Le Droit de la Langue Française

par Grégory Meyer

Partie 1 - Le droit de la langue française

Chapitre 1 - L'emploi obligatoire de la langue française


SECTION 1 : LA PROTECTION DES LOCUTEURS DE LANGUE FRANçAISE

Il est des moments dans la vie d'une nation, où il faut s'arrêter, faire le bilan, évaluer l'avenir et corriger s'il le faut, les habitudes, les tendances, les codes, et les politiques. C'est, d'une certaine manière, ce qui s'est passé en matière de langue avec l'édification d'un corps de règles imposant l'emploi obligatoire de la langue française.

Considérée dans sa fonction première, c'est à dire comme un outil de communication, la langue est faite pour comprendre et être compris et ceci du plus grand nombre. Or, jour après jour, les manifestations des abandons des champs couverts par notre langue se multiplient, dans les domaines économiques, scientifiques, technologiques, et depuis peu dans le domaine de la culture, au profit de l'anglo-américain.

D'où, l'adoption par la France, d'un ensemble de dispositions imposant l'emploi obligatoire de la langue française. Ces dispositions linguistiques n'ont pas pour objet de bouter hors de France la langue anglaise qui s'impose progressivement comme le moyen unique de communication internationale[14]mais de faire en sorte que la langue française ne soit pas exclue en France ou à l'étranger dans des circonstances en constante extension[15], que toute personne puisse en France et hormis les exceptions allant de soi, être entendue, servie, informée, enseignée, diplômée, recrutée uniquement à l'aide de la langue française.

En d'autres termes, le statut juridique de la langue française a pour objet de garantir aux français, salariés, consommateurs, justiciables, scientifiques, le droit d'utiliser leur langue et de la faire utiliser dans un certain nombre de circonstances de la vie courante et professionnelle et de les protéger contre une mauvaise compréhension résultant de textes en langue étrangère.

" C'est en effet un droit élémentaire du citoyen de pouvoir disposer d'informations dans la langue de la République ", à savoir la langue française[16].

I - LA PROTECTION RELATIVE à L'ACTIVITE JURIDIQUE DES LOCUTEURS DE LANGUE FRANçAISE

Le statut juridique de la langue française imposant l'emploi obligatoire de la langue française proclame le droit au français permettant ainsi à la langue française d'être naturellement la langue dans laquelle se déroulent les activités qui ont lieu sur le territoire national notamment les activités judiciaires et les activités juridiques.

A - LA LANGUE FRANçAISE, LANGUE JUDICIAIRE

Le principe énoncé par l'ordonnance de 1539 toujours en vigueur aujourd'hui est clair : l'administration de la justice doit se faire en langue française[17]. Néanmoins, la portée de ce principe n'est pas sans poser de problèmes notamment pour les juges. Aussi, il conviendra d'en déterminer le domaine d'application et d'en envisager les limites.

1) L'EMPLOI OBLIGATOIRE DE LA LANGUE FRANçAISE EN MATIERE JURIDICTIONNELLE

Aucun texte récent d'ordre général ne prescrit cette obligation d'emploi de la langue française en matière juridictionnelle. Aussi, et bien qu'à l'origine conçue pour écarter l'usage du latin, l'ordonnance de Villers-Cotterêt de 1539 est par tradition considérée comme le texte faisant de la langue française la langue judiciaire. C'est donc sur ce fondement que les juges ont fait de la langue française, une règle obligatoire dans le déroulement des procédures tant administrative que judiciaire. Toutefois, en imposant cette obligation non seulement aux juges et aux auxiliaires de justice mais également aux plaideurs eux-mêmes, la question s'est posée de savoir si les tribunaux n'allaient pas au-delà des dispositions contenues dans l'ordonnance de 1539. Celle-ci trouvera d'ailleurs sa solution dans la révision constitutionnelle de 1992.

a) La rédaction des jugements en langue française

Un juge ne peut s'exprimer qu'en langue française. En effet, le jugement est un acte public qui, une fois prononcé fait partie de l'ordonnancement juridique. En cela, il doit être accessible aux justiciables, au public et aux juges eux-mêmes qui doivent en cas de recours, pouvoir statuer sans être tenu de connaître toutes les langues étrangères ou régionales[18].

Certes, il faut bien reconnaître qu'à notre époque, la rédaction d'une décision de justice intégralement en langue étrangère se présente assurément comme une hypothèse peu probable.

Néanmoins, il ne faut pas négliger l'hypothèse d'une rédaction partielle en langue étrangère d'un jugement. La cour de cassation a d'ailleurs eu l'occasion de se prononcer sur cette question dans un arrêt du 11/01/1989.

Dans cette décision, en effet, le litige portait sur l'application d'une clause attributive de compétence insérée dans un contrat conclu entre une société américaine et une société française et rédigé en anglais. Sans préjuger du fond de l'affaire qui leur était soumise, les magistrats vont simplement se prononcer sur une question de forme, celle de l'arrêt rendu par la cour d'appel, en annulant celui-ci pour défaut de motivation en langue française. Il est ainsi reproché aux juges du fond d'avoir reproduit la clause litigieuse sur laquelle ils fondaient leur solution en anglais sans en donner " la signification tant matérielle qu'intellectuelle "[19].

Enfin, cette exigence d'emploi de la langue française devrait trouver à s'appliquer aux décisions rendues par certaines autorités administratives indépendantes.[20] Celles-ci sans être des juridictions n'en exercent pas moins des fonctions que l'on peut qualifier de " juridictionnelles " dans la mesure où il leur est reconnu un pouvoir de sanction. Leurs décisions, motivées, devraient à l'instar des décisions de justice être rédigées en langue française dans leur intégralité.[21]

L'obligation d'emploi de la langue française en matière juridictionnelle ne s'impose pas seulement aux juges mais également aux auxiliaires de justice.[22]

b) Le déroulement des procédures juridictionnelles en langue française

Le principe selon lequel l'administration de la justice doit se faire en langue française suppose l'obligation d'employer la langue française dans le déroulement des procédures[23] tant administrative que judiciaire. En d'autres termes, la langue française est la langue des procédures ce qui a pour conséquence de rendre obligatoire la rédaction en langue française des actes produits devant les tribunaux.[24]

S'agissant des auxiliaires de justice, les actes de procédure faits par eux pour le compte des parties doivent être rédigés en langue française. En effet, étant des actes publics, cette obligation repose sur le fondement de l'arrêté du 24 prairial an XI qui impose la rédaction en langue française de tous les actes publics. L'ordonnance de 1539 pourrait également servir de fondement à cette obligation dans la mesure où celle-ci vise expressément " les actes et exploits de justice " dans son article 111. Se trouvent tout spécialement concernés par cette obligation de rédaction en langue française, les constats, les procès-verbaux et les exploits exécutés par les huissiers. Ainsi, dés 1859, la Cour de Cassation, à propos d'un exploit d'huissier rédigé, en Corse, en langue italienne a pris une position particulièrement ferme en prononçant sa nullité.[25] De même, il a été jugé qu'une assignation rédigée, bien que très partiellement dans une langue étrangère, sans traduction, ne respecte pas cette obligation.[26]

Il en serait de même pour tout acte de procédure produit en justice.

Les plaideurs eux-mêmes paraissent tenus de se conformer à l'obligation d'emploi de la langue française dans leurs rapports avec la justice. Bien que par principe, les actes sous seing privé ne nécessitent pas l'usage obligatoire de la langue française, ils devront néanmoins être accompagnés d'une traduction authentique s'ils doivent être produits en justice. C'est ainsi que les juges ont refusé de considérer comme un mémoire au sens de l'article 584 du Code de Procédure Pénale, un document produit et rédigé en langue étrangère par le justiciable[27]. Par conséquent, un mémoire personnel en cassation doit être rédigé en langue française[28].

Ils ont également refusé à plusieurs reprises de prendre en considération des pièces soumises à leur contrôle et rédigées en langue étrangère dés lors qu'aucune traduction authentique n'était fournie. L'arrêt de la Cour de Cassation du 17/02/1981 a pris une telle position.

" Attendu que le contrat d'assurance litigieux est rédigé en langue anglaise et que sa traduction en langue française n'est pas produite; qu'il s'ensuit que la cour de cassation n'est pas en mesure d'exercer son contrôle sur la qualification de ce contrat "[29].

Des solutions identiques ont été retenues par le Conseil d'Etat à propos d'une requête juridictionnelle rédigée en Breton non accompagnée d'une traduction.

" La juridiction saisie d'une requête à laquelle sont annexées des pièces non établies en langue française et non accompagnée d'une traduction certifiée conforme, n'est pas obligée de tenir compte de ces pièces ni d'inviter le requérant à produire leur traduction.[30] .

La langue à utiliser pour saisir la justice est donc la langue française. Le principe exprimé dans toutes ces décisions est d'étendre à tous les documents et pièces apportés par les parties et produits en justice, l'obligation d'emploi de la langue française notamment pour une bonne administration de la justice. Cependant, la question se pose de savoir sur quel fondement les juges se sont appuyés pour rendre de telles décisions. Au regard des décisions prises en la matière, on peut noter que les juges se sont fondés sur l'ordonnance de 1539 pour justifier leurs solutions. Or, ce recours semble discutable dans la mesure ou l'ordonnance de Villers-Cotterêt ne vise " apparemment " que ceux qui rendent la justice et non ceux qui y font appel.

Certains juges ont même considérés l'obligation de rédiger en langue française tout document de nature judiciaire comme " un principe préexistant au droit écrit dont l'ordonnance de 1539...ne serait que l'une des expressions ou l'un des reflets.[31] " Depuis la révision constitutionnelle de 1992, il existe une disposition générale faisant sur le territoire de la République française du français la langue officielle. Ce texte pourrait ainsi servir de fondement à toutes décisions des juges imposant l'emploi de la langue française en dehors de toutes lois.[32]

L'existence d'un principe pose inévitablement la question de sa sanction et de ses limites.

2) LIMITES ET SANCTIONS DE L'OBLIGATION D'EMPLOI DE LA LANGUE FRANçAISE EN MATIERE JURIDICTIONNELLE

L'administration de la justice doit donc se faire en langue française, langue officielle de la République depuis 1992. Cependant, il existe des situations notamment devant les juridictions pénales où ce principe ne trouve pas à s'appliquer en raison de l'existence d'autres principes de valeurs supérieures.

a) Les dérogations à l'obligation d'emploi de la langue française

Devant les juridictions pénales, le principe imposant l'emploi de la langue française en matière juridictionnelle continue à s'appliquer non seulement pour les jugements[33]mais également pour tous les actes concourant à la procédure pénale.[34] Cependant, l'application de ce principe doit être conciliée avec celui des droits de la défense. Ceci peut conduire le juge à écarter l'obligation d'emploi de la langue française.

En effet, au nom du respect des droits de la défense, tout accusé a droit à se faire assister gratuitement d'un interprète, s'il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l'audience.[35] Aussi, le fait de ne pas désigner un interprète, lorsque se présence est nécessaire pour que l'accusé suive utilement les débats est une cause absolue de nullité, les droits de la défense étant violés.[36] Néanmoins, c'est au président qu'il convient d 'apprécier si un interprète est nécessaire et cette appréciation est faite souverainement.[37]

Quant à la mission de l'interprète, celui-ci n'est pas tenu de traduire tout ce qui se dit ou se lit à l'audience. Son assistance est prescrite toutes les fois que son concours est nécessaire. Il en est ainsi pour les dépositions écrites des témoins dont le président fait donner lecture en vertu de son pouvoir discrétionnaire, pour les réquisitions du ministère public sur l'application de la peine[38], pour la déclaration de la Cour d'Assise et du jury et pour l'arrêt de condamnation[39].

De plus, depuis la loi des 4/1/1993 et 24/08/1993 portant réforme de la procédure pénale, l'entretien avec un avocat au terme de la vingtième heure de garde à vue[40]. Au cours de l'entretien avec un avocat considéré par le tribunal de grande instance d'Aix en Provence dans sa décision du 22/12/1993 comme une formalité substantielle, l'absence d'un interprète dés lors que sa présence est nécessaire équivaut à l'absence d'entretien, entraînant ainsi la nullité de l'ensemble des actes auxquels il a été procédé durant la garde à vue.

b) Les sanctions à l'inobservation de l'obligation de la langue française

L'existence d'une règle pose inévitablement la question de sa sanction. La question est ici de savoir s'il existe une sanction lorsqu'un document judiciaire n'est pas rédigé en langue française.

Y a-t-il ou non nullité ?

Il peut être tentant d'appliquer le principe " Pas de nullité sans texte ", et force est de constater que l'ordonnance de 1539 ne prévoit pas la nullité et même n'organise aucune sanction. Toutefois, on sait que le silence d'une loi ne suffit pas à écarter la nullité parce qu'à côté des nullités textuelles énoncées de façon expresse par le législateur, il existe des nullités virtuelles tacites qui viennent sanctionner la violation de dispositions présentant un caractère d'ordre public[41]. Cette idée d'ordre public linguistique, selon la formule de M.MALAURIE, trouvant sa justification dans l'unité de la langue française, la bonne administration de la justice, et la révision constitutionnelle faisant de la langue française la langue de la République, est sans doute celle qui a conduit les juges à prononcer la nullité d'un jugement rédigé en langue étrangère.

S'agissant non plus des jugement mais des actes de procédure et en vertu de l'article 114 du Nouveau Code de Procédure Civile qui en réglemente la nullité, celle-ci ne parait pouvoir être prononcée que s'il est prouvé que l'irrégularité fait grief, et ceci même s'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.

Enfin, les documents judiciaires émanant cette fois des justiciables, se trouvent quant à eux sanctionnés, selon le cas, par l'irrecevabilité[42] ou l'inexistence[43]. La langue française se présente donc sans conteste comme la langue judiciaire. Cependant, la question de la compatibilité de ce principe avec la réglementation communautaire ne manquera pas de se poser. En effet, dans quelle mesure pourrait-on continuer à imposer l'emploi de la langue française à un ressortissant de la communauté européenne ayant affaire à l'administration ou à la justice française ?

Cette question relative à la compatibilité du droit de la langue française avec les normes européennes sera traitée dans notre deuxième partie. Pour l'instant, il faut poursuivre l'étude des dispositions visant à la défense de la langue française et à la protection des locuteurs de langue française, consommateurs, salariés, employeurs contre une mauvaise compréhension résultant de l'emploi d'une langue étrangère.

B - LA LANGUE FRANçAISE, LANGUE JURIDIQUE

On pourrait très légitimement croire qu'à la différence des actes publics[44], les actes rédigés par des particuliers ne sont pas concernés par cette exigence d'emploi de la langue française. La liberté ne doit-elle pas en effet être totale, sauf à fournir une traduction si l'acte vient à être produit en justice ou devant l'administration.

L'obligation d'utiliser la langue française dans les actes de la vie sociale, commerciale, et intellectuelle ne porte pas atteinte à la liberté fondamentale de pensée et d'expression proclamée par l'article 11 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789. C'est ce qu'a décidé le Conseil Constitutionnel[45] saisi pour apprécier la conformité de la loi du 4/08/1994 avec la constitution.[46] Par conséquent, toute une série d'actes de nature privée se trouve de façon expresse ou non, soumis à cette obligation. Celle-ci trouve, en dehors de quelques dispositions particulières, sa source principale dans un texte récent à savoir la loi du 4/08/1994 relative à l'emploi de la langue française.[47]

A plusieurs reprises, lors des débats parlementaires sur le projet de loi de 1994 relatif à l'emploi de la langue française, la question de l'opportunité d'une nouvelle législation s'est posée dans la mesure ou une loi de 1975 relative à l'emploi de la langue française existait déjà.

La loi de 1994 est en effet destinée à se substituer à la loi du 31/12/1975, en raison de l'inefficacité de cette dernière.[48] Il était, en effet, devenu indispensable de l'adapter afin d'en rendre les dispositions plus efficaces, en élargissant notamment son champ d'application et en renforçant les sanctions prescrites en cas d'inobservation des dispositions imposant l'emploi obligatoire de la langue française.

La loi de 1994, en traduisant le principe constitutionnel selon lequel la langue de la République est la langue française a pour objectif de doter la France d'une véritable législation linguistique concernant non seulement l'information du consommateur mais également le monde du travail.

1) L'INFORMATION DU CONSOMMATEUR

Sur ce point, le nouveau texte reprend les dispositions de la loi du 31/12/1975 en prévoyant pour la désignation, la présentation, et la publicité des biens, produits ou services, l'emploi obligatoire de la langue française.

a) L'emploi obligatoire de la langue française dans les opérations relatives à la vente des biens et services

L'emploi de la langue française est donc obligatoire dans les transactions, propositions de transactions et importations concernant tous les biens et services.[49] Il résulte des termes très généraux employés à l'article 2 de la loi de 1994[50] pour définir le champ d'application de cet article que l'usage de la langue française est obligatoire non seulement pour la rédaction intégrale de tous les documents utilisés dans les transactions[51] mais encore pour le libellé des inscriptions portées sur les emballages et sur la marchandise elle-même ainsi que dans la publicité écrite ou parlée.

Ainsi, et c'est en cela qu'elles affectent les relations juridiques de droit privé, les dispositions légales englobent, outre des documents qui se bornent à préparer le contrat, d'autres écrits qui se rattachent nécessairement au contrat, soit qu'ils en expriment les clauses sur lesquelles les parties sont censées avoir arrêté leur volonté commune, soit que leur rédaction ait pour objet d'en faciliter l'exécution. Le législateur a donc voulu assurer la protection du consommateur afin qu'il puisse acheter et utiliser un produit ou bénéficier de services en ayant une parfaite connaissance de leur nature, de leur utilisation et de leurs conditions de garantie.

" La désignation, l'offre, la présentation, la publicité écrite ou parlée "[52] visant un bien ou un service sont souvent faits par des documents qui n'ont pas de valeur contractuelle. C'est le cas d'un vendeur qui prospecte les clients éventuels pour les inciter, par différents arguments, à contracter. Le législateur vise ici, pour les soumettre à l'emploi obligatoire de la langue française, la documentation, les placards publicitaires dans les journaux, dans les rues ou à l'intérieur des magasins.[53] En effet, l'emploi de termes étrangers s'est avéré générateur de tromperie notamment sur l'origine des produits que les tribunaux ont été fréquemment conduits à sanctionner. C'est pourquoi l'obligation d'employer la langue française s'applique à toute publicité écrite, parlée ou audiovisuelle. C'est ainsi que la SEITA a été condamnée pour avoir utilisé, dans des publicités parues dans différents journaux, la reproduction d'un paquet de cigarettes NEWS comportant la mention en langue anglaise " 20 filter cigarettes " non assortie de sa traduction en langue française.[54] De même, la cour de cassation a condamné la Société FRANCE QUICK pour avoir utilisé pour désigner ses produits à savoir ses plats et ses boissons, des mots étrangers tels que Giant, Hamburger, Cheeseburgers, Milkshake[55]

L'obligation d'emploi de la langue française s'impose également dans un certain nombre de rapports contractuels. S'y trouvent ainsi soumis, non seulement les documents qui préparent le contrat mais aussi les documents qui expriment la volonté commune des parties.

S'agissant en premier lieu de l'étiquetage, avant même l'intervention de la loi du 31/12/1975, la jurisprudence ainsi que deux décrets[56] avaient manifesté la volonté de protéger le consommateur en imposant l'emploi obligatoire de la langue française sur les étiquettes décrivant les caractéristiques d'un bien. Les étiquettes sont, en effet, des documents contractuels qui expriment l'offre. Déterminant le consentement de l'acheteur et la conclusion du contrat, elles doivent être rédigées dans une langue comprise par la majorité des acheteurs. Le cas échéant, on pourrait considérer qu'il y a violation de l'obligation d'information du vendeur susceptible d'être sanctionnée sur le plan civil dés lors que l'obligation d'étiquetage constitue un aspect de cette obligation imposant de la part du vendeur de donner une information claire, explicite et compréhensible au consommateur.[57] Il est en même pour les catalogues exprimant l'offre du professionnel. C'est en effet des documents qui sont fournis aux consommateurs, avant la conclusion du contrat, et qui décrivent les services ou les produits proposés. Depuis les lois de 1975 et de 1994, l'étiquetage des biens et services est soumis à l'obligation d'emploi de la langue française.[58]

S'agissant en second lieu des contrats, il est traditionnellement affirmé que ceux-ci dés lors qu'ils sont passés par écrit, peuvent être rédigés dans n'importe quelle langue. En vertu des principes de l'autonomie de la volonté et de la liberté contractuelle, les contrats doivent pouvoir être libellés aussi bien en langue française qu'en langue étrangère ou régionale.

Cette affirmation de caractère générale mérite toutefois d'être affinée. Tout d'abord, il existe une catégorie spécifique de contrats qui se voit soumis à cette obligation d'emploi de la langue française. En application de l'article R.160-1 du code des assurances, les conditions générales ou particulières des contrats, mais aussi les avenants et autres documents se rapportant à leur exécution, souscrits ou exécutés sur le territoire national, doivent être rédigés en langue française.[59] Ensuite, la loi du 4/08/1994 relative à l'emploi de la langue française, impose cette obligation dans un certain nombre de contrats à savoir les contrats de travail et les contrats passés par une personne publique ou une personne privée exécutant une mission de service public.[60] Enfin, ce n'est que de façon implicite qu'une dernière catégorie de contrats, assurément la plus importante quantitativement, se trouve régie par la loi de 1994 à savoir celle ayant pour objet un bien ou un service dés lors que le contrat est passé par écrit. En effet, sur la base d'une analyse pragmatique de l'article 1 de la loi de 1975 et de l'article 2 de la loi de 1994, il a été avancé que tout accord de volontés qui a pour objet un bien et un service comporte nécessairement la désignation et la présentation de ce bien ou de ce service visée par la loi et rentre ainsi dans les prévisions de celle-ci.

En d'autres termes, l'idée de présentation d'un bien ou d'un service recouvrant en réalité toutes les conditions du contrat, c'est l'ensemble du contrat qui doit être rédigé en langue française. Cette obligation pèse sur tous les contrats, même ceux qui sont sous seing privé et non soumis à enregistrement[61] et même s'ils concernent deux personnes de la même nationalité étrangère dés lors que le contrat est conclu et exécuté en France. D'autre part, cette obligation ne devrait pas se limiter aux seuls rapports commerciaux intéressant les consommateurs mais s'étendre aux relations entre professionnels donnant ainsi à la loi un champ d'application plutôt large.

La loi du 4/08/1994 n'arrête pas l'usage de la langue française au moment de la formation du contrat. En effet, les écrits établis pour l'exécution du contrat à savoir les modes d'emploi[62], les factures, les quittances, doivent également être rédigés en langue française. Cependant, le législateur ne décide pas du caractère obligatoire ou facultative de la délivrance de ces documents. Pour les quittances, leur nécessité relève des règles de preuve. En effet, elles sont nécessaire pour prouver le paiement. Pour les factures, leur délivrance est souvent rendue obligatoire par la réglementation économique. Quant aux modes d'emploi, ils ne sont imposés par aucun texte, mais la jurisprudence a mis à la charge du vendeur l'obligation, accessoire à la délivrance, d'informer l'acheteur sur la façon dont la chose doit être utilisée pour permettre l'usage auquel elle est destinée. Il peut s'en acquitter par la délivrance d'un mode d'emploi. Mais, le vendeur n'est tenu de cette obligation que dans la mesure ou les circonstances ne l'autorisent pas à penser que l'acheteur connaît le mode d'utilisation, et il n'a pas à délivrer un mode d'emploi à un acheteur qui par sa profession est censé le connaître.

La loi du 4/08/1994 ne change rien à cette jurisprudence, mais elle aboutit à ce résultat paradoxal que le vendeur qui remet un mode d'emploi rédigé en langue étrangère alors que la compétence technique de l'acheteur le dispense de tout devoir d'information sera puni. En effet, s'il peut ne pas délivrer de mode d'emploi et que malgré cela il en remet un, il doit le rédiger en langue française. C'est l'emploi d'une langue étrangère qui est incriminé en lui-même, non le défaut d'information de l'acheteur.

Les résultats auxquels on aboutit lorsque le vendeur est tenu d'informer l'acheteur ne sont pas moins curieux. Là non plus, la loi ne fait aucune référence à la connaissance ou à l'ignorance de la langue française par les parties. Ainsi, lorsque l'acheteur ne comprend pas le français, le vendeur devra lui remettre deux modes d'emploi : l'un dans la langue étrangère connue de l'acheteur, pour satisfaire à l'obligation jurisprudentielle d'informer, l'autre en français, pour satisfaire à la loi du 4/08/1994. Et lorsque l'acheteur connaît, outre le français, une langue étrangère, le vendeur ne sera pas quitte en remettant un mode d'emploi rédigé dans cette langue, il devra encore en remettre un second, rédigé en français.[63]

Pour être complet sur cette question, il faut évoquer le sort des produits importés.

Sous l'empire de la loi de 1975, il était clair que l'emploi de la langue française était obligatoire dans les importations de biens et de services. C'est ce qui précisait la circulaire du 20/10/82.[64] Par conséquent, toutes les informations nécessaires au consommateur lors d'opérations juridiques portant sur des produits et services doivent être rédigés en langue française. C'est le cas des documents d'accompagnement à savoir les modes d'emploi, les notices, les instructions qui doivent être rédigés en langue française au stade de la commercialisation et non pas au stade du dédouanement.[65]

Depuis l'entrée en vigueur de la loi de 1994, le droit de la langue française est entré dans une phase de turbulence. En effet, jusqu'à présent, la circulaire du 20/10/1982 abrogée en même temps que la loi de 1975 n'a pas été remplacée. Néanmoins, la règle posée par le circulaire en matière de produits importés ne devrait pas être remis en cause car la nouvelle loi relève de la même philosophie que celle de 1975 à savoir la défense de la langue française et des consommateurs. De plus, la loi de 1994 en édictant une obligation générale, aurait permis notamment aux juges de reconduire leur jurisprudence en étendant le champ d'application de la loi relative à l'emploi de la langue française aux importations.

Il nous reste à traiter de la sanction de l'inobservation de l'emploi de la langue française en matière de biens et de services ainsi que les dérogations à cette obligation.

b) limites et sanctions de l'obligation d'emploi de la langue française

La loi a prévu une dérogation à l'obligation d'employer la langue française par le recours à la traduction. Cet assouplissement existait déjà sans le cadre de la loi du 31/12/1975 mais il n'était pas assujetti à certaines conditions.[66]

Dorénavant, en cas de recours à la traduction, " la présentation en français doit être aussi lisible, audible ou intelligible que la présentation en langues étrangères "[67]. Le législateur a, en effet, souhaité que les traductions soient faites dans le respect de la loyauté du consommateur. Les parlementaires ont incontestablement cherché à mettre en échec la pratique antérieure des petits caractères, bien souvent inintelligibles, permettant aux annonceurs d'utiliser des expressions étrangères tout en faisant valoir que celles-ci étaient accompagnés d'une traduction destinée à rendre leurs messages publicitaires conformes aux exigences de la loi du 31/12/1975. Il est évident que ces mentions en petits caractères, difficilement visibles au cours d'une lecture normale de l'annonce publicitaire, constituaient une fraude de la loi du 31/12/1975. Néanmoins, il est à craindre que la création publicitaire se tournera vers le dépôt des expressions à titre de marque.[68]

Quant à l'inobservation de l'obligation d'emploi de la langue française en matière de biens et services, la loi a prévu des sanctions pénales.[69] Elle détermine donc les infractions à la loi et fixe le montant des pénalités. Les peines adoptées sont des contraventions de quatrième classe, soit des amendes d'un montant maximal de 5000 francs pour les personnes privées et de 25000 francs pour les personnes morales. Si ces pénalités sont plus dissuasives que celles du code de consommation qui étaient appliquées dans le cadre de la loi du 31/12/1975, on peut se demander si elles seront suffisantes pour être efficaces.[70] En outre, le juge pourra décider d'appliquer ces amendes autant de fois qu'il y a de produits, de biens ou de documents concernés.

Pour que la langue française reste la langue utilisée dans les entreprises et que le salarié ignorant les langues étrangères ne soit pas pénalisé, l'Etat a rendu obligatoire l'emploi de la langue française dans le monde du travail.

2) L'INFORMATION DES SALARIES

Les salariés quel que soit leur nationalité doivent être informés en langue française. Poser le principe de l'emploi obligatoire de la langue française dans le monde du travail correspond-il au but poursuivi par l'Etat à savoir la protection de l'information des salaries contre une mauvaise compréhension résultant de textes étrangers ?

a) L'emploi obligatoire de la langue française dans le monde du travail

Outre les contrats de travail et les offres d'emploi, sont concernées par l'obligation d'employer la langue française, les informations des salariés sur son lieu de travail.

En ce qui concerne le contrat de travail, celui-ci doit être rédigé en langue française dés lors qu'il est constaté par écrit[71]. Par conséquent, le contrat de travail demeure consensuel quant à sa formation et les parties sont donc libres de faire ou de ne pas faire un écrit, mais si elles en font un, il doit être obligatoirement rédigé en langue française. L'Etat qui s'est voulu soucieux de la protection du salarié, impose donc l'usage de la langue française sans y mettre comme condition que le salarié la comprenne. Ainsi, est soumis à cette obligation le contrat de travail conclu avec un salarié étranger exerçant son activité en France.

Le législateur n'a pas ignoré ce paradoxe et il a cru prévenir les difficultés en disposant " que lorsque le salarié est étranger et le contrat constaté par écrit, une traduction est rédigée, à la demande du salarié, dans la langue de ce dernier; les deux textes font également foi en justice.

En cas de discordance entre les deux textes, seul le texte rédigé dans la langue du salarié peut être invoqué contre ce dernier ".

Mais le remède paraît insuffisant. En effet, l'établissement d'une traduction en langue étrangère est subordonné à une demande du salarié et il est évident qu'une telle demande, qui devra être antérieure ou concomitante à l'accord des parties, sera rarement présentée et encore plus rarement prouvée, notamment lorsque le contrat sera signé par le salarié avant son entrée en France, à un moment où il ne connaît pas encore un mot de notre langue. Autrement dit, dans les hypothèses ou l'emploi du français présente le plus d'inconvénients, le remède prévu par la loi ne jouera pratiquement jamais.

La loi de 1994 vise également les offres d'emplois faites par annonces dans la presse, en ajoutant à l'article L 311-4 du code du travail une disposition interdisant de rédiger ces annonces en langue étrangère.[72] Cette obligation s'étend non seulement aux offres concernant des services à exécuter sur le territoire français mais aussi aux offres concernant des services à exécuter hors du territoire français lorsque l'auteur de l'offre ou l'employeur est de nationalité française.[73] L'annonce qui méconnaîtra cette prohibition sera assimilée à celle comportant " des allégations fausses ou susceptibles d'induire en erreur "[74].

Enfin, l'information du salarié sur son lieu de travail est également soumise à l'obligation d'employer la langue française. En effet, celui-ci a le droit de disposer de documents en langue française comportant des obligations pour le salarié ou des dispositions dont la connaissance est nécessaire à celui-ci pour l'exécution de son travail. Doivent donc être rédigés en langue française, le règlement intérieur, les conventions, accords collectifs de travail, conventions d'entreprise ou d'établissement.

En imposant l'emploi de la langue française dans le monde du travail, l'Etat entend protéger le salarié contre l'employeur puisqu'en étant informé dans sa langue, il pourra défendre ses droits en connaissance de cause et se mettre à l'abri de fautes qui seraient commises dans l'ignorance de ses obligations et des consignes de travail rédigées en langue étrangère. Pour être efficace, ce dispositif est assorti de sanctions.

b) Le tournant répressif de la législation du travail

Alors que sous l'empire de la loi de 1975[75], le législateur n'avait pas assorti de sanctions l'obligation d'employer la langue française dans les contrats de travail, celui de 1994 a choisi de prévoir des sanctions civiles " dissuasives " pour l'employeur. L'employeur qui ne se conformerait pas à ces dispositions " ne pourra se prévaloir à l'encontre du salarié auquel elles feraient grief des clauses d'un contrat de travail conclu en violation de cette obligation d'employer la langue française "[76].

La question qui se pose est de savoir si le salarié pourra demander la nullité du contrat de travail dés lors qu'il serait rédigé intégralement en langue étrangère. Cette solution semble devoir être rejetée pour plusieurs raisons. En premier lieu, elle ne correspond pas à la volonté du législateur qui non seulement ne prévoit pas la nullité du contrat de travail mais également subordonne le prononcé de la sanction à savoir l'inopposabilité des clauses du contrat conclues en violation de l'obligation d'emploi de la langue française à la condition qu'elles soient préjudiciables au salarié. En second lieu, le législateur a imposé l'emploi de la langue française dans le monde du travail pour protéger le salarié contre une mauvaise compréhension résultant de textes rédigés en langue étrangère. Or, admettre au titre de sanction la nullité du contrat de travail, ne correspond pas à la protection des intérêts du salarié à savoir le maintien de son emploi et de sa place dans l'entreprise. Pour les autres documents visés par le législateur, des sanctions pénales à savoir des contraventions de quatrième classe sont prévues.[77]

Enfin, cette solution aurait dû reste fait montre d'une rigueur excessive. En effet, le contrat de travail est et reste un contrat consensuel. Il serait très singulier d'admettre qu'un acte juridique " négotium " dont la validité n'est pas subordonnée à la rédaction d'un " instrumentum ", soit néanmoins nul, au seul motif que les parties qui ont décidé de constater leur accord par écrit, ont employé une langue étrangère. Dans tous les cas, ces documents peuvent être accompagnés de traductions en une ou plusieurs langues étrangères[78].

Le droit de la langue française a donc pour objet de garantir aux français le droit d'utiliser leur langue et de la faire utiliser non seulement dans leurs rapports de nature privée mais également dans leurs rapports juridiques avec l'administration, domaine où ils ont également besoin d'être protégés. D'autre part, l'Etat a aussi pour objectif de défendre la langue française en imposant son emploi à l'administration qui a un devoir d'exemplarité.

II - LA PROTECTION RELATIVE A L'ACTIVITE ADMINISTRATIVE DES LOCUTEURS DE LANGUE FRANçAISE

Les rapports quel qu'en soit la forme entre l'administration et l'usager doivent respecter l'emploi de la langue française non seulement pour protéger les usagers mais également pour protéger l'administration contre certains usagers qui utilisent dans leurs rapports avec cette dernière des dialectes locaux voire même des langues étrangères. En effet, il paraît déraisonnable de demander aux agents de la fonction publique de connaître toutes les langues étrangères ou les langues régionales.

A - LE DEVOIR D'EXEMPLARITE DE L'ADMINISTRATION

L'Etat ne pouvait imposer aux particuliers l'emploi de la langue française sans inviter du même coup les agents des collectivités et établissements publics à montrer l'exemple. En effet, nul corps dans la nation ne joue un rôle aussi important du point de vue de la langue française que le corps des fonctionnaires.[79]

Outre le fait qu'il existe, dans la France d'aujourd'hui, un phénomène de dégradation du langage qui n'a pas épargné l'administration, on assiste également de la part de l'administration a l'emploi de plus en plus fréquemment d'une langue étrangère au dépens de la langue française. Il en résulte une véritable insécurité pour l'administré. En effet, tout comme en matière commerciale ou sociale, l'usager a le droit d'être informé dans sa langue dans ses rapports avec l'administration quel qu'en soit la forme.

C'est pourquoi, le législateur a imposé au service public l'emploi obligatoire de la langue française pour éviter que ce phénomène de dégradation encore marginal dans l'administration ne prenne de l'ampleur. Elle s'est donc vue imposer cette obligation dans ses rapports contractuels et dans son exploitation du domaine public.

1) LES CONTRATS PASSES PAR UNE PERSONNE MORALE

DE DROIT PUBLIC

Ainsi, les contrats passés par les personnes publiques, à l'exception de ceux que les organismes gérant des activités à caractère industriel et commercial exécutent hors de France, doivent être rédigés en langue française.

Une rédaction en langue étrangère pouvant malgré tout s'adjoindre à la rédaction française si le contrat est passé avec une personne publique ou privée étrangère. Cette obligation s'impose donc à toutes les collectivités publiques, nationales ou locales ainsi qu'aux établissements publics, que ce contrat soit de caractère administratif ou privé[80] et quel qu'en soit le mode de conclusion, ce qui lui confère un domaine d'application assez large.

Ce que le législateur a entendu faire en adoptant dés 1975 ces dispositions, c'est d'abord d'inviter l'administration à montrer l'exemple en contribuant à la défense de la langue française et à cesser d'employer de plus en plus fréquemment la langue anglaise notamment dans ses relations internationales.

2) L'EXPLOITATION DU DOMAINE PUBLIC

Toute inscription ou annonce apposée ou faite sur la voie publique, dans un lieu ouvert au public ou dans un moyen de transport en commun et destinée à l'information du public doit être formulée en langue française.

Le champ d'application de cette obligation d'emploi de la langue française semble particulièrement large. En effet, quant aux lieux d'application, semblent concernés non seulement les voies publiques mais également le domaine public maritime et ferroviaire, les aéroports, stations, abris, les véhicules de transport en commun et tout autre moyen de transport ou de déplacement exploité sous un régime de droit public. Quant aux personnes concernées, il s'agit bien évidemment des autorités publiques propriétaires et responsables de ces lieux publics mais également de leurs concessionnaires et de toutes les personnes qui peuvent y apposer des inscriptions. Sont ainsi concernés tous les panneaux ou enseignes ayant un objet d'information ou de publicité et qui sont situés dans l'emprise du domaine public, qu'ils aient ou non donné lieu à autorisation.

L'étendu de cette obligation ne se limite pas aux personnes privées gérant un service public mais s'étend à toute personne privée du moment qu'elle utilise, à quelque titre que ce soit, un bien appartenant à une collectivité publique. C'est le cas d'un restaurant affichant un panonceau sur la voie publique. Le fait de ne pas employer la langue française pour toute inscription ou annonce apposée ou faite sur le domaine public est puni de la peine d'amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe[81]. Les personnes morales notamment de droit public tenues de l'exploitation du domaine public peuvent être déclarées responsables pénalement des infractions ainsi définies. Enfin, si l'inscription rédigée en violation de l'obligation d'emploi de la langue française est apposée par un tiers utilisateur d'un bien appartenant à une personne morale de droit public, celle-ci doit mettre l'utilisateur en demeure de faire cesser l'irrégularité constatée. Si la mise en demeure n'est pas suivie d'effet, l'usage du bien peut, en tenant compte de la gravité du manquement, être retiré au contrevenant" quels que soient les stipulations du contrat ou les termes de l'autorisation qui lui avait été accordée " [82].

Par conséquent, les agents publics ont une responsabilité particulière à l'égard des usagers et de la langue française tant dans leurs activités en France que dans leurs relations avec l'étranger.[83] En d'autres termes, il leur incombe non seulement de veiller, dans l'ensemble de leurs activités en France, à ce que la place du français ne soit pas mise en cause, mais aussi de respecter les règles qui régissent l'emploi de la langue française dans les relations internationales. Il faut noter enfin une tendance au déplacement de l'obligation d'emploi de la langue française de l'administration vers les administrés.

B - LE RESPECT DE L'EMPLOI DE LA LANGUE FRANCAISE DANS LES RAPPORTS AVEC L'ADMINISTRATION

Les rapports quel qu'en soit la forme entre l'administration et l'usager, doivent respecter l'emploi de la langue française.

1) LA LANGUE FRANçAISE, LANGUE DES USAGERS DU SERVICE PUBLIC

Jusqu'à la révision constitutionnelle de 1992, il n'existait aucun texte de portée générale imposant l'emploi de la langue française dans les rapports entre l'administration et les administrés. Par conséquent, ce sont les juges qui sont venus par leurs décisions pallier les insuffisances de la règle de droit.

Ainsi, quelques décisions ont été rendues par les juges qui ont voulu faire de l'emploi de la langue française dans les rapports entre l'administration et l'administré, un principe général du droit devant être observé à peine de nullité ou d'inexistence de l'acte accompli en violation de ce principe. On peut ainsi citer l'arrêt du conseil d'Etat du 27/9/1985 qui reconnaît aux commissions de recours des réfugiés le droit de refuser de prendre en considération les documents en langue anglaise produits par le demandeur dés lors qu'ils n'étaient pas accompagnés d'une traduction, en langue française, certifiée conforme.[84] Il en est de même dans une décision de la Cour Administrative d'Appel de Nantes du 14/1/1990 où le juge a refusé de reconnaître comme valant " réclamation contentieuse " une lettre adressée aux services fiscaux et rédigées en Breton.[85] Enfin, on peut citer également la décision du Conseil d'Etat du 15/04/1992 qui juge que le refus d'acheminer à leurs destinataires des correspondances dont l'adresse était rédigé en langue bretonne ne constitue ni une atteinte à la liberté d'expression ni une discrimination illégale opérée entre usagers du service public postal.

Depuis la révision constitutionnelle de 1992 qui fait du français la langue de la République, les juges se voit conférer un support juridique qui leur faisait, jusqu'ici, défaut en cas de conflit avec une langue régionale ou une langue étrangère notamment dans les rapports entre l'administration et les administrés.

2) L'UNITE LINGUISTIQUE DE LA FRANCE MALMENEE

L'unité linguistique de la France, à priori bien assise, est parfois malmenée, notamment par l'existence des particularismes régionaux. Certes, aujourd'hui, l'unification linguistique ne semble pas pouvoir être remis en cause par l'existence de certaines langues régionales héritées de l'histoire. Cependant, et en dehors des cas où elles sont admises par un texte, elles ne peuvent pas être utilisées dans les rapports avec les services publics[86]. Ce sont d'évidentes raisons d'ordre pratique liées au bon fonctionnement du service public, qui empêche celui-ci de prendre en compte des documents non rédigés en langue française. En effet, on ne saurait exiger des agents du service public qu'ils connaissent toutes les langues.

Au cours de ces développements, nous avons mis l'accent sur l'aspect protecteur des dispositions imposant l'emploi obligatoire de la langue française notamment à l'égard des locuteurs de langue française. Le consommateur, le justiciable, l'employé, l'usager des services publics se voient reconnaître un droit à une langue claire, précise, simple et française. Cependant, l'intervention de l'Etat dans le domaine linguistique ne se limite pas à protéger les utilisateurs de la langue française mais également à la défendre par une action de promotion de la langue française.

SECTION 2 : LA PROMOTION DE LA LANGUE FRANçAISE

L'Etat n'a pas créé un droit voué à la langue française uniquement pour protéger ses utilisateurs afin de leur permettre d'exprimer, dans un certain nombre de circonstances de leur vie courante et professionnelle, un consentement éclairé, mais également pour défendre la place de la langue française par une action de promotion de la diffusion de la langue française visant à favoriser son rayonnement dans le monde. En effet, l'Etat manifeste depuis plusieurs années la volonté de maintenir le français comme langue de communication internationale en menant " une action offensive " de promotion de la langue française refusant ainsi l'idée d'une uniformisation du monde qui se dessine sur le mode anglo-saxon.

Ce qui est donc en cause, c'est l'avenir de la langue française, comme langue de la culture, de la science, de la technologie, de l'économie. Par conséquent, selon que la langue française restera ou non une langue de grande diffusion, apte à rendre de toutes les formes d'évolution de notre époque, selon qu'elle saura par sa vitalité et par sa créativité s'imposer comme lieu de rencontre et véhicule de progrès, le XXIème siècle se déroulera à l'enseigne de l'universel ou sous le signe de l'uniformité.[87]

Promouvoir la langue française, c'est donc préserver nos spécificités quelles soient culturelle, économique, juridique, voire même politique. En effet, la langue est un formidable véhicule d'une culture, d'une histoire, d'une idéologie.

Promouvoir la langue française, c'est aussi proposer à d'autres peuples une alternative à l'uniformisation, à la normalisation par l'anglais. La liberté ne peut être fondée que sur une possibilité de choix entre des modelés culturels différents. Or, l'élément fondamental de la diversité de ces cultures est sans aucun doute la langue. C'est également assumer sa responsabilité à l'égard d'une langue partagée par prés de 50 pays de la communauté francophone en luttant contre les atteintes à l'usage de la langue française et conforter ainsi la position de notre langue au niveau international.

Cette action de l'Etat imposant l'emploi de la langue française se manifeste à deux niveaux à savoir au niveau de la France et au niveau international.

I - UNE ACTION NATIONALE DE PROMOTION DE LA LANGUE FRANçAISE

Promouvoir la diffusion de la langue française, c'est conforter ou renforcer l'usage de la langue française par une action visant à inciter les locuteurs de langue française à ne pas délaisser son usage au profit d'une autre langue et les étrangers à apprendre et à employer notre langue.

Pour parvenir à ces fins, l'Etat français a notamment multiplié les droits dont l'application est conditionnée par la langue française. Il s'est également appuyé au premier chef sur des moyens de communication de masse qui jouent un rôle important dans la diffusion de la langue française et également sur les structures éducatives.

A - LA MULTIPLICATION DES DROITS DONT L'APPLICATION EST CONDITIONNEE PAR LA LANGUE FRANçAISE

En multipliant les droits dont l'application est conditionnée par la langue française, l'Etat entend favoriser l'emploi de la langue française. Déjà objet de droit, la langue française est, en effet, et de plus en plus source de droits.

1) L'ACQUISITION DES DROITS ECONOMIQUES ET SOCIAUX

Subordonner l'acquisition de certains droits économiques à l'usage de la langue française voire à la connaissance de la langue française constitue sans aucun doute une mesure favorisant son emploi notamment par des étrangers, mais conduisant en fait à un certain protectionnisme linguistique national.

a) L'accès à certaines professions

En ce qui concerne l'accès à la fonction publique, la nationalité française n'est plus pour les ressortissants de la communauté européenne depuis la loi du 26/07/1991, par principe, une condition à l'entrée dans la fonction publique. Leurs sont ainsi ouverts, tous les corps, emplois dont les attributions soit sont séparables de l 'exercice de la souveraineté, soit ne comportent aucune participation directe ou indirecte à l'exercice des prérogatives de puissance publique de l'Etat ou des autres collectivités publiques.

Cependant, la connaissance de la langue française reste un impératif pour des personnes désirant exercer ces fonctions. Il en est, a priori de même pour d'autres professions notamment la profession d'avocat ou de médecin. Cette condition pourrait être étendue à toutes les professions notamment à des professions autres que celles réglementées pour des raisons pratiques[88]. Ainsi, les avocats ressortissants de l'un des Etats membres qui viennent, en France, accomplir une activité professionnelle ponctuelle ont toutefois l'obligation de faire usage de leurs titres en utilisant la langue française. Il en est de même pour le ressortissant d'un Etat membre de la communauté européenne qui souhaiterait exercer ou s'établir en France pour exercer sa profession d'avocat. A fortiori, il en serait ainsi pour un étranger désirant obtenir en France les diplômes permettant l'accès à cette profession[89]. On peut également citer la profession de médecin dont l'accès est subordonné à la maîtrise de la langue française.

On conçoit aisément que la pratique médicale soit l'occasion, dans l'intérêt même des malades, d'une exigence particulière de la connaissance de la langue française. Deux dispositions régissent la matière. Déjà, pour l'inscription au tableau de l'ordre, le médecin doit faire preuve d'une connaissance suffisante de la langue française.[90] Non seulement le médecin doit maîtriser la langue française, mais les documents médicaux émanant de lui doivent être rédigés dans cette langue.[91]

b) L'octroi de certaines subventions

Aucune subvention ne peut être accordée par une personne publique pour une activité[92] qui méconnaîtrait le droit de la langue française.

Dans la mesure où une subvention a été accordée, tout manquement à l'obligation d'emploi de la langue française peut, " après que l'intéressé a été mis à même de présenter ses observations ", entraîner la restitution totale ou partielle de la subvention. Cette mesure peut être susceptible de favoriser l'emploi de la langue française par des incitations financières dans des domaines où son utilisation est en recul notamment dans des manifestations ou congrès de dimension internationale organisés en France.

2) L'ACQUISITION DE DROITS POLITIQUES

Subordonner l'acquisition de droits politiques ou civiques à la connaissance de la langue française, ne constitue pas à priori une mesure de promotion de la langue française mais traduit plutôt le souci de l'Etat de conférer ces droits à des personnes susceptibles de les exercer librement et efficacement.

a) L'acquisition de la nationalité française

Le souci de permettre une bonne intégration dans la collectivité nationale a conduit l'Etat à imposer comme condition de naturalisation une certaine connaissance de la langue française.[93] Comprendre et parler la langue française sont requis légitimement du postulant qui doit aussi, par son état d'esprit et son attitude à l'égard des institutions françaises, attester de son intégration dans la collectivité française. Ainsi, il arrive que des juges refusent la naturalisation à des personnes, faute d'une connaissance suffisante de la langue française.[94] Toutefois, lorsque la naturalisation est acceptée, le bénéficiaire peut également profiter d'une procédure de francisation de ses noms et ses prénoms.[95]

b) La perspective de l'acquisition de certains droits civiques

Même si le débat sur la reconnaissance notamment du droit de vote aux ressortissants de la communauté européenne pour certaines élections locales est pour l'instant clos, la question ne manquera pas de se poser à l'avenir dans la perspective d'une intégration renforcée des Etats membres au sein de l'Union Européenne. La connaissance de la langue française pourrait être l'une des conditions posées pour l'exercice de ces droits.

En subordonnant l'acquisition de ces droits à la maîtrise de la langue française, l'Etat semble à priori manifester la volonté de pénaliser ceux qui emploient une langue étrangère. Cette attitude de l'Etat ne traduit pas forcément la volonté de se replier sur soi-même ou de puissance face à l'expansion de la langue anglaise mais peut-être celle d'inciter les locuteurs à choisir la langue française en assurant sa promotion et ainsi renforcer sa position en France mais également à l'étranger.

L'action de promotion de la diffusion de la langue française, porte également sur les moyens de communication de masse qui sont devenus les moyens privilégiés de diffusion de la langue française et sur les structures éducatives.

B - LE ROLE IMPORTANT DES MOYENS DE COMMUNICATION ET DES STRUCTURES EDUCATIVES DANS LA PROMOTION DE LA LANGUE FRANçAISE

L'Etat ne s'est donc pas contenter de multiplier les droits dont l'application est conditionnée par la langue française dans sa politique active en faveur de la langue française mais s'est également appuyé sur des institutions jouant un rôle important dans la diffusion de la langue française.

1) LA LANGUE FRANçAISE, LANGUE DE L'ENSEIGNEMENT

Il va de soi que la langue française doit être utilisée dans tous les établissements publics et privés d'enseignement sur le territoire français. Cependant, la promotion de langue française s'accompagne d'une ouverture aux langues et cultures étrangères notamment européennes.

a) L'enseignement de la langue française

" La langue de l'enseignement, des examens et concours, ainsi que des thèses et mémoires dans les établissements publics et privés d'enseignement est le français, sauf exceptions justifiées par les nécessités de l'enseignement des langues et cultures régionales ou étrangères ou lorsque les enseignants sont des professeurs associés ou invités étrangers " [96].

C'est l'une des innovations de la loi de 1994 qui affirme le caractère obligatoire de l'enseignement en langue française. Cette disposition n'a pas été adoptée pour défendre la langue française dont la primauté serait menacée par la langue anglaise au sein des établissements primaires et secondaires. Elle a été prise à la suite d'une enquête menée au niveau universitaire constatant des cas d'abandon de l'emploi de la langue française, au profit exclusif de la langue anglaise. Ainsi, certaines soutenances de mémoire ou de thèse ont été faites exclusivement en langue anglaise. Certains travaux universitaires sont mêmes publiés uniquement en langue anglaise.

Par cette disposition, l'Etat exprime donc son intention de préserver l'enseignement de la concurrence de l'anglais, et de renforcer le rôle des structures éducatives dans la diffusion de la langue française et de la pensée scientifique, juridique, ou politique.[97] Il est, en effet, de la responsabilité des institutions universitaires et de recherche de donner une formation en langue française, aux étudiants et chercheurs français et étrangers, et d'informer dans cette langue le public et les techniciens de notre pays.

Il en va de même pour l'organisation de manifestations, colloques et congrès. En effet, la France est l'un des pays organisant le plus grand nombre de manifestations internationales culturelles, scientifiques ou techniques mais de plus en plus souvent celles-ci se déroulent uniquement en anglais alors même que certains de leurs participants et intervenants sont francophones.

" Tout participant à une manifestation, un colloque ou un congrès en France par des personnes physiques ou morales de nationalité française a le droit de s'exprimer en français.

Les documents distribués aux participants avant et pendant la réunion pour en présenter le programme doivent être rédigés en français et peuvent comporter des traductions en une ou plusieurs langues étrangères.

Lorsqu'une manifestation, un colloque ou un congrès donne lieu à la distribution aux participants de documents préparatoires ou de documents de travail, ou à la publication d'actes ou de comptes rendus de travaux, les textes ou interventions présentés en langue étrangères doivent être accompagnés au moins d'un résumé en français " [98].

Ces dispositions ne sont pas applicables aux manifestations, colloques ou congrès qui ne concernent que des étrangers, ni aux manifestations de promotion du commerce extérieur de la France.

Les mesures adoptées par l'Etat pour favoriser la présence de la langue française dans la vie scientifique, culturelle, économique sont le résultat d'un compromis entre ceux qui craignaient que des règles trop strictes n'entraînent la diminution du nombre de congrès tenus en France et ceux qui estimaient abusive l'interdiction de l'emploi du français dans une réunion se déroulant en France.

La volonté de l'Etat est claire. Au niveau national, la vie scientifique doit continuer à avoir lieu en langue française. La langue française doit être la langue de la diffusion des connaissances, du travail, de la promotion des chercheurs. En d'autres termes, pour que la France demeure une grande puissance scientifique, technologique, il est indispensable qu'elle continue à exprimer sa pensée en langue française. Certes, il ne s'agit pas de refuser l'anglais quand il est nécessaire pour assurer le rayonnement de la science française. C'est une question d'équilibre.[99] En effet, on ne peut occulter la réalité à savoir que la langue anglaise domine dans le monde scientifique.[100]

Promouvoir la diffusion de la langue française dans l'enseignement en garantissant son emploi dans un certain nombre de circonstances, n'exclut pas la promotion de l'idée de plurilinguisme.

b) L'enseignement des langues étrangères

Favoriser l'apprentissage des langues étrangères peut aussi conduire à une meilleure diffusion de la langue française. On ne peut imaginer les autres pays faisant un effort en faveur de la langue française sans effort comparable de la part de la France. Cette ouverture aux autres langues et cultures traduit le souhait de construire un monde pluraliste, en particulier dans le cadre européen, respectueux des particularismes nationaux. Par conséquent, la maîtrise de la langue française et la connaissance de deux autres langues font partie des objectifs fondamentaux de l'enseignement.[101]

En effet, au sein de l'union européenne, la France s'attache à promouvoir auprès de ses partenaires la notion de plurilinguisme, notamment en préconisant l'apprentissage obligatoire de deux langues étrangères par chaque jeune européen.[102] L'accueil d'étudiants étrangers, outre qu'il est dans la mission traditionnelle de la France, a évidemment une incidence favorable sur la diffusion du français dans les autres pays.

Le rôle des médias est également essentiel pour la promotion de la langue française puisqu'ils concurrencent de plus en plus souvent les structures éducatives, notamment auprès des jeunes et des personnes les plus défavorisées.

2) LA LANGUE FRANçAISE ET LES MEDIAS AUDIOVISUELS

La place occupée par les médias audiovisuels dans l'information du public et dans la formation des jeunes, leurs confèrent un rôle essentiel dans la promotion de la langue française. C'est pourquoi, l'Etat a entendu réglementer les moyens de communication de masse. C'est au Conseil Supérieur de l'Audiovisuel qu'il incombe en vertu de l'article premier de la loi du 30/09/1986[103] modifiée[104], de veiller à la défense et à la promotion de la langue française dans la communication audiovisuelle.

Il nous appartient pas à ce stade de notre étude, de traiter de la question de la qualité de la langue française et du rôle du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel dans la lutte contre la dégradation de l'intégrité de la langue française. On peut cependant noter l'attitude des professionnels des médias qui favorise la pénétration des termes anglo-saxons. En effet, le CSA s'attache à remplir sa mission de promotion de la langue française en veillant au respect des obligations légales imposant l'emploi de la langue française.

" L'emploi du français est obligatoire dans l'ensemble des émissions et des messages publicitaires des organismes et services de radiodiffusion sonore ou télévisuelle, que soit leur mode de diffusion ou de distribution, à l'exception des ouvres cinématographiques et audiovisuelles en version originale " [105].

A côté de cette mission de contrôle et de surveillance confié par l'Etat au CSA, celui-ci entend promouvoir la langue française à travers le soutien à la production " d'oeuvres d'expression originale française ". Soutenir la production de films et d'oeuvres audiovisuelles, c'est aussi favoriser l'emploi de la langue française dans le secteur audiovisuel dominé par l'industrie américaine. Or, c'est sans doute aujourd'hui le domaine des médias qui est le plus sensible. Il détermine d'une part en partie la culture des français de " demain " et d'autre part se trouve largement dominé par la culture américaine.[106] Par conséquent, la loi du 30/09/1986 permet au gouvernement d'imposer la diffusion d'un minimum d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles notamment à certaines chaînes de télévision.

En ce qui concerne les chaînes de radio, celles-ci se sont vues imposer un quota de chansons d'expression française [107].

D'autre part, l'Etat subordonne son soutien financier à la production cinématographique à l'exigence du tournage de l'oeuvre en langue française. Les textes cherchant à favoriser l'emploi de la langue française dans le secteur audiovisuel ne peuvent faire abstraction des réalités économiques. Le problème est alors celui du respect des règles posées en ce domaine, certains prétendant qu'elles sont irréalistes et ne peuvent être respectées. Pourtant, c'est au prix de ces efforts que la langue française pourra s'affirmer comme une langue d'avenir au sein des moyens audiovisuels. En effet, au delà de la défense de nos produits culturels, c'est la langue française que l'on défend pour qu'elle préserve son rang parmi les grandes langues de communication internationale.

II - UNE ACTION INTERNATIONALE DE PROMOTION DE LA LANGUE FRANCAISE

Outre une action menée en France en vue de défendre et promouvoir l'emploi de la langue française, l'Etat mène depuis une dizaine d'années une action internationale afin de renforcer la situation de la langue française sur le plan international, en veillant à son emploi dans les institutions internationales et en oeuvrant au développement d'une entente francophone.

A - LA FRANCOPHONIE, INSTRUMENT DE RAYONNEMENT DE LA LANGUE FRANCAISE DANS LE MONDE

Quarante-sept pays répartis sur tous les continents, composent la communauté francophone.[108] La francophonie n'est cependant pas une énumération de pays dans lesquels la langue française est plus au moins comprise, parlée ou utilisée. Elle est aussi, et surtout un ensemble de liens et de relations qui sont à la fois d'ordre historique, culturel, linguistique, économique et parfois militaire.[109] Cette communauté qui a réussi à se doter d'institutions politiques est devenue un instrument de rayonnement de la langue française et de la culture qu'elle véhicule.[110]

1) LES STRUCTURES DE LA FRANCOPHONIE

Les pays francophones ont créé un certain nombre d'institutions, tantôt publiques, tantôt privées, qui ont pour but d'agir auprès des organismes internationaux et des Etats pour défendre l'usage de la langue française.

Parmi ces organismes, on peut citer d'abord l'Agence de coopération culturelle et technique. Cette agence a été créée en 1970 au Niger et à son siège à Paris, les deux principaux Etats à financer l'organisation étant la France et le Canada. L'objectif de l'Agence est d'utiliser le français comme instrument d'une solidarité entre les pays membres ou associés pour le développement économique, l'éducation, la formation et la coopération scientifique. Les délégations des pays d'expression française de l'ONU ont également créé un groupe au sein de l'organisation dans le but de faire respecter les droits de la langue française. Ce groupe a fort à faire en raison de la tendance, déjà signalée, du recul du français à l'ONU. Il existe aussi un tel groupe au sein des organisations spécialisées des Nations-Unies, notamment à l'UNESCO.

D'autres organisations ont un caractère privé mais n'en déploient pas moins, parfois, une grande activité. Ainsi, le Centre International de Langue Française s'efforce d'assurer l'unité de la langue française, d'améliorer la compréhension entre les peuples utilisant la langue française et d'établir un dialogue avec les autres grandes langues mondiales. Dans le domaine des communications, il existe une Communauté des Télévisions Francophones ainsi qu'une Communauté Radiophonique des programmes de langue française. L'intérêt de ces communautés réside d'abord dans l'échange de programmes qui permet une meilleure connaissance des autres pays francophones. Il peut consister ensuite dans la possibilité de réaliser en commun certaines émissions ou certains feuilletons pour en diminuer le coût et résister à l'envahissement des programmes américains, proposés à des prix imbattables par les grandes sociétés américaines.

2) L'ACTION DE LA COMMUNAUTE FRANCOPHONE EN FAVEUR DE LA PROMOTION DE LA LANGUE FRANCAISE

L'usage commun de la langue française est un moyen offert aux peuples qui composent la communauté francophone, de refuser l'uniformisation de la planète qui se dessine sur le mode anglo-saxon, sous couvert de libéralisme économique.

" Il ne saurait y avoir de véritable liberté sans respect des identités culturelles et linguistiques [111].

L'espace francophone peut-être un moyen efficace de renforcer l'usage de la langue française et un facteur de rayonnement de la culture française notamment, par le développement des relations culturelles, mais aussi économiques, et linguistiques.[112] La politique de promotion de la langue française menée à l'échelon international par l'Etat français consiste donc, dans un premier temps, à renforcer la présence du français dans l'espace francophone en limitant autant que faire ce peut l'expansion de la langue anglaise pour ensuite partir à la reconquête de l'influence de la langue française dans le monde.

Cette phase d'expansion de la langue française paraît pour l'instant irréaliste au regard du recul de l'emploi de la langue française dans le monde et également au sein de l'espace francophone, au profit de la langue anglaise qui s'impose comme la langue internationale. En effet, la présence de la langue française n'est pas immuable au sein de la communauté francophone. Ainsi, on peut déjà noter dans certains pays de la communauté francophone un recul de l'emploi et de l'enseignement de la langue française. A titre d'exemples, on peut citer le Maroc qui a inauguré en 1994 la première université anglophone du Maghreb inspirée du modèle anglo-saxon. Il en est de même en Algérie mais pour des raisons politiques. Sous la menace du Front Islamiste du Salut et de sa branche armée le GIA, l'enseignement se fait dorénavant en langue arabe sauf à quelques exceptions prés. En Asie du Sud-Est[113], la langue française longtemps prépondérante est aujourd'hui en recul. Certes, des pays comme le Vietnam compte encore prés de 500000 francophones. Mais, ce sont surtout des personnes appartenant à la génération des plus de soixante ans. Dans l'enseignement dispensé aujourd'hui au Vietnam, la langue française comme langue étrangère se situe à la troisième place, après le russe et l'anglais. Néanmoins, on peut noter dans ce pays un regain d'intérêt pour la langue française même si l'expansion de la langue anglaise paraît inexorable. En effet, les autorités vietnamiennes ayant accepté de généraliser l'enseignement de la langue française sur l'ensemble du territoire, l'AUPELF[114] a signé une convention avec le Ministère de l'Education afin de créer 500 classes de français d'ici 1997, aux côtés de trois nouveaux lycées franco-vietnamiens. Que ce soit au Vietnam, au Laos, ou dans d'autres pays de l'espace francophone, des voix s'élèvent pour proclamer que : "c'est l'anglais qui donnera aux jeunes la clé des emplois".

Face à ce phénomène, l'espace francophone et plus particulièrement la France doit fournir les moyens financiers et matériels notamment en relançant la formation des enseignants, les échanges culturelles, linguistiques[115] et économiques à certains pays de la communauté francophone tentées par l'anglophonie.

" Généreux dans son inspiration, inédit dans sa conception mais, à ce jour, vague dans la formulation, le projet francophone n'a pas encore su se traduire dans un ensemble puissant, à la mesure des besoins de nos pays et des périls de l'époque.

Depuis trois décennies environ, la francophonie a pris l'aspect d'un vaste chantier où l'activité fébrile, foisonnante et désordonnée a produit des résultats assurément non négligeables mais sans commune mesure avec le dessein initial et l'effort consenti.

Bien loin de correspondre à une vision conservatrice, d'exprimer un repli frileux sur soi, une sorte de défense crispée et presque hargneuse d'une langue et d'une culture menacées ", la francophonie représente le pari de la diversité culturelle et linguistique menacées par l'anglophonie qui s'annonce comme le seul modèle socioculturel .

La réussite de ce pari est liée à l'avenir de la langue française.[116] En effet, selon qu'elle restera ou non une langue de grande diffusion, apte à rendre compte de toutes les formes de progrès, " le XXIème siècle se déroulera à l'enseigne de l'universel ou sous le signe de l'uniformité "[117].

B - LES INSTITUTIONS INTERNATIONALES, INSTRUMENT DE RAYONNEMENT DE LA LANGUE FRANCAISE DANS LE MONDE

Longtemps restée l'unique langue diplomatique, la langue française jouit dans la plupart des organisations internationales, à l'exclusion de celles qui sont issues des accords de Bretton woods[118], d'un statut privilégié, étant reconnue comme langue officielle et comme langue de travail. C'est le cas au sein des Nations Unis, de la communauté européenne, de la cour internationale de justice de la Haye, du conseil de l'Europe et de l'OCDE.

Toutefois, la situation de fait, constatée dans beaucoup d'institutions internationales est moins favorable. En effet, au sein de ces institutions internationales, le rôle de la langue française est allé en se réduisant face à l'expansion de la langue anglaise. C'est ainsi qu'aux Nations-Unies, 20% seulement des documents originaux sont rédigés en français, à l'OCDE 25% et au F.M.I. et à la Banque Mondiale 0%. Dans les institutions communautaires, la répartition est plus favorable au français: 66% des documents du conseil, 46% des documents de la Commission. Par ailleurs, la puissance économique et politique des Etats-Unis se traduit notamment par l'emploi quasi-exclusif de la langue anglaise dans les institutions financières.

Face à cette évolution préoccupante et pour répondre à l'attente des pays de la communauté francophone, une politique globale comportant trois séries de mesures a été mise en oeuvre depuis 1993. La première consiste à faire appliquer le statut juridique du français en surveillant attentivement l'évolution de l'usage de notre langue dans les institutions internationales et en intervenant pour dénoncer les dérives constatées dans la pratique quotidienne des institutions. La seconde consiste à sensibiliser les fonctionnaires français en poste dans les organisations internationales ou participant à des réunions internationales, à la nécessité de veiller à l'usage du français. La dernière consiste à développer les formations au français et à améliorer la qualité des traductions et interprétations en français.[119] Ainsi, un programme de cours et de stages de formation à la langue française a été décidé à l'intention des fonctionnaires des pays membres de l'Union européenne dont l'importance pour l'avenir de la francophonie n'est plus à souligner. Ces mesures ont pour objectif de maintenir, notamment dans les institutions européennes, le français comme langue internationale. En effet, le statut international de notre langue est un capital précieux non seulement pour la France mais aussi pour tous les pays qui ont choisi le français.

L'intervention de l'Etat ne s'est pas limitée à imposer l'emploi de la langue française dans un certain nombre de circonstances de la vie courante, professionnelle et politique et à convaincre les locuteurs de l'utiliser. Il est également intervenu pour tenter d'endiguer le processus de dégradation de l'intégrité de la langue française qui résulte de la pénétration abusive de termes étrangers impliquant ainsi la réglementation de son contenu.


[14] Cet objectif est utopique et condamnable notamment parce qu'une politique de purification linguistique est inspirée par une idéologie nationaliste et xénophobe.

[15] A titre d'exemples, on peut citer, la recherche, les colloques, les recrutements, les contrats, la publicité.

[16] J.TOUBON, Propos recueillis lors de la discussion du projet de loi relatif à l'emploi de la langue française devant le Sénat, J.O.R.F SENAT du 12/04/1994 page 948.

[17] Article 111 de l'ordonnance de Villers-Cotterêts, SUPRA ndeg.64:

La valeur au regard du droit positif de ce texte ancien, non abrogé ni tombé en désuétude ne semble faire aucun doute tant pour la doctrine que pour la jurisprudence comme en témoigne l'arrêt de la cour de cassation du 11/1/1989, RTDC 1989 page 619, observations PERROT.

[18] La Cour de cassation, dans une décision du 1/03/1830, a admis que la sentence arbitrale étant un acte privé et non public, n'était pas nulle pour avoir été rédigé en langue étrangére.

Cependant, en ce qui concerne l'exécution de la sentence en France, il convient de l'assortir d'une traduction pour permettre au juge français d'exercer son contrôle en vue de l'exequatur:(article 1499 du Nouveau Code de Procédure Civile).

[19] Cour de Cassation, 11/01/1989, PETITES AFFICHES 22/05/1991, ndeg.61, commentaire de Corinne VANDENBUSCHE.

[20] notamment la COB, le Conseil de Concurrence, la CNIL....

[21] L'esprit du nouveau droit de la concurrence, JCP 1987 ndeg.3277, note de F.C JEANTET.

[22] Avocat, Avoué, Greffier, Huissier....

[23] Procédure: Ensemble des formalités que le plaideur doit observer pour faire valoir son droit en justice devant quelque ordre de juridiction que ce soit.

[24] Les actes de procédure ou des piéces produites devant les tribunaux doivent donc être rédigés en langue française ou être accompagnés d'une traduction authentique.

[25] Cour de Cassation, 4/08/1859, Giorgio c/ Masaspino, SIREY 1859 page 453.

[26] TGI.PARIS, 23/03/1983, Gazette du Palais 1983 page 345.

[27] L'article 584 du Code de Procédure Pénale ne prévoit pas l'emploi de la langue française ni n'exige une traduction.

[28] Cour de Cassation, ch.crim., 4/03/1986, Gazette du Palais 1986 II page 598.

Selon P.Louise, cette jurisprudence d'une part porte atteinte au droit fondamental qu'aurait tout étranger ne s'exprimant pas en langue française d'adresser un mémoire personnel en matière pénale à la cour de cassation, d'autre part posera tôt ou tard un problème de compatibilité avec la jurisprudence communautaire.

[29] Cour de Cassation, ch.civ., 17/02/1981, BULL.CIVIL ndeg.176.

[30] Conseil d'Etat, 27/02/1987, Callero Madrigal, LEXILASER.

[31] Cour de Cassation, ch. civ., 17/02/1981, SUPRA ndeg.91.

[32] Cette révision constitutionnelle est un élément supplémentaire marquant la volonté des autorités publiques françaises et des parlementaires de se préserver, et de se protéger des influences de l'anglo-américain.

[33] Cour de Cassation, 16/02/1833, Stroboni, SIREY 1833 I page 318.

[34] Cour de Cassation, ch.crim., 15/01/1875, Renucci.

" Est nul un procés verbal destiné à constater une contravention de police, lorsqu'il a été rédigé en langue italienne ".

[35] Articles 407 et 408 du Code De Procédure Pénale.

[36] Cour de Cassation, 13/02/1974, BULL.CRIM.ndeg.65.

[37] Cour de Cassation, 15/12/1993, LEXILASER .

[38] Cour de Cassation, ch.crim., 24/01/1895, BULL.CRIM. ndeg.32.

[39] Cour de Cassation, ch.crim., 29/02/1844, BULL.CRIM. ndeg.69.

[40] Loi ndeg.93-2 du 4/1/1993, J.O.R.F du 5/1/1993 page 215, DALLOZ 1993 page 134.

LOI ndeg.93-1013 du 24/08/1993, J.O.R.F du 25/08/1993 page 11991, DALLOZ 1993 page 467.

[41] GHESTIN, Le contrat, L.G.D.J ndeg.728.

[42] Conseil d'Etat, 22/11/1985, DALLOZ 1986 page 71, note J.J THOUROUDE.

[43] Cour de Cassation, ch.crim., 12/04/1988, référence précitée.

[44] Actes publics: Actes passés ou accomplis par un officier ou un agent public.

[45] Décision Constitutionnelle ndeg.94-345 du 29/7/1954, J.O.R.F 2/08/1994 page 11241.

[46] En revanche, le législateur ne peut imposer l'emploi obligatoire d'une terminologie officielle aux personnes privées sous peine de sanctions.

[47] SUPRA 6, annexe ndeg.11.

[48] " La loi de 1975 n'a pas tenu devant les réalités économiques et sociales de ce monde ":J.BRUNHES, J.O.R.F AN 4/5/1994 PAGE 1370.

[49] Le terme " bien " désigne les biens mobiliers et immobiliers vendus ou proposés sur le territoire national;quant au terme " service ", il faut entendre le services fournis ou proposés sur le territoire national.

[50] Article 2 de la LOI du 1994: " Dans la désignation, l'offre, la présentation, le mode d'emploi ou d'utilisation, la description de l'étendue et des conditions de garantie d'un bien, d'un produit ou d'un service, ainsi que dans les factures et quittances, l'emploi de la langue française est obligatoire. "

[51] C'est à dire, les contrats, étiquetages, catalogues, prospectus, bons de commande, de livraison, de garantie, modes d'emploi....

[52] SUPRA ndeg.49.

[53] L'obligation d'emploi de la langue française est étendue dans la loi de 1994 aux inscriptions et annonces apposées ou faites sur la voie publique, dans un lieu ouvert public (cafés, restaurants, commerces, salles de spectacles) ou dans un moyen de transport en commun alors que la loi du 31/12/1975 limitait celle-ci aux biens appartenant à des personnes morales de droit public.

[54] Cour de Cassation, ch.crim., 12/03/1984, Gazette du Palais 1984 II page 492.

Outre le fait que la SEITA commet une infraction pour violation de la loi de 1994, elle commet également une autre infraction prévue par l'article 4 de la loi du 27/12/1973 réprimant la publicité mensongére c'est à dire la publicité de nature à induire en erreur le consommateur.

[55] Cour de Cassation, ch.crim., 20/10/1986, Gazette du Palais 1987 I page 184, " La loi de 1994 n'est pas réductible à la protection du consommateur car son objet est, de façon générale, la sauvegarde de la langue française ".

[56] Décret ndeg.68-1089 du 29/11/1968 relatif au commerce des pierres précieuses et des perles.

Décret ndeg.72-937 du 12/10/1972 relatif à l'étiquetage des denrées alimentaires abrogé par le décret du 7/12/1984.

[57] Cette possibilité de sanctionner sur le plan civil l'emploi d'une langue étrangére en dehors de toute loi et uniquement sur le fondement de la théorie générale des contrats sera évoquée dans la deuxiéme partie.

[58] Article 2 de la Loi de 1994, SUPRA ndeg.6.

Tribunal de Police du 15/09/1987, AGULF c/ Lemonnier, INC-HEBDO 1988 ndeg.591 page 10; A été condamnée pour infraction à la loi de 1975, une société mettant en vente des produits textiles dont le mode d'entretien figurant sur une étiquette était rédigé en langue étrangére.

[59] Le décret du 30/12/1938 ne prévoit pas de sanctions en cas de violation de cette obligation.

[60] Articles 5 et 8 de la Loi du 4/08/1994, SUPRA ndeg.6.

[61] L'obligation de soumettre à l'enregistrement des textes rédigés en langue française ou, s'ils sont dans une langue étrangère, d'y adjoindre une traduction en langue française certifiée, trouve son fondement dans l'article 3 de l'arrêté du 24 prairial an II, toujours en vigueur.

[62] Mode d'emploi: Document informant le consommateur sur la façon d'utiliser un produit ou un service.

[63] Tribunal de Police de Paris, 3/12/1985, DALLOZ 1985 flash ndeg.19: A été condamnée pour infraction à la loi de 1975 une société mettant en service des jeux électroniques sur lesquels toutes les inscriptions étaient en langue étrangére.

[64] Circulaire du 20/10/1982, J.O.R.F du 21/10/1982.

[65] Cour d'Appel de Paris, 8/11/1984, JCP 1985 actualités ndeg.6: " La loi n'était applicable qu'au stade de la commercialisation, car c'est au moment de l'achat que le législateur a voulu protéger le consommateur ".

[66] Mais, si le principe de l'exigence d'une traduction demeure, les modalités de cette traduction sont nouvelles.

En premier lieu, à la suite de la décision rendue par le conseil constitutionnel le 29 juillet 1994, la loi ne fait plus référence à l'obligation d'utiliser les expression ou les termes français approuvés dans les conditions prévues par les dispositions réglementaires relatives à l'enrichissement de la langue française.

Dans ces conditions, si une traduction est utilisée, elle n'emploiera pas nécessairement des termes ou expressions officiels, mais des termes usuels.

[67] Article 4 de la Loi de 1994.

[68] L'utilisation d'une marque en langue étrangère est licite par opposition aux mentions et messages enregistrés avec la marque: Article 2 de la Loi de 1994.

[69] Décret du 3/3/1995 pris pour l'application de la loi du 4/08/1994, J.O.R.F 5/3/1995 Page 3515, annexe ndeg.8.

[70] Cette question sera traitée dans la deuxième partie.

[71] Article 8 de la Loi de 1994.

[72] Il semble que les offres d'emploi expressément faites à l'intention de ressortissants étrangers peuvent être rédigées en langue étrangére.

[73] Article 10 de la Loi de 1994: la loi de 1975 imposer l'emploi de la langue française uniquement pour les offres concernant un emploi devant être exécuté en France.

[74] R 361-1 du code de travail: Infraction punie d'une peine d'amende de 300 à 600 francs et en cas de récidive de 600 à 1200 francs.

[75] Cour de Cassation, 19/03/1986, DALLOZ 1987 page 359 note LEGIER: En l'absence de sanctions légales, le juge a cru bon de combler cette lacune.

En effet, en cas de violation de l'obligation d'employer la langue française dans le contrat de travail, la cour de cassation a jugé que si celle-ci ne permettait pas de prononcer la nullité du contrat, en revanche elle permettait au salarié d'exiger de l'employeur la délivrance d'un contrat conforme aux exigences prévues par la loi.

[76] Articles 9 et 10 de la Loi de 1994.

[77] Décret ndeg.95-240 du 3/3/1995, SUPRA ndeg.68.

Les offres d'emploi ont un régime de sanctions propres : R361-1 Code du Travail, SUPRA ndeg.73.

[78] La loi ndeg.83-553 du 30/4/1983, relative à la mise en harmonie des obligations comptables des commerçants et de certains sociétés avec la quatriéme directive adoptée par le conseil des communautés européennes le 25/07/1978, a rédigé comme suit le premier alinéa de l'article 16 du code du commerce: " Les documents comptables sont établis en francs et en langue française "

[79] ....excepté le rôle des enseignants.

[80] Appels d'offres, adjudications, marchés de gré à gré....

[81] SUPRA ndeg.76.

[82] Article 3 de la Loi de 1994.

[83] Responsabilités rappelées dans une circulaire du Premier Ministre Edouard Balladur du 12/4/1994: " Si tous les citoyens ont reçu en legs notre langue, les agents publics ont, plus que les autres, des obligations particulières pour assurer le maintien de la langue française comme langue de communication internationale.

Aucune considération d'utilité, de commodité ou de côut ne saurait empêcher ou restreindre l'usage de la langue française".

[84] Conseil d'Etat, 27/9/1985, Avakian, LEBON 1985 page 259.

Conseil d'Etat, 6/09/1993, Costano, LEXILASER.

Article 18 du Décret du 2/5/1953: " Le recours formé contre la décision du directeur de l'office doit être établi en langue française ".

[85] Cour Administrative d'Appel de Nantes, 14/11/1990, Le Duigou, LEBON page 4800.

[86] INFRA Loi DEIXONE de 1951.

[87] J.TOUBON, LE MONDE 15/10/1993.

[88] La question de la compatibilité de certaines dispositions du droit de la langue française subordonnant l'accés à certains emplois à la connaissance de la langue française avec les principes du droit communautaire sera traitée dans le chapitre premier de la seconde partie.

[89] Article 201 alinéa 2 du Décret du 27/11/1991 organisant la profession d'avocat.

[90] Article L.412 du CODE de la SANTE PUBLIQUE.

[91] Article 47 du CODE de DEONTOLOGIE MEDICALE.

[92] Activités: Les colloques, congrés, manifestations, aides à la production cinématographique, artistique....

Décret ndeg.92-279 du 27/03/1992, J.O.R.F 28/03/1992 page 4311, DALLOZ 1992 page 243: " Les aides à la production cinématographique sont liées à l'exigence du tournage de l'oeuvre en langue française ".

[93] Article 69 du CODE de NATIONALITE: "Nul ne peut être naturalisé s'il ne justifie de son assimilation à la communauté française, notamment par une connaissance suffisante, selon sa condition, de la langue française ".

[94] Conseil d'Etat, 5/02/1986, Dame KHOUALDIA, LEBON page 529.

Conseil d'Etat, 18/03/1992, Dame SOUKSAMAY, LEXILASER.

[95] Article 11 Loi de la Loi du 8/01/1993 modifiant la Loi du 25/10/1972.

La loi du 8/01/1993 unifie et simplifie le régime de francisation des noms et prénoms, JCP 1993 I ndeg.3659.

[96] Article 11 de Loi du 4/08/1994.

[97] LA langue française doit être la langue de la diffusion des connaissances, du travail, de la promotion des chercheurs.

[98] Article 6 de la Loi du 4/08/1994.

[99] J.TOUBON, Propos recueillis dans la revue UNIVERSITE 1994.

[100] A la suite de travaux effectués à la demande de J.TOUBON, ministre de la culture sous le gouvernement d'Edouard BALLADUR, une action a été entreprise pour favoriser la diffusion de la pensée scientifique en langue française, notamment pour soutenir les revues francophones et pour que la place de la langue française soit bien prise en compte dans le développement de l'informatique et des industries de l'information.

[101] Article 1 de la Loi du 10/07/1989 d'orientation sur l'éducation.

[102] Ce fut le cas en 1995, au cours de la présidence française du conseil des ministres de l'union européénne.

[103] La Loi 30/09/1986, ndeg.86-1067, J.O.R.F ED.Lois et Décrets 1/10/1986.

[104] Modification apportée par la loi du 4/8/1994.

[105] Article 12 de la Loi du 4/08/1994.

[106] La lutte des années 1990 s'est engagée sur le plan des matériels, pour la définition des nouveaux standarts en vue de l'établissemnt de ce que l'on appelle, dans le jargon, " la télévision définitive ".

Se trouvent face à face d'un côté Japonais et Américains, qui se sont ralliés aux premiers, de l'autre les Européens, qui pour une fois présentent un front uni.

L'enjeu n'est pas uniquement d'ordre industiel mais également culturel.

[107] Article 12-I de la Loi du 1/2/1994: obligation pour les radios de diffuser un minimum de 40 % de chansons d'expression française.

[108] La communauté francophone: cinq continents, 47 pays, un demi-milliard de personnes, 10% de la population totale, 12% du PIB mondial, 20%du commerce mondial.

[109] M.X.DENIAU, " La francophonie ", QUE SAIS-JE.

[110] " L'état de la francophonie dans le monde ", données 1993, La documentation française 1993.

[111] J.TOUBON, LE MONDE 15/10/1993.

[112] Il s'agit de travailler sur les technologies qui permettront de communiquer en langue française et de conduire en français des programmes de recherche.

[113] Vietnam, Laos, Cambodge.

[114] AUPELF: Association des universités partiellement ou entiérement de langue française.

[115] En leur procurant ce qui fait défaut à savoir des livres et des manuels en langue française.

[116] " La France priée de défendre le français ", LE MONDE 15/10/1993: l'Etat français a manifeste la volonté lors du sommet de la francophonie à l'ïle Maurice de relancer politiquement la francophonie.

[117] J.M.LEGER, LE MONDE DIPLOMATIQUE, novembre 1985.

[118] Bretton woods, juillet 1944:création du FMI et de la Banque Mondiale.

[119] La mauvaise qualité des traductions et interprétations est parfois le prétexte à l'usage de la langue anglaise, notamment dans les domaines scientifique et technique.


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