Convention européenne
pour la surveillance des personnes
condamnées ou libérées sous condition

Faite à Strasbourg le 30 novembre 1964
Entrée en vigueur le 22 août 1975
Décret No 75-922 du 2 octobre 1975

TITRE Ier. - PRINCIPES FONDAMENTAUX

Article 1er:
1. Les Parties contractantes s'engagent à se prêter, conformément aux dispositions suivantes, l'aide mutuelle nécessaire au reclassement social des délinquants visés à l'article 2. Cette aide consiste en une surveillance des délinquants qui s'effectue, d'une part, par les mesures propres à faciliter leur amendement et leur réadaptation à la vie sociale et, d'autre part, par le contrôle de leur conduite en vue de permettre, s'il y a lieu, soit le prononcé de la sanction, soit sa mise à exécution.

2. Les Parties contractantes mettront à exécution, conformément aux dispositions suivantes, la peine ou la mesure de sûreté privatives de liberté prononcées contre le délinquant et dont l'application avait été suspendue.

Article 2:
1. Au sens de la présente Convention, l'expression "délinquant" désigne toute personne qui, sur le territoire d'une des Parties contractantes, a fait l'objet:

a) D'une décision judiciaire de culpabilité, assortie d'une suspension conditionnelle du prononcé de la peine;

b) D'une condamnation emportant privation de liberté, prononcée sous condition ou dont l'exécution a été suspendue conditionnellement, en tout ou en partie, soit au moment de la condamnation, soit ultérieurement.

2. Dans les articles suivants, le terme "condamnation" vise les décisions intervenues tant en vertu de l'alinéa a) que de l'alinéa b) du paragraphe 1ci-dessus.

Article 3:
Les décisions visées à l'article 2 doivent être définitives et exécutoires.
Article 4:
L'infraction qui motive une demande visée à l'article 5 doit être réprimée à la fois par la loi de l'État requérant et par celle de l'État requis.
Article 5:
1. L'État qui a prononcé la condamnation peut demander à l'État sur le territoire duquel le délinquant établit sa résidence habituelle:

a) D'assurer uniquement la surveillance conformément au titre Il;
b) D'assurer la surveillance et de procéder éventuellement à l'exécution conformément aux titres II et III;
c) D'assurer l'entière application de la condamnation conformément aux dispositions du titre IV.

2. L'Etat requis est tenu, dans les conditions prévues par la présente Convention, de donner suite à cette demande.

3. Si l'Etat requérant a formulé une des demandes visées au paragraphe i ci-dessus et si l'État requis estime préférable, dans les cas d'espèce, d'utiliser une des autres possibilités prévues dans ce paragraphe, l'Etat requis peut refuser d'accéder à cette demande tout en se déclarant prêt à donner suite à une autre demande qu'elle indique.

Article 6:
Sur la demande de l'État qui a prononcé la condamnation, la surveillance, l'exécution ou l'entière application définies à l'article précédent sont assurées par l'État sur le territoire duquel le délinquant établit sa résidence habituelle.
Article 7:
1. La surveillance, l'exécution, ou l'entière application n'ont pas lieu:

a) Si elles sont considérées par l'Etat requis comme étant de nature à porter atteinte à sa souveraineté, à sa sécurité, aux principes fondamentaux de son ordre juridique ou à d'autres de ses intérêts essentiels;

b) Si la condamnation qui motive la demande prévue à, l'article 5 est fondée sur des faits qui ont été jugés définitivement dans l'Etat requis;

c) si l'État requis considère les faits qui motivent la condamnation soit comme une infraction politique, soit comme une infraction connexe à une telle infraction, soit encore comme une infraction purement militaire;

d) si la prescription de la sanction est acquise d'après la loi de l'État requérant ou d'après celle de l'État requis;

e) Si l'auteur de l'infraction bénéficie d'une amnistie ou d'une mesure de grâce dans l'État requérant ou dans l'état requis.

2. La surveillance, l'exécution ou l'entière application peuvent être refusées:

a) Si les autorités compétentes de l'Etat requis ont décidé de ne pas engager de poursuites ou de mettre fin aux poursuites qu'elles ont exercées pour les mêmes faits;

b) Si les faits qui motivent la condamnation font l'objet de poursuites dans l'État requis;

c) Si la condamnation qui motive la demande a été prononcée par défaut;

d) Dans la mesure où l'État requis estime que la condamnation dont il est saisi est incompatible avec les principes qui président à l'application de son droit pénal, notamment si, en raison de son âge, l'auteur de l'infraction n'eût pas pu être condamné dans l'État requis.

3. En matière d'infractions fiscales, la surveillance ou l'exécution ont lieu dans les conditions prévues par la présente Convention seulement s'il en a été ainsi décidé entre Parties contractantes pour chaque infraction ou catégorie d'infractions.

Article 8:
Dans la mesure où cela est nécessaire, l'État requérant et l'État requis se tiennent mutuellement informés de toute circonstance susceptible d'affecter l'accomplissement des mesures de surveillance sur Ii territoire de l'Etat ou la mise à exécution de la condamnation dans cet Etat.
Article 9:
L'État requis informe sans retard l'État requérant de la suite donnée à sa demande.

En cas de refus total ou partiel, il fait connaître les motifs de cette décision.

TITRE II. - DE LA SURVEILLANCE

Article 10:
L'État requérant fait connaître à l'État requis les conditions imparties au délinquant et, s'il y a lieu, les mesures de surveillance auxquelles celui-ci est tenu de se conformer pendant la période d'épreuve.
Article 11:
1. L'État requis satisfait à la demande de l'État requérant et, si cela est nécessaire, il adapte selon sa propre législation les mesures de surveillance prescrites.

2. En aucun cas les mesures de surveillance appliquées par l'État requis ne peuvent aggraver par leur nature ou par leur durée celles prescrites par l'état requérant.

Article 12:
Lorsque l'État requis accepte d'assurer la surveillance, [il] procède aux devoirs suivants:

1. Il informe sans retard l'État requérant de l'accueil qu'il a réservé à sa demande;
2. Il s'assure la collaboration des autorités ou des organismes qui, sur son propre territoire, sont habilités à surveiller et à assister les délinquants;
3. Il informe l'État requérant de toutes mesures prises et de leur mise en application.

Article 13:
Dans le cas où l'intéressé s'expose à une révocation de la décision de suspension conditionnelle visée à l'article 2, soit en raison d'une poursuite ou d'une condamnation pour une nouvelle infraction, soit en manquant aux obligations qui lui ont été imposées, les renseignements nécessaires sont fournis d'office et sans délai par l'État requis à l'Etat requérant.
Article 14:
Dès l'expiration de la période de surveillance, à la demande de l'État requérant, l'État requis fournit à ce dernier tous les renseignements nécessaires.
Article 15:
L'État requérant a seul compétence pour apprécier, compte tenu des renseignements et avis fournis par l'État requis, si le délinquant a satisfait ou non aux conditions qui lui étaient imposées et pour tirer de ses constatations les conséquences prévues par sa propre législation.

il informe l'État requis de sa décision.

TITRE III. - DE L'EXÉCUTION DES CONDAMNATIONS

Article 16:
Après révocation de la décision de suspension conditionnelle par l'État requérant et sur la demande de cet État, l'État requis a compétence pour exécuter la condamnation.
Article 17:
L'exécution a lieu en application de la loi de l'État requis, après vérification de l'authenticité de la demande d'exécution et de sa conformité aux conditions fixées par la présente Convention.
Article 18:
L'État requis adresse en temps utile à l'État requérant un document certifiant l'exécution de la condamnation.
Article 19:
L'État requis substitue, s'il y a lieu, à la sanction infligée dans l'État requérant, la peine ou la mesure prévue par sa propre loi pour une infraction analogue. Cette peine ou mesure correspond, autant que possible, quant à sa nature, à celle infligée par la décision à exécuter. Elle ne peut ni excéder le maximum prévu par la loi de l'Etat requis ni aggraver par sa nature ou par sa durée la sanction prononcée dans l'État requérant.
Article 20:
L'État requérant ne peut plus procéder à aucune des mesures d'exécution demandées à moins qu'un refus ou une impossibilité d'exécution lui aient été notifiés par l'Etat requis.
Article 21:
L'État requis est compétent en matière de libération conditionnelle. Le droit de grâce peut être exercé par l'État requérant et par l'État requis.

TITRE IV. - DU DESSAISISSEMENT EN FAVEUR DE L'ÉTAT REQUIS

Article 22:
L'État requérant fait connaître à l'État requis la condamnation dont il demande l'entière application.
Article 23:
1. L'État requis adapte la peine ou la mesure prononcée à sa législation pénale comme si la condamnation avait été prononcée pour la même infraction commise sur son, territoire.

2. La sanction imposée dans l'Etat requis ne peut aggraver la sanction prononcée dans l'Etat requérant.

Article 24:
L'État requis assure l'entière application de la condamnation ainsi adaptée comme s'il s'agissait d'une condamnation prononcée par sa juridiction.
Article 25:
L'acceptation par l'État requis d'une demande formulée conformément au présent titre éteint le droit d'exécuter la condamnation dans l'État requérant.

Article TITRE V. - DISPOSITIONS COMMUNES

Article 26:
1. Toute demande prévue à l'article 5 est formulée par écrit. Elle indique:

a) L'autorité dont elle émane;
b) Son objet;
c) L'identité du délinquant et son lieu de résidence dans l'État requis.

2. La demande de surveillance est accompagnée de l'original ou d'une copie authentique de la décision contenant les raisons qui ont motivé la surveillance et de celle qui prescrit les mesures auxquelles est soumis le délinquant. Elle doit certifier le caractère exécutoire de la décision et des mesures de surveillance qui ont été ordonnées. Elle précise, dans toute la mesure du possible, les circonstances de l'infraction qui a motivé la décision de surveillance, le temps et le lieu où a été commise l'infraction, sa qualification légale et, s'il y a lieu, la durée de la sanction à exécuter. Elle fournit tous renseignements sur la nature et la durée des mesures de surveillance dont l'application est requise. Elle contient les références aux dispositions légales applicables et les renseignements nécessaires sur la personnalité du délinquant et sur sa conduite dans l'État requérant avant et après le prononcé de la décision de surveillance.

3. La demande d'exécution est accompagnée de l'original ou d'une copie authentique de la décision constatant la révocation de la condition suspensive de la condamnation ou de son exécution ainsi que de la décision de condamnation. Le caractère exécutoire de ces deux décisions est certifié dans les formes prescrites par la loi de l'État qui les a prononcées.
Lorsque la décision à exécuter en remplace une autre sans reproduire l'exposé des faits, une copie authentique de la décision contenant cet exposé sera jointe.

4. La demande qui a pour objet l'entière application de la condamnation est accompagnée des documents visés au paragraphe 2 ci-dessus.

Article 27:
1 La demande est adressée par le ministère de la Justice de l'État requérant au ministère de la Justice de l'État requis. La réponse est transmise par la même voie.

2. Les communications nécessaires à l'application de la présente Convention sont échangées, soit par la voie indiquée au paragraphe i du présent article, soit directement entre les autorités des Parties contractantes.

3. En cas d'urgence, les communications visées au paragraphe 2 du présent article peuvent être transmises par l'intermédiaire de l'Organisation internationale de police criminelle (Interpol).

4. Toute Partie contractante peut, par déclaration adressée au Secrétaire général du Conseil de l'Europe, faire connaître qu'elle entend déroger aux règles de transmission énoncées aux paragraphes i et 2 du présent article.

Article 28:
Si l'État requis estime que les renseignements fournis par l'État requérant sont insuffisants pour lui permettre d'appliquer la présente Convention, il demande le complément d'informations nécessaire. Il peut fixer un délai pour l'obtention de ces informations.
Article 29:
1 Sous réserve des dispositions du paragraphe 2 du présent article, la traduction des demandes et celle des pièces annexes, ainsi que celle de tous autres documents relatifs à l'application de la présente Convention n'est pas exigée.

2. Toute Partie contractante pourra, au moment de la signature ou du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'adhésion, par déclaration adressée au Secrétaire général du Conseil de l'Europe, se réserver la faculté d'exiger que les demandes et pièces annexes lui soient adressées accompagnées, soit d'une traduction dans sa propre langue, soit d'une traduction dans l'une quelconque des langues officielles du Conseil de l'Europe ou dans celle de ces langues qu'elle indiquera. Les autres Parties contractantes pourront se prévaloir du défaut de réciprocité.

3. Le présent article ne porte pas atteinte aux dispositions relatives à la traduction des demandes et pièces annexes, contenues dans les accords ou arrangements en vigueur ou à intervenir entre deux ou plusieurs Parties contractantes,

Article 30:
Les pièces et documents transmis en application de la présente Convention sont dispensés de toutes formalités de légalisation.

Article 31:
L'État requis a compétence pour percevoir, sur la demande de l'État requérant, les frais de poursuite et de jugement exposés dans cet État.

S'il procède à cette perception, il n'est tenu de rembourser à l'État requérant que les honoraires d'experts qu'il a perçus.

Article 32:
Les frais de surveillance et d'exécution exposés dans l'État requis ne sont pas remboursés.

TITRE VI. - DISPOSITIONS FINALES

Article 33:
La présente Convention ne porte pas atteinte aux dispositions qui régissent la police des étrangers.
Déclaration de la France
En déposant l'instrument d'approbation de la Convention européenne pour la surveillance des personnes condamnées ou libérées sous condition, le Gouvernement français a confirmé qu'il fait usage de la réserve prévue par l'article 38, paragraphe 1, de la Convention et son Annexe, permettant de ne pas accepter la totalité du titre III (De l'exécution des condamnations) et du titre IV (Du dessaisissement en faveur de l'État requis).

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