décret du 11/03/86, référence précitée.
[158] La liste des secteurs d'activité des commissions de terminologie figure en annexe ndeg.4.
[159] Néologisme :mot de création récente ou acception nouvelle d'un mot existant déjà.
[160] principalement des termes anglo-saxons.
[161] Conseil d'Etat, 5/02/1975, la Jardinerie, RECUEIL LEBON page 85: Le Conseil d'Etat a jugé que la mise en oeuvre de cette procédure ne porte en aucun cas atteinte à la protection des marques et dénominations sociales des entreprises;c'est ce qui ressort de cette décision dans une affaire ou la société revendiquait la marque " La Jardinerie "et demandait l'annulation de l'arrêté ministériel du 29/11/1973, approuvant ce nouveau terme.
[162] Annexe ndeg.3.
[163] Annexe ndeg.4.
[164] Il n'existe pas de plus grande erreur en cette matiére que de croire que l'usage d'un sabir international soit un signe d'ouverture et de modernité.
[165] Jean Rigoud, Président de RTL, LE MONDE 9/08/94.
[166] Termes étrangers entrés dans l'usage courant et dont certains figurent dans les dictionnaires usuels.
[167] SUPRA ndeg.174.
[168] Article 2 du Décret ndeg.86-439 du 11/3/86.
[169] Cette intervention a fait l'objet d'une controverse entre les parlementaires tranchée par le conseil constitutionnel par une décision du 29/7/1994.
[170] SUPRA ndeg.6.
[171] Article 2 du Décret ndeg. 72-19 du 7/01/1972.
[172] Néanmoins ces deux lois n'ont pas connu le même sort, SUPRA Décision du conseil constitutionnel du 29/07/1994.
[173] Article 2 de la Loi du 4/08/1994: contrats de travail, de vente, messages publicitaires...., SUPRA ndeg. 6 .
[174] Article 11 de la Déclaration des Droits de l'Homme la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme: " Tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ".
[175] Cependant, les administrés ne peuvent se prévaloir de la liberté d'expression pour refuser de s'exprimer en langue française dans ses relations avec l'administration.
[176] Décision du conseil constitutionnel du 29/07/1994, JCP 1995 ndeg.22359, commentaire de R.DEBBASCH.
[177] M.M.LAURIOL, rapporteur de la loi du 31/12/1975, J.O.R.F SENAT du 26/05/1994, page 1916.
[178] L'article 5 maintient cette obligation pour les contrats passées par des personnes morales de droit public ou des personnes privées exerçant une mission de service public.
[179] Reste à savoir si la politique d'enrichissement de la langue française mis en place par la loi aurait été efficace. C'est à cette à question notamment que nous nous efforceront de répondre dans la deuxième partie de cette étude.
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