Circulaire Crim.93-9

Bulletin Officiel du Ministère de la Justice, Septembre 1993.

Extraits de la Circulaire Crim.93-9 du 14 mai 1993: Commentaire des dispositions du nouveau code pénal et de la loi relative à son entrée en vigueur.

Présentation de la Loi No 92-1336 du 16 décembre 1992 relative à l'entrée en vigueur du Nouveau Code Pénal.

En raison de l'ampleur des modifications qu'elles introduisent dans notre ordre juridique, les dispositions du nouveau code pénal ne peuvent entrer en vigueur sans être accompagnées d'une adaptation importante de la législation existante.

Cette adaptation est effectuée par la loi No 92-1336 du 16 décembre 1992 relative à l'entrée en vigueur du nouveau code pénal et à la modification de certaines dispositions de droit pénal et de procédure pénale rendue nécessaire par cette entrée en vigueur.

Cette loi, couramment désignée par commodité sous le nom de "loi d'adaptation", a en outre pour objet de fixer la date d'entrée en vigueur des dispositions nouvelles.

L'ampleur des modifications apportées à notre législation par la loi d'adaptation est à la mesure de la réforme. Ce sont en effet une trentaine de codes et une soixantaine de lois particulières qui se trouvent affectés, à des degrés divers, par les 373 articles que compte la loi. Celle-ci est divisée en cinq titres. Le titre Ier (article 1er à 134) est consacré aux dispositions (de loin les plus nombreuses et les plus importantes) modifiant le code de procédure pénale. Le titre II (article 135) crée un livre V dans le nouveau code pénal. Le titre III (articles 136 à 245) rassemble les dispositions modifiant les codes autres que le code de procédure pénale (qui, à l'exception du code civil placé en tête de ce titre, sont rangés par ordre alphabétique). Le titre IV (articles 246 à 321) réunit les dispositions modifiant des lois particulières (rangées par ordre chronologique). Enfin, dans le titre V, sont regroupées des dispositions diverses (articles 322 à 373).

Quatre catégories de dispositions peuvent être distinguées : celles qui procèdent à des modifications essentiellement formelles consistant en des substitutions de références ou en des transferts de textes (I), celles qui comportent des modifications de fond (II), celles qui modifient le nouveau code pénal lui-même (III) et enfin, les dispositions qui fixent les modalités de l'entrée en vigueur du nouveau code pénal (IV).

I. - Modifications de forme

Les modifications de forme prévues par la loi d'adaptation sont de loin les plus nombreuses.

La loi d'adaptation procède tout d'abord dans les textes législatifs faisant référence au code pénal actuel, aux substitutions de référence nécessitées par l'entrée en vigueur du nouveau code pénal. Les substitutions nécessaires ont été effectuées de manière purement mécanique sous réserve qu'il a été tenu compte en certains cas des infractions nouvelles prévues par le nouveau code pénal. Le législateur a procédé, soit au cas par cas (il en est ainsi en ce qui concerne les infractions punies des peines de l'abus de confiance), soit par voie de disposition générale pour quelques références très fréquentes (comme celles qui sont faites aux articles 42, 51, 51-1, 59, 60 259, 378 et 450 de l'actuel code pénal. Cf. art. 330 à 335 de la loi d'adaptation). S'agissant des renvois de pénalités, le législateur s'est attaché, dans la mesure du possible, à édicter des peines autonomes. Dans les autres cas, le libellé des infractions concernées a souvent été cité en même temps que les articles de référence afin d'améliorer la lisibilité des textes.

Dans le même ordre d'idée, il a été tenu compte du vocabulaire nouveau utilisé dans le nouveau code. Ainsi, les expressions "excuses absolutoires" et "excuses atténuantes" ayant disparu dans le nouveau code, la loi d'adaptation les a remplacées dans le code de procédure pénale par celles de "cause légale d'exemption ou de diminution de peine", le mot "absolution" disparaissant en conséquence au profit de l'expression "exemption de peine". Bien entendu, les termes "excuse atténuante de minorité" ne sont plus utilisés par les dispositions transférées dans l'ordonnance du 2 février 1945.

D'importants transferts de textes ont en outre été opérés par la loi d'adaptation.

Ainsi, de nombreuses dispositions du code pénal actuel (abrogé en totalité par l'article 372 de la loi) ont été insérées dans des textes - le plus souvent, le code de procédure pénale - où elles trouvent leur place naturelle : par exemple, les articles 23, 24 et 40 relatifs au calcul des peines privatives de liberté deviennent les articles 716-1 à 716-4 du C.P.P., l'article 55 relatif à la solidarité en matière pénale est remplacé par les articles 375-2, 480-1 et 543 du C.P.P., l'article 55-1 (alinéas 2 et 3) relatif au relèvement des interdictions déchéances et incapacités est transféré dans un article - 702-1 du C.P.P., les articles 335-1 bis et suivants relatifs à la procédure applicable en matière de proxénétisme sont intégrés dans un titre XVII du livre IV du CPP consacré aux règles particulières de procédure applicables en cette matière (cf. art. 29, 41, 49, 70, 77 et 81 de la loi).

De même, le parti ayant été pris de ne pas intégrer dans le nouveau code pénal les règles particulières applicables aux mineurs délinquants, les dispositions correspondantes du code actuel ont été transférées dans l'ordonnance No 45-174 du 2 février 1945. Il en est ainsi des dispositions articles 66 et 67 relatives à l'excuse atténuante de minorité (cf. art. 254). De même également, les dispositions particulières relatives aux atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation en temps de guerre correspondant à celles des articles 70 et suivants du code actuel ont été insérées dans un titre III du livre III du code de justice militaire (cf. art. 189).

Enfin, quelques infractions particulières ne trouvant pas leur place dans les livres I à IV du nouveau code ont dû être reprises dans d'autres textes. Il en est ainsi, par exemple, de la banqueroute désormais incriminée dans les articles 198 à 200 de la loi du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises.

D'autres transferts de textes peuvent être relevés. Dans la mesure où le trafic de stupéfiant est désormais incriminé dans le nouveau code pénal (et non plus dans le code de la santé publique), il a paru cohérent de transférer parallèlement dans un titre XVI du livre IV du code de procédure pénale les dispositions du code de la santé publique régissant la procédure particulière applicable en la matière.

Enfin, la loi d'adaptation contient de très nombreuses abrogations de conséquence qui portent pour l'essentiel sur les diverses dispositions de notre législation désormais reprises dans le nouveau code pénal.

Sont ainsi bien évidemment abrogées en totalité les dispositions du code pénal de 1810, mais également les textes prévoyant des infractions désormais réprimées par le nouveau code, comme, par exemple, les infractions à la loi du 6 janvier 1978 dite "informatique et liberté".

Sont pareillement abrogées de nombreuses dispositions du code de procédure pénale concernant des matières désormais traitées dans le nouveau code pénal (comme, par exemple, les dispositions relatives à l'application de la loi pénale dans l'espace ou, en matière de peines, celles relatives à la période de sûreté, le sursis, la dispense de peine, l'ajournement, la prescription des peines et la réhabilitation).

II. - Modifications de fond

S'agissant des modifications de fond, la loi d'adaptation tire tout d'abord les conséquences de nombreuses modifications introduites par le nouveau code pénal en ce qui concerne les peines.

Le nouveau code pénal ayant fait disparaître l'indication des peines minimales et le mécanisme des circonstances atténuantes, la loi d'adaptation supprime, par voie de disposition générale, toutes mentions relatives aux minimums des peines ainsi que toutes références aux dispositions de l'article 463 du code actuel relatif aux circonstances atténuantes (art. 322 et 323). En outre prenant en compte les répercussions de la disparition du système des circonstances atténuantes sur les délibérations de la cour d'assises, la loi modifie l'article 362 du nouveau code de procédure pénale de manière que la situation de l'accusé ne soit pas aggravée par la disparition de la question sur les circonstances atténuantes (art. 23 et 24).

Il était par ailleurs nécessaire de tirer les conséquences de la nouvelle échelle des peines instituée par le nouveau code pénal. Ainsi, les peines de 10 ans de réclusion ou de détention criminelle prévues par des textes autres que le code pénal sont toutes transformées en peine de 10 ans d'emprisonnement (art. 234), tandis que les amendes sont réévaluées pour tenir compte des nouveaux taux (art. 326, 328 et 329). Les dispositions prévoyant la récidive pour une contravention de l'une des quatre premières classes sont supprimées (art. 327).

Mais, allant au-delà de ces simples dispositions de conséquence, l'article 30 de la loi a en outre fixé à 25 000 F le minimum de l'amende correctionnelle (art. 381 nouveau du C.P.P.). Le maximum de l'amende contraventionnelle en récidive étant de 20 000 F selon le nouveau code pénal, il s'ensuit qu'aucune amende comprise entre 20 000 F et 25 000 F ne pourra plus désormais être encourue. Par ailleurs, la création d'une peine de 30 ans de réclusion criminelle a amené à préciser certains délais, notamment en matière de libération conditionnelle (art. 91 et 93). Enfin, par dérogation à l'échelle des peines d'emprisonnement correctionnel instituée par l'article 131-4, la loi prévoit, pour lever toute ambiguïté, que les délits actuellement punis d'une peine d'emprisonnement inférieure à six mois demeurent des délits (art. 325).

La suppression, par l'article 132-21 du nouveau code pénal, de la peine automatique de l'interdiction des droits civiques, civils et de famille a conduit le législateur à abroger en quasi totalité l'article L.5 du code électoral et à supprimer, dans l'article 256 du code de procédure pénale certaines interdictions d'être jurés (art. 21 et 159). Par ailleurs, conformément à l'esprit des dispositions nouvelles, toutes les interdictions, déchéances ou incapacités résultant de plein droit d'une condamnation pénale ont été supprimées s'agissant des mineurs (cf. art. 20-6 nouveau de l'ordonnance du 2 février 1945 institué par l'article 251 de la loi).

La détermination des modalités d'exécution de la peine d'interdiction de séjour étant désormais confiée à l'autorité judiciaire, des dispositions ont été introduites dans le code de procédure pénale pour fixer les pouvoirs du juge de l'application des peines en la matière (art. 113).

Enfin, la loi d'adaptation tire les conséquences dans le code de procédure pénale des différentes modifications apportées par le nouveau code pénal en matière d'individualisation des peines (semi-liberté, fractionnement, ajournement avec injonction) et de réhabilitation (celle-ci entraînant désormais, comme l'amnistie, suppression de la condamnation du B.1).

Il était par ailleurs nécessaire de tirer les conséquences de la responsabilité des personnes morales.

Afin de permettre la mise en oeuvre de cette responsabilité, la loi d'adaptation crée dans le livre IV du code de procédure pénale un titre XVIII consacré aux règles particulières de procédure applicables aux personnes morales (article 78).

Par ailleurs des règles spécifiques relatives à la réhabilitation judiciaire des personnes morales ont été introduites dans un article 798-1 du code de procédure pénale.

En outre, la loi d'adaptation institue un casier judiciaire des personnes morales afin de permettre l'application des règles relatives à la récidive et d'assurer l'effectivité des peines prononcées à l'encontre des personnes morales.

Enfin, le Parlement a complété la liste des infractions susceptibles d'engager la responsabilité pénale des personnes morales en prévoyant cette responsabilité pour des infractions situées en dehors du nouveau code pénal, notamment en matière de banqueroute, d'environnement et de concurrence.

Quelques autres modifications de fond peuvent être évoquées.

La loi d'adaptation prévoit, conformément au principe général posé par l'article 121-3 du nouveau code pénal, que les délits matériels réprimés par des textes particuliers ne seront désormais constitués que si la preuve d'une imprudence ou d'une négligence peut être rapportée (art. 339.

Par ailleurs, en même temps qu'elle les transfère dans le code de procédure pénale, la loi introduit des modifications importantes dans les dispositions relatives à la procédure applicable au trafic de stupéfiants.

III. - Modifications du nouveau code pénal

Le Parlement a saisi l'occasion de la discussion de la loi d'adaptation pour modifier sur certains points le nouveau code pénal.

Ces modifications figurent dans les articles 135, 213 et 340 à 369 de la loi. La plupart sont de nature purement technique et tendent à réparer quelques lacunes du texte adopté en juillet 1992. Toutefois, deux séries de modifications vont au-delà de ces simples améliorations techniques.

D'une part, le législateur a ajouté deux délits dans le livre IV du nouveau code pénal : l'organisation de funérailles contraires à la volonté du défunt et le déni de justice, ces deux délits étant désormais réprimés par les articles 433-21-1 et 434-7-1 du nouveau code.

D'autre part et surtout, le Parlement a créé, après les livres Ier à IV du nouveau code pénal, un livre V, intitulé "Des autres crimes et délits". En l'état, ce livre est pratiquement vide. Seul y figure un chapitre consacré aux mauvais traitements aux animaux qui intègre les infractions actuellement prévues par les actuels articles 453 et 454 du code pénal. Ce livre V est appelé, à une date encore incertaine, à rassembler les infractions en matière économique, financière et sociale qui se sont multipliées au cours de ces dernières décennies en dehors du code pénal (infractions au droit du travail, au droit de l'environnement, au droit des affaires...). Il reste donc à accomplir un important travail de codification qui ne devrait pas toutefois comporter de modifications de fond importantes.

IV. - Dispositions relatives à l'entrée en vigueur du nouveau code pénal

L'entrée en vigueur des quatre lois du 22 juillet 1992 constituant le nouveau code pénal et celle de la loi d'adaptation elle-même est fixée, par l'article 373 de cette loi, au 1er septembre 1993. Cet article reporte par ailleurs au 1er septembre 1994 la date d'entrée en vigueur des dispositions nouvelles dans les territoires d'outre-mer en renvoyant à une loi ultérieure le soin de procéder aux adaptations nécessitées par la situation particulière de ces territoires. Ainsi qu'il l'a été indiqué au début de la présente circulaire, il est envisagé de demander au Parlement de reporter de quelques mois l'entrée en vigueur de la réforme.

Les principes généraux relatifs à l'application de la loi pénale dans le temps s'appliqueront en principe pendant la période transitoire. Toutefois, afin de dissiper toute incertitude sur certains points importants, le législateur a prévu quelques dispositions particulières aux articles 337, 338, 370 et 371.

La loi précise tout d'abord les conditions dans lesquelles sont exécutées les peines d'interdiction de séjour prononcées par une décision devenue définitive à la date d'entrée en vigueur des dispositions nouvelles (art. 337).

Par ailleurs, afin d'éviter que cette question ne soulève de discussions, il est expressément prévu que les crimes de trafic de stupéfiants punis de 20 ans de réclusion criminelle dans le nouveau code pénal demeurent des délits punis de 20 ans d'emprisonnement lorsqu'ils ont été commis avant l'entrée en vigueur de la loi (art. 338).

La loi indique également que les dispositions supprimant la peine automatique d'interdiction des droits civiques, civils et de famille sont sans effet sur les interdictions devenues définitives avant son entrée en vigueur (art. 370).

Enfin, s'agissant des règles nouvelles relatives au concours d'infractions, la loi dispose que, dans la mesure où elles sont plus rigoureuses, elles ne s'appliqueront pas lorsque toutes les infractions en concours auront été commises avant son entrée en vigueur. Cette disposition est identique à celle qui avait été prévue en son temps pour l'application de l'article L. 630-3 du C.S.P. (art. 371).

ANNEXE 2 MODALITES D'ENTREE EN VIGUEUR DU NOUVEAU CODE PENAL : OBSERVATIONS CONCERNANT LE DROIT TRANSITOIRE L'application dans le temps d'une loi pénale nouvelle est une question complexe mais traditionnelle, à laquelle les juridictions ont fréquemment à répondre, au regard du nombre sans cesse croissant de modifications législatives qui interviennent dans le domaine du droit pénal. De ce point de vue l'entrée en vigueur des dispositions des lois du 22 juillet et du 16 décembre 1992 ne soulève donc pas de difficultés nouvelles. Toutefois, en raison de l'importance de cette réforme sans précédent, il en résulte un phénomène de masse qui rend opportun de préciser dans quelle mesure les dispositions du nouveau code pénal seront ou non applicables aux infractions commises avant son entrée en vigueur, qu'il s'agisse des infractions non encore définitivement jugées ou des infractions ayant donné lieu à des peines en cours d'exécution.

A titre liminaire, il convient de rappeler très brièvement les principes qui devront guider les juridictions, principes qui sont désormais consacrés par les articles 112-1 à 112-4 du nouveau code pénal.

S'agissant des lois d'incrimination et de pénalité, deux principes complémentaires sont applicables, celui de la non-rétroactivité de la loi nouvelle plus sévère, et celui de l'application immédiate - ou de la rétroactivité - de la loi nouvelle plus douce (art. 112-1). Lorsque la loi nouvelle supprime totalement une incrimination, cette rétroactivité in mitius concerne également les peines résultant de condamnations passées en force de chose jugée, qui doivent alors cesser de recevoir exécution, règle que ne prévoit pas le droit actuel (art. 112-4).

S'agissant des lois de compétence, d'organisation judiciaire ou de procédure, le principe est celui de l'application immédiate des nouvelles dispositions aux procédures en cours, sans que cette application ne remette en cause la validité des actes accomplis sous l'empire des textes anciens ou ne vienne supprimer des voies de recours (art. 112-2, (1) et (2), et 112-3).

Les lois relatives au régime d'exécution et d'application des peines sont d'application immédiate sauf (il s'agit également d'une innovation du nouveau code pénal) lorsqu'elles auraient pour effet de rendre plus sévères les condamnations prononcées (art. 112-2, (3)).

Enfin, les lois relatives à la prescription sont d'application immédiate, sauf si elles ont pour résultat d'aggraver la situation de l'intéressé. Cette atténuation est nouvelle s'agissant de la prescription de l'action publique (art. 112-2, 4).

D'une façon générale, les dispositions des articles précités soit reprennent ou consacrent les principes actuels en la matière, soit posent des principes plus favorables : elles seront donc toutes applicables dès l'entrée en vigueur du nouveau code pénal.

Ce sont principalement les deux principes relatifs aux textes d'incrimination et de répression (non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère et rétroactivité de la loi pénale plus douce) qui gouverneront les modalités d'entrée en vigueur du nouveau code pénal. Or ce sont ces deux principes dont l'application se révèle en pratique la plus délicate, dans la mesure où il n'est pas toujours évident de déterminer si une disposition nouvelle est plus ou moins sévère que l'ancienne. En effet, dans la plupart des cas, les textes nouveaux sont pour partie plus sévères et pour partie plus doux. Il est alors nécessaire de déterminer s'ils forment un tout indivisible, et, dans cette hypothèse de savoir s'ils sont globalement plus doux (et donc applicables aux infractions commises avant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi) ou globalement plus sévères (et donc inapplicables à ces infractions), ou s'ils sont divisibles, seules les dispositions plus douces étant applicables rétroactivement.

Sans être exhaustive, la présente note a pour objet de répondre à ces questions en décrivant le droit applicable pour les infractions commises avant l'entrée en vigueur du nouveau code pénal, mais jugées après cette entrée en vigueur (I) et pour les infractions déjà jugées mais dont la peine est toujours en cours d'exécution (II). Bien évidemment les interprétations proposées sont faites, comme tous les commentaires de la présente circulaire, sous réserve de l'interprétation souveraine de la Cour de cassation.

I. Infractions commises avant l'entrée en vigueur du nouveau code mais jugées postérieurement

Sont successivement examinées les dispositions de droit pénal général et celles de droit pénal spécial.

A. - Dispositions de droit pénal général

1) Dispositions relatives à la loi pénale ou à la responsabilité pénale (titres Ier et II du livre Ier du nouveau code pénal)

a) La seule disposition du chapitre Ier du titre Ier relatif à la loi pénale pour laquelle la question de l'application dans le temps soulève un intérêt pratique est celle de l'article 111-5 qui étend la possibilité pour les juridictions pénales d'apprécier la légalité des actes administratifs. Il s'agit d'une disposition qui peut s'analyser soit comme une règle de fond plus favorable (car en dépend l'applicabilité des textes incriminateurs et répressifs) soit comme une règle de procédure (car elle évite de surseoir à statuer). Elle est donc immédiatement applicable aux procédures en cours.

De même, sont applicables immédiatement, comme il l'a été indiqué dans l'introduction, les dispositions des articles 112-1 à 112-6 relatifs à l'application de la loi pénale dans le temps.

En revanche, les dispositions des articles 113-1 à 113-11, du moins celles qui étendent l'applicabilité de la loi pénale française dans l'espace, ce qui revient à incriminer des faits qui ne le sont pas actuellement, constituent des dispositions de fond plus sévères. Elles ne pourront donc être applicables qu'aux infractions commises après l'entrée en vigueur du nouveau code pénal.

b) La plupart des dispositions du titre II, relatif à la responsabilité pénale, consacrant des principes actuels, leur application dans le temps ne soulève pas de difficulté.

Il peut toutefois être indiqué que sont immédiatement applicables les dispositions plus douces de l'article 121-3, qui définit de façon plus restrictive qu'aujourd'hui l'élément moral des infractions, de même que celles de l'article 328 de la loi d'adaptation qui en tirent les conséquences en transformant les "délits matériels" en délits d'imprudence ou de négligence.

Par ailleurs, les règles relatives à la répression de la complicité des crimes et des délits prévues par l'article 121-6 sont légèrement différentes des règles actuelles, et peuvent aboutir, selon les hypothèses décrites dans le premier tome de la circulaire, à une répression plus ou moins sévère qu'aujourd'hui : il conviendra donc que les juridictions retiennent, selon les cas, les dispositions les plus favorables à la personne poursuivie. S'agissant de la complicité des contraventions, les nouvelles dispositions généralisant la complicité par instigation, qui sont évidemment plus sévères, ne s'appliqueront qu'aux contraventions commises après l'entrée en vigueur de la réforme.

Enfin, il est bien évident que les dispositions de l'article 121-2 instituant la responsabilité pénale des personnes morales, de même que toutes les autres dispositions du nouveau code pénal relatives à cette responsabilité, ne seront applicables qu'aux infractions commises après l'entrée en vigueur du nouveau code.

S'agissant des causes d'irresponsabilité, les nouveaux textes soit reprennent, en les précisant et en consacrant leur interprétation jurisprudentielle, soit élargissent les règles actuelles. Ils seront donc immédiatement applicables aux infractions commises avant leur entrée en vigueur. Sera notamment applicable l'article 122-3 instituant l'erreur sur le droit comme cause d'irresponsabilité pénale.

2) Dispositions relatives aux peines (titre III du livre Ier)

Les dispositions du titre III relatives aux peines appellent plus de commentaires, qui distingueront la question des peines encourues de celle des peines prononcées.

1) Peines encourues

a) échelle des peines

La question des effets de la modification de l'échelle des peines privatives de liberté à laquelle procède le nouveau code pénal relève en réalité du droit pénal spécial. Toutefois, il peut être dès à présent indiqué que les dispositions de l'article 324 de la loi d'adaptation qui, tirant les conséquences de cette nouvelle échelle des peines, transforme en délits punis de dix ans d'emprisonnement tous les crimes punis de dix ans de réclusion prévus par d'autres textes que le nouveau code pénal, seront évidemment applicables immédiatement.

b) peines privatives ou restrictives de droits

Les dispositions des 1) et 3) de l'article 131-6 prévoient de nouvelles peines de substitution à l'emprisonnement, qu'il convient désormais de qualifier de peines alternatives : l'annulation du permis de conduire et l'interdiction d'émettre des chèques ou d'utiliser une carte de paiement. Ces dispositions permettant d'éviter le prononcé de la peine d'emprisonnement, qui constitue la peine la plus grave en matière correctionnelle, doivent être considérées comme plus douces et s'appliquer immédiatement aux délits commis avant l'entrée en vigueur du nouveau code pénal.

En revanche, les dispositions de l'article 131-7 prévoyant le prononcé des peines privatives de droits à la place de l'amende doivent être considérées comme plus sévères, et elles ne pourront s'appliquer rétroactivement.

En effet, si cet article permet une meilleur individualisation des sanctions, on ne peut considérer qu'il évite le prononcé d'une peine plus sévère. Les personnes poursuivies pour des faits commis avant l'entrée en vigueur du nouveau code pénal se trouveraient donc dans une situation plus défavorable que celles déjà jugées à cette date si ces nouvelles peines pouvaient leur être applicables.

Il en est de même des dispositions de l'article 131-14 qui prévoient désormais des peines alternatives à l'amende en matière de contravention de la cinquième classe. Elles ne pourront recevoir application que pour les contraventions commises après l'entrée en vigueur du nouveau code pénal.

c) Travail d'intérêt général

La possibilité nouvelle de prononcer en application de l'article 131-8 un travail d'intérêt général quel que soit le passé pénal du prévenu pourra être applicable immédiatement, puisqu'elle évite de prononcer une peine d'emprisonnement plus sévère. Le travail d'intérêt général ne pouvant être prononcé qu'avec l'accord du prévenu, il serait d'ailleurs paradoxal de le refuser à une personne qui l'accepte comme peine de substitution à l'emprisonnement.

d) combinaison des peines correctionnelles principales et alternatives

Les modifications apportées par l'article 131-9 ne sont pas toutes applicables immédiatement, certaines venant en effet aggraver le droit actuel.

Ainsi, la possibilité de cumuler les jours-amende avec l'emprisonnement ne pourra concerner que les infractions commises après l'entrée en vigueur du nouveau code.

En revanche seront immédiatement applicables les interdictions de cumul entre l'amende et le travail d'intérêt général et entre le travail d'intérêt général, les jours-amende et les peines restrictives de droits.

e) peines complémentaires

Le contenu d'un certain nombre de peines complémentaires a été modifié par les dispositions du nouveau code pénal et, dans les hypothèses où ces peines étaient encourues en application des anciens textes (hypothèses qui appelleront certains commentaires dans la deuxième partie de cette note consacrée au droit pénal spécial), la plupart de ces modifications n'entreront pas en vigueur immédiatement car elles viennent aggraver la répression.

Ainsi, s'agissant de la confiscation, la possibilité, généralisée par l'article 131-4, de prononcer la confiscation en valeur ne sera pas applicable immédiatement, sauf si elle était déjà prévue par les textes anciens (ainsi en cas d'atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation, ex- atteintes à la sûreté de l'Etat, pour lesquelles cette confiscation est prévue par l'article 102 de l'actuel code pénal).

De même, s'agissant de la peine d'affichage ou de diffusion de la décision, les extensions apportées par l'article 131-35, telles que la possibilité d'afficher un communiqué ou de diffuser la décision par la voie audiovisuelle, ne peuvent être applicables aux infractions commises avant l'entrée en vigueur du nouveau code. Toutefois, l'exigence selon laquelle l'accord de la victime est nécessaire pour diffuser son identité paraît devoir être immédiatement respectée.

Par ailleurs, le contenu de certaines peines complémentaires définies par les dispositions du livre Ier a été adouci. Ces modifications devront évidemment être applicables immédiatement.

Il en est ainsi des cas d'exclusion de la peine d'interdiction du territoire français prévus par le dernier alinéa de l'article 131-30, qui sont désormais généralisés à toutes les infractions pour lesquelles cette peine est encourue, sauf exception expressément prévue par les dispositions de droit pénal spécial. Cette modification concerne en pratique les infractions de production, fabrication, importation et exportation illicites de stupéfiants; en revanche, les limitations concernant les catégories d'étrangers protégés ne sont évidemment pas applicables rétroactivement).

Il en est de même pour les nouvelles dispositions de l'article 131-31 qui judiciarisent l'interdiction de séjour, dont il ne fait pas de doute qu'elles sont plus douces et donc applicables immédiatement.

Enfin, sont également applicables immédiatement les dispositions qui réduisent à cinq ans la durée de ces peines complémentaires en matière correctionnelle, lorsque les textes actuels prévoyaient une durée de dix ans.

f) infractions en concours

Les nouvelles dispositions relatives aux infractions en concours, prévues par les articles 132-2 à 132-7 instituent un régime plus cohérent mais légèrement plus sévère que celui qui résulte de l'interprétation jurisprudentielle de l'actuel article 5. Les modalités de leur application dans le temps sont précisées par l'article 371 de la loi d'adaptation : ces dispositions ne sont pas applicables si les différentes infractions en concours ont toutes été commises avant l'entrée en vigueur du nouveau code pénal ; elles sont applicables si l'une des infractions en concours a été commise après cette entrée en vigueur.

g) récidive

Deux situations doivent être envisagées s'agissant de la récidive, dont le régime est fixé par les articles 132-8 à 132-11.

* Dans l'hypothèse où le second terme de la récidive est antérieur à l'entrée en vigueur du nouveau code, la question est de savoir si les dispositions nouvelles, qui sont pour partie plus douces et pour partie plus sévères, sont divisibles ou non, et dans cette seconde hypothèse, si elles seraient globalement plus sévères ou globalement plus douces.

A l'exception des dispositions plus douces relatives à la suppression de la récidive des quatre premières classes de contraventions, il convient de considérer que les autres dispositions nouvelles constituent un régime indivisible et globalement plus sévère qui ne doit pas recevoir immédiatement application (prise en compte, pour le premier terme de la récidive, de la peine encourue et non de la peine prononcée ; doublement de l'amende). Toutefois, même si les textes actuels doivent continuer d'être appliqués, la distinction entre la petite et la grande récidive correctionnelles ne présente plus aucun intérêt pratique, puisque le nouveau code pénal a supprimé les minimums des peines.

* Dans l'hypothèse où le second terme de la récidive est commis après l'entrée en vigueur du nouveau code, et même si le premier terme a été commis antérieurement, toutes les règles nouvelles, y compris celles qui sont plus sévères doivent s'appliquer. En effet, il ne s'agit pas dans cette situation de l'application rétroactive d'une loi pénale plus sévère, car une personne condamnée ne dispose évidemment pas, si elle commet une nouvelle infraction, d'un droit acquis à bénéficier des règles relatives à la récidive en vigueur au moment de la commission de la première infraction.

Toutefois, il est alors nécessaire, pour apprécier le premier terme de la récidive, de tenir également compte des dispositions de droit pénal spécial plus douces figurant dans le nouveau code : ainsi, si la première condamnation a été prononcée pour une infraction qui constituait un crime à l'époque des faits, mais qui est devenu dans le nouveau code pénal un délit puni de moins de dix ans d'emprisonnement, les dispositions des articles 132- 8 et 132-9 prévoyant des récidives générales (perpétuelles ou temporaires) ne pourront s'appliquer et seule la récidive spéciale prévue par l'article 132-10 pourra être retenue. Cette hypothèse ne concerne toutefois que très peu d'infractions (ainsi la violation d'un secret de la défense nationale prévue par l'article 413-10, ou la soustraction de biens contenus dans un dépôt public prévue par l'article 433-4), car la plupart des crimes correctionnalisés par le nouveau code sont punis de dix ans d'emprisonnement, et ils sont donc assimilés à des crimes au regard de la récidive par les articles 132-8 et 132-9.

2) Peines prononcées

a) Minimums - circonstances atténuantes

S'applique immédiatement la suppression des minimums et du mécanisme des circonstances atténuantes qui peut être analysée comme une modification de fond permettant aux tribunaux de prononcer plus facilement des peines plus douces. Les juridictions pourront donc, pour des faits commis avant l'entrée en vigueur du nouveau code, prononcer des peines inférieures aux minima prévus par les textes anciens sans déclarer qu'il existe des circonstances atténuantes.

Par ailleurs, seront évidemment applicables immédiatement les dispositions de l'article 362 du code de procédure pénale relatif aux délibérations de la cour d'assises, dans sa rédaction modifiée par l'article 24 de la loi d'adaptation pour tirer les conséquences de la suppression des circonstances atténuantes, qui exige désormais une majorité qualifiée pour prononcer le maximum de la peine.

b) modification de l'échelle des peines criminelles

L'article 131-1 du nouveau code pénal fixant à dix ans au moins la durée de la réclusion ou de la détention criminelle, les cours d'assises ne pourront plus prononcer des peines de réclusion ou de détention inférieures à dix ans à compter de l'entrée en vigueur du nouveau code, même pour les crimes commis antérieurement.

Cette impossibilité sera absolue, y compris dans l'hypothèse d'un crime plus sévèrement puni par les dispositions nouvelles, et devant donc être jugé en application des dispositions anciennes qui prévoient le plus souvent des peines de réclusion minimums inférieures à dix ans. Il en est ainsi notamment en cas de viol sans circonstance aggravante, actuellement puni de cinq à dix ans de réclusion criminelle et puni dans le nouveau code de quinze ans de réclusion : la cour d'assises pourra prononcer une peine de dix ans de réclusion, mais si elle prononce une peine privative de liberté d'une durée inférieure, celle-ci sera nécessairement une peine d'emprisonnement.

La création de la peine de trente ans de réclusion a nécessité la modification de l'article 362 du code de procédure pénale par l'article 24 de la loi d'adaptation afin d'éviter qu'une personne encourant une peine de trente ans de réclusion ne soit condamnée à une peine comprise entre 30 et 20 ans (si la cour d'assises ne retient pas la peine maximum, elle devra descendre jusqu'à 20 ans), ou d'éviter qu'une personne passible de la perpétuité soit condamnée à une peine supérieure à trente ans. Cette modification entrera évidemment en vigueur immédiatement.

La création de la peine de trente ans a également pour conséquence d'introduire un régime transitoire pour les crimes punis dans l'ancien et le nouveau code pénal de la réclusion à perpétuité lorsqu'ils ont été commis avant l'entrée en vigueur des nouveaux textes. Actuellement en effet, les auteurs de ces crimes ne peuvent être condamnés, si les circonstances atténuantes leur sont accordées, à une peine supérieure à vingt ans de réclusion. Il n'est donc pas possible, sauf à aggraver la répression, par l'application rétroactive de dispositions plus sévères, de leur appliquer les règles nouvelles qui permettraient de les condamner à trente ans de réclusion, ou à une peine comprise entre vingt et trente ans de réclusion. Dans l'hypothèse où la majorité qualifiée de la cour d'assises considérerait que ces accusés ne doivent pas être punis de la peine maximum de la réclusion perpétuelle, ils devront donc (comme ceux qui encourent trente ans dans le nouveau code) se voir appliquer une peine inférieure ou égale à vingt ans de réclusion.

c) modification de l'échelle des peines d'emprisonnement correctionnel

La modification de l'échelle des peines d'emprisonnement correctionnel à laquelle procède l'article 131-4 du nouveau code pénal ne soulève pas de difficulté en ce qui concerne l'élévation du maximum de l'emprisonnement de cinq à dix ans, puisqu'actuellement la limite de cinq ans posée par l'article 40 du code pénal n'est pas toujours respectée, de très nombreux délits étant punis de cinq à dix ans d'emprisonnement.

Une difficulté provient cependant de la volonté du législateur de ne pas faire d'exception à cette nouvelle échelle en ne prévoyant aucune peine d'emprisonnement supérieure à dix ans (sauf évidemment en cas de récidive) c'est-à-dire, en pratique, en supprimant les peines de vingt ans d'emprisonnement actuellement prévues pour certaines formes de trafics de stupéfiants par l'article L.627 du code de la santé publique.

Or certaines de ces infractions, et notamment le délit de production ou de fabrication illicites de stupéfiants, sont plus sévèrement sanctionnées par le nouveau code pénal, puisque celui-ci prévoit des peines criminelles. Les nouvelles dispositions ne seront donc pas applicables immédiatement, et les tribunaux devront en conséquence, pour les faits commis avant l'entrée en vigueur du nouveau code, faire application des textes actuels. Mais il était possible de se demander si, en raison de la survie de la loi ancienne plus douce, les juridictions seraient autorisées à prononcer la peine aujourd'hui encourue de vingt ans d'emprisonnement, alors que cette peine n'est plus prévue par les dispositions générales de l'article 131-4.

Pour éviter toute ambiguïté, le législateur a précisé dans l'article 368 de la loi d'adaptation que, dans une telle hypothèse, cette peine pouvait être prononcée. Une solution contraire aurait en effet provoqué, pendant une période transitoire, un affaiblissement injustifiable de la répression.

d) motivation des peines d'emprisonnement

Les dispositions de l'article 132-19 exigeant une motivation spéciale des peines d'emprisonnement fermes devront s'appliquer dès l'entrée en vigueur du nouveau code pénal y compris pour le jugement des délits commis avant cette date.

Il s'agit en effet d'une disposition de procédure pénale, par nature applicable immédiatement aux procédures en cours. En ce qui concerne les mineurs, cette motivation devra intervenir même pour les peines d'emprisonnement avec sursis.

e) période de sûreté

Seules sont ici examinées les dispositions de l'article 132-23 relative à la période de sûreté facultative, celles relatives à la période de sûreté de plein droit relevant en réalité du droit pénal spécial.

Le nouveau code est à la fois plus sévère (pour les crimes punis de la réclusion à perpétuité, la période peut être portée jusqu'à 22 ans, au lieu de 18 ans) et plus doux (seules les peines privatives de liberté non assorties du sursis d'une durée supérieure à cinq ans, au lieu de trois ans peuvent être assorties de cette mesure) que l'actuel article 720-2 du code de procédure pénale. Ces deux modifications peuvent toutefois être sans inconvénient appliquées séparément, la plus douce bénéficiant immédiatement aux infractions commises avant l'entrée en vigueur du nouveau code, la plus sévère ne pouvant s'appliquer qu'aux infractions commises après cette date.

f) semi-liberté

Les articles 132-25 et 132-26 qui permettent la semi-liberté pour les peines d'emprisonnement inférieures à un an (au lieu de six mois) sont immédiatement applicables.

g) fractionnement

Sont immédiatement applicables les dispositions des articles 132-27 et 132-28 permettant le fractionnement ab initio des peines d'emprisonnement, d'amende, de jours-amende et de suspension de permis de conduire.

De la même manière, doivent être appliquées immédiatement les dispositions des articles 708 et 720-1 du code de procédure pénale, tels qu'ils résultent de la loi d'adaptation, permettant de modifier la décision prise au stade du jugement (mais les limites relatives au quantum de la peine restant à subir et à la durée du fractionnement posées par l'article 720-2, limites qui n'existent pas aujourd'hui, ne seront pas applicables).

h) sursis - Sursis simple

Doivent être distinguées la question de l'octroi du sursis, et celle de ses effets. Le problème de la révocation des sursis accordés avant l'entrée en vigueur du nouveau code concerne l'exécution des peines et sera examiné dans la deuxième partie de la présente note.

Les nouvelles règles en matière d'octroi du sursis sont à la fois plus douces (les peines qui peuvent bénéficier de cette mesure sont plus nombreuses) et plus sévères (les conditions liées au passé pénal du prévenu sont plus rigoureuses). Elles semblent toutefois pouvoir être considérées comme divisibles.

Pourront donc être assorties du sursis, dès l'entrée en vigueur du nouveau code pénal, les peines de jours-amende (possibilité qui paraît toutefois théorique) et les peines complémentaires, même si elles ne sont pas prononcées à titre de peine principale et y compris en matière contraventionnelle, en application des dispositions des articles 132-31 et 132-34.

Par ailleurs, une personne déjà condamnée à une peine inférieure ou égale à deux mois d'emprisonnement pourra bénéficier d'un sursis, comme le prévoient les textes actuels et contrairement aux dispositions plus sévères des articles 132-30 et 132-33.

Toutefois, les peines qui ne peuvent être aujourd'hui prononcées avec sursis ne pourront être assorties de cette mesure qu'à la condition de respecter les nouvelles dispositions relatives au passé pénal du condamné.

Les articles 132-35 à 132-39 qui prévoient les effets du sursis sont en partie plus sévères qu'aujourd'hui, puisque les hypothèses de révocation sont plus nombreuses, mais ils sont également plus doux.

Il peut être distingué, en ce qui concerne les causes de révocation, selon la nature de la peine prononcée avec sursis, qu'il s'agisse d'une peine d'emprisonnement, d'une peine d'amende, ou d'une autre peine.

Les règles prévoyant la révocation du sursis prononcé pour une peine d'emprisonnement ne sont pas modifiées. L'application dans le temps des textes nouveaux ne soulève donc pas de difficulté dans cette hypothèse, qui est la plus courante en pratique.

S'agissant des sursis assortissant les peines d'amende, les dispositions nouvelles du deuxième alinéa de l'article 132-36 sont plus sévères puisque ces sursis sont désormais révoqués par toute nouvelle condamnation à une peine autre que la réclusion et l'emprisonnement. Elles ne s'appliqueront pas aux sursis prononcés pour des infractions commises avant l'entrée en vigueur du nouveau code (qui ne pourront être révoqués que par une peine privative de liberté ou une peine d'amende).

Les dispositions de cet alinéa qui permettent la révocation des sursis accompagnant les peines autres que les peines privatives de liberté ou l'amende sont plus sévères puisque cette révocation n'est pas prévue par les textes actuels : elles ne seront donc normalement pas applicables immédiatement. Toutefois, ces dispositions seront applicables si le sursis a été prononcé en application des nouveaux textes pour des peines complémentaires qui ne peuvent être assorties de cette mesure en vertu des textes actuels, les conditions de révocation étant alors indissociables des conditions d'octroi.

Par ailleurs, les dispositions plus douces de l'article 132-37 qui réduit de cinq à deux ans le délai du sursis en matière contraventionnelle sont immédiatement applicables. - Sursis avec mise à l'épreuve

Les nouvelles dispositions en matière de sursis avec mise à l'épreuve forment un tout indivisible qui est globalement très légèrement plus sévère que les textes actuels. Elles ne s'appliqueront donc pas aux infractions commises avant l'entrée en vigueur du nouveau code pénal.

B) Dispositions de droit pénal spécial

Il convient de distinguer les questions de fond que pose l'entrée en vigueur des dispositions nouvelles, questions qui sont évidemment les plus importantes, du problème, plus formel, relatif au visa des textes applicables.

1) Questions de fond

Trois questions peuvent être examinées, qui portent respectivement sur les textes d'incrimination, les textes de pénalité et les textes prévoyant des circonstances aggravantes.

Les situations propres à chaque infraction ne sont évidemment pas toutes commentées dans les observations qui suivent. Il doit cependant être indiqué que la table de correspondance entre les dispositions du nouveau code pénal et celles du code actuel qui est annexée à la présente circulaire, indique, pour chaque article, si celui-ci est plus ou moins sévère que le texte actuel, tant en ce qui concerne l'incrimination, que les peines privatives de liberté, les peines d'amende et les peines complémentaires.

Par ailleurs, pour certaines infractions, telles que les atteintes volontaires à la vie, le trafic de stupéfiants, les vols et la prise illégale d'intérêts, les commentaires des nouvelles dispositions figurant dans la présente circulaire sont complétées par des observations de droit transitoire, auxquelles il convient le cas échéant de se reporter.

1) Dispositions relatives aux incriminations

Trois cas de figure peuvent se présenter : celui des incriminations supprimées, celui des incriminations plus larges ou plus réduites et celui des incriminations nouvelles.

a) Incriminations supprimées

La suppression d'une incrimination est évidemment applicable immédiatement. Toutefois, bien que la réforme du code pénal ait été l'occasion de procéder à de nombreuses abrogations, celles-ci devraient avoir des conséquences pratiques limitées, car elles concernent le plus souvent des incriminations tombées en désuétude.

Il convient cependant de distinguer les incriminations dont la suppression retire le caractère d'infraction pénale aux agissements considérés, et celles qui ont été supprimées parce qu'elles faisaient double emploi avec d'autres incriminations plus générales, créées ou conservées par le nouveau code. Si, dans le premier cas, les procédures engagées sous l'empire des anciens textes devront se clôturer par un non-lieu ou une relaxe, dans la seconde hypothèse, la juridiction devra requalifier l'infraction en retenant l'incrimination prévue par le nouveau code pénal (mais bien évidemment, seules les peines les moins sévères, prévues par l'ancien ou le nouveau texte, pourront être prononcées).

Ainsi, par exemple, en cas de poursuites engagées du chef de castration, les faits devront être requalifiés, selon les circonstances, en tortures ou actes de barbarie ou en violences. De même, des faits qualifiés d'abus de blanc-seing devront être requalifiés en faux ou en abus de confiance.

b) incriminations réduites ou élargies

Nombreuses sont les hypothèses d'infractions dont les éléments constitutifs ont été modifiés par le nouveau code pénal.

Dans la plupart des cas, ces modifications ont consisté à étendre le domaine d'application de l'incrimination : il en est ainsi, par exemple, en matière de menaces, de discrimination, d'atteinte au cadavre, d'abus de confiance, d'escroquerie, d'extorsion, d'espionnage ou de trahison. Ces extensions ne sont évidemment pas applicables aux infractions commises avant l'entrée en vigueur du nouveau code, qui doivent donc être jugées conformément aux anciens textes.

Dans d'autres hypothèses, moins nombreuses, le législateur a réduit les incriminations, en exigeant de nouveaux éléments constitutifs. Ainsi en est- il des outrages publics à la pudeur, désormais qualifiés d'exhibitions sexuelles (art. 222-32).

Enfin, dans plusieurs hypothèses, le nouveau code pénal a à la fois réduit et élargi le domaine d'application d'une incrimination, en exigeant certains éléments constitutifs nouveaux, tout en supprimant certains éléments prévus par les textes actuels.

C'est notamment le cas du délit de diffusion de message violent ou pornographique prévu par l'article 227-24, qui correspond à l'actuelle infraction d'outrage aux bonnes moeurs (l'infraction n'est désormais constituée que si le message est susceptible d'être perçu par un mineur, mais sont également incriminés les messages violents, indépendamment de toute connotation sexuelle). C'est également le cas du délit de provocation des militaires à la désobéissance prévu par l'article 413-3, actuellement réprimé par l'article 25 de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse (est désormais exigée l'intention de nuire à la défense nationale, mais l'infraction n'est plus nécessairement publique).

Dans de telles hypothèses, il n'est pas possible de considérer que chacune des dispositions ancienne ou nouvelle forme un tout indivisible, et que, selon que le nouveau texte est ou non jugé globalement plus doux, il s'appliquera ou ne s'appliquera pas aux faits commis avant l'entrée en vigueur du nouveau code. Seuls pourront être réprimés les agissements qui tombent à la fois sous le coup des anciens et des nouveaux textes, la période transitoire entraînant en quelque sorte l'application d'une incrimination spécifique, dont les éléments constitutifs sont communs aux deux incriminations en conflit.

c) incriminations nouvelles

En principe, les dispositions du nouveau code pénal prévoyant des incriminations nouvelles ne peuvent être appliquées aux faits commis avant leur entrée en vigueur. C'est notamment le cas des textes réprimant les crimes contre l'humanité, les tortures ou actes de barbarie, le harcèlement sexuel, les risques causés à autrui, les conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité de la personne, la fourniture de fausses informations, les actes terroristes, les groupes de combat, etc.

Toutefois, il peut arriver que les dispositions nouvelles permettent de sanctionner des faits qui tombaient sous le coup d'une incrimination ancienne plus spécifique ayant été abrogée. Dans cette hypothèse, sous réserve des peines encourues, les nouvelles dispositions pourront être retenues par les juridictions : c'est notamment le cas du crime de castration qui pourra être requalifié en tortures ou actes de barbarie.

Enfin, il convient de ne pas confondre la création ou l'élargissement d'une incrimination avec l'hypothèse de la modification de la dénomination d'une infraction déjà existante (ainsi les coups et blessures volontaires qui deviennent des violences, ou les attentats à la pudeur qui deviennent des agressions sexuelles), ou celle de la consécration législative de l'interprétation des textes actuels (ainsi la définition du recel). Dans ces deux cas, les nouvelles dispositions ne peuvent être considérées comme plus sévères que les anciennes.

2) Dispositions répressives

Les difficultés d'application dans le temps des dispositions du nouveau code pénal prévoyant les peines applicables pour chaque infraction doivent être grandement relativisées en ce qui concerne leurs conséquences pratiques.

En effet, la quasi-totalité des diminutions de peines auxquelles procède le nouveau code pénal viennent consacrer les pratiques judiciaires, et il y a donc très peu de risque de voir une juridiction prononcer, après l'entrée en vigueur de la réforme, une peine plus sévère que celle prévue par les nouveaux textes.

Sous réserve de cette observation, il convient d'examiner successivement la question des peines privatives de liberté, celle des peines d'amende et celle des peines complémentaires.

a) peines privatives de liberté

En premier lieu, rappelons que s'applique immédiatement la suppression de l'emprisonnement contraventionnel. La circulaire du 24 juillet 1992 avait d'ailleurs demandé de ne plus requérir de peine d'emprisonnement en matière contraventionnelle dès la publication du nouveau code pénal.

En matière criminelle et correctionnelle, les dispositions du nouveau code pénal prévoyant des peines privatives de liberté plus légères s'appliquent évidemment immédiatement. Ces modifications appellent quelques observations concernant, d'une part, les hypothèses, relativement fréquentes, des crimes ayant fait l'objet d'une correctionnalisation et, d'autre part, la période de sûreté obligatoire. - crimes correctionnalisés

Si la procédure en cours au moment de l'entrée du nouveau code pénal est au stade de l'instruction, les faits devront être requalifiés en délit et l'affaire devra être renvoyée devant le tribunal correctionnel. Il en sera de même si l'affaire est pendante devant la chambre d'accusation.

En revanche, si la procédure a déjà été renvoyée devant la cour d'assises, celle-ci, parce qu'elle a plénitude de juridiction, demeure valablement saisie pour statuer sur l'infraction. Elle devra requalifier le crime en délit et seules des peines d'emprisonnement correctionnel, dans la limite du maximum prévu par les nouveaux texte, pourront être prononcées. - période de sûreté obligatoire

En ce qui concerne la période de sûreté obligatoire, il est évident que les nouvelles dispositions ne pourront pas s'appliquer dans les hypothèses où cette période n'est pas aujourd'hui prévue (il en est ainsi en cas de viol aggravé, de fausse monnaie, de livraison du territoire national), et que les dispositions anciennes ne pourront pas être retenues lorsque cette mesure n'a pas été conservée par les textes nouveaux (ainsi en cas de meurtre simple, de violences ayant entraîné la mort ou une mutilation en l'absence de circonstance aggravante).

Lorsque la période de sûreté automatique est prévue par les anciens et par les nouveaux textes, plusieurs situations pourront se présenter, dans la mesure où les dispositions de l'article 132-23 définissant le contenu de cette mesure sont à la fois plus sévères et moins sévères qu'aujourd'hui, tout en restant divisibles. Le principe qui devra être respecté est simple ; quelle que soit l'hypothèse envisagée, la période de sûreté prononcée ne devra dans aucun cas excéder le maximum prévu par les dispositions les plus favorables au condamné, qui peuvent être, selon les cas, celles de l'article 720-2 du code de procédure pénale ou celles de l'article 132-23 du nouveau code pénal.

Pour les crimes punis - dans l'ancien code pénal comme dans le nouveau - de la réclusion à perpétuité, il en résulte que la période de sûreté de plein droit sera donc comme aujourd'hui de quinze ans et non de dix-huit ans.

Pour les crimes qui ne peuvent être assortis aujourd'hui d'une période de trente ans, cette période pourra être portée, comme actuellement, à dix-huit ans, et non à vingt-deux ans.

Pour les crimes qui peuvent être assortis aujourd'hui d'une période de sûreté maximum de trente ans, cette période ne pourra être portée qu'à vingt- deux ans, sauf en ce qui concerne le meurtre ou l'assassinat d'un mineur précédé ou accompagné d'un viol, de torture ou d'acte de barbarie, la période de trente ans ayant été conservée dans ces hypothèses par les articles 221-3 et 221-4.

b) amende

La plupart des dispositions du nouveau code pénal prévoyant des amendes sont plus sévères que les dispositions actuelles, dans la mesure où le législateur a le plus souvent respecté la régle - non écrite - selon laquelle 100 000 F d'amende correspondait à un an de privation de liberté.

Deux situations doivent dès lors être envisagées.

Soit les peines privatives de liberté encourues pour l'infraction considérée n'ont pas été modifiées ou ont été aggravées : seules les peines d'amende moins sévères prévues par les anciens textes, qui sont seuls applicables, peuvent être prononcées.

Soit les peines privatives de liberté ont été diminuées (le crime a été correctionnalisé, ou le maximum de la peine d'emprisonnement a été réduit) ou même supprimées : dans cette hypothèse, il n'est pas possible de considérer que la peine d'amende constitue un élément divisible du nouveau texte, dont les dispositions plus douces en matière de peine privative de liberté seraient seules applicables immédiatement. En effet, les peines principales encourues pour une infraction déterminée forment un ensemble indissociable, choisi par le législateur en fonction de la gravité du comportement incriminé et par référence à une échelle de valeurs au sein de laquelle sont situées d'autres infractions. L'indivisibilité des peines principales a d'ailleurs déjà été affirmée par la Cour de cassation, notamment en matière de confusion des peines. La comparaison entre les anciennes et les nouvelles dispositions doit se faire au regard de l'ensemble des peines principales, par référence à la peine la plus grave, c'est à dire celle d'emprisonnement ou de réclusion. Si cette peine est moins sévère, l'ensemble des dispositions nouvelles sont donc applicables.

Il demeure qu'en pratique, même si les tribunaux auront la possibilité théorique de prononcer des peines d'amende supérieures à celles prévues par les anciens textes lorsque les peines privatives de liberté auront été réduites, de telles condamnations seront vraisemblablement très rares, puisque les maximums des peines d'amende prévues par les textes actuels sont aujourd'hui peu fréquemment prononcés.

Cette interprétation du droit transitoire a toutefois une importante conséquence : elle permet aux tribunaux de prononcer une peine d'amende en application des nouveaux textes alors même qu'aucune amende n'est prévue par les anciens textes. Cette hypothèse est relativement fréquente dans le nouveau code en ce qui concerne les crimes correctionnalisés, auparavant puni de la seule réclusion criminelle et désormais réprimés de l'emprisonnement et de l'amende.

Ainsi, en cas de vol commis avec les trois circonstances aggravantes de réunion, de violence et d'effraction, actuellement puni de quinze ans de réclusion et désormais puni de dix ans d'emprisonnement et 1 000 000 F d'amende, une amende pourra être prononcée par le tribunal. Si les peines d'amende et d'emprisonnement étaient considérées comme divisibles, une telle condamnation serait impossible, ce qui serait d'autant plus paradoxal qu'aujourd'hui de tels vols font l'objet de correctionnalisations judiciaires (c'est d'ailleurs pour cette raison qu'ils ont été correctionnalisés par le législateur), ce qui permet de condamner si nécessaire leur auteurs à des peines d'amende.

c) peines complémentaires

Les peines complémentaires prévues par les livres II à IV du nouveau code pénal sont beaucoup plus nombreuses qu'aujourd'hui : elles ne pourront évidement pas être prononcées contre les auteurs d'infractions commises avant l'entrée en vigueur du nouveau code si elles n'étaient pas encourues en vertu des anciennes dispositions.

Il en sera également ainsi dans l'hypothèse où les nouveaux textes prévoient des peines principales plus douces pour l'infraction concernée. En effet, il ne fait pas de doute que les dispositions prévoyant les peines principales d'un crime ou d'un délit et celles prévoyant les peines complémentaires ne forment pas un tout indivisible.

La question de la peine de privation des droits civiques, civils et de famille encourue en matière criminelle ou correctionnelle appelle par ailleurs quelques observations dans la mesure où, actuellement, cette peine, qui est parfois encourue à titre de peine complémentaire par renvoi aux dispositions de l'actuel article 42, est également souvent prévue à titre de peine accessoire automatique. Si la privation de ces droits ne pourra désormais plus résulter de plein droit d'une condamnation pénale en application de l'article 132-21, elle pourra toutefois, lorsqu'elle est prévue par les nouveaux textes, être prononcée à titre de peine complémentaire si sont réunies les conditions posées par les anciennes dispositions relatives aux peines accessoires, et bien qu'elle n'ait pas été prévue comme peine complémentaire à l'époque des faits.

Ainsi, en application de l'article 28 du code pénal la condamnation à une peine criminelle emporte actuellement de plein droit la dégradation civique, dont le contenu est sensiblement équivalent à celui de la peine de privation des droits civiques, civils et de famille. Il s'ensuit que cette peine pourra être prononcée, comme peine complémentaire facultative, lorsqu'elle est prévue par les nouveaux textes pour des infractions qui étaient auparavant de nature criminelle (que ces infractions demeurent des crimes ou qu'elles soient correctionnalisées).

Toutefois, sauf si les anciens textes prévoyaient également cette peine en tant que peine complémentaire, l'application des nouvelles dispositions ne sera possible que si la juridiction prononce une peine supérieure ou égale à cinq ans d'emprisonnement. En effet, les personnes poursuivies ne doivent pas se trouver dans une situation plus défavorable que celles jugées avant l'entrée en vigueur du nouveau code, et ces dernières n'étaient privées de leurs droits que si elles avaient été condamnées à une peine criminelle, c'est-à-dire à une peine supérieure ou égale à cinq ans de réclusion.

Cette limite ne concerne cependant que la privation des droits civils et de famille, et celle des droits civiques à l'exception des droits électoraux, dont la privation pourra être ordonnée par la juridiction même si la peine privative de liberté est inférieure à cinq ans. En effet, l'article L.5 du code électoral, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur du nouveau code pénal, prive du droit d'être électeur toutes les personnes condamnées pour crime, quel que soit le montant de la peine prononcée. Les dispositions de l'article L.5 du code électoral prévoient également à titre de peine accessoire automatique la privation des droits électoraux des personnes condamnées pour certains délits à une peine d'emprisonnement sans sursis ou à une peine d'emprisonnement avec sursis supérieure à un mois, ou condamnées pour un délit, quel qu'il soit (sauf exceptions de l'article L.8), à plus de trois mois d'emprisonnement sans sursis ou plus de six mois d'emprisonnement avec sursis. Il en résulte que, pour ces infractions commises avant l'entrée en vigueur du nouveau code mais jugées après cette date, la privation des droits électoraux pourra être prononcée, même si la peine de privation des droits de l'article 42 n'est pas prévue par les textes actuels, dès lors que la privation des droits civiques, civils et de famille est prévue par les nouveaux textes, et à condition de prononcer une peine privative de liberté supérieure aux seuils fixés par l'actuel article L.5.

Dans toutes ces hypothèses, la situation des personnes poursuivies sera toujours plus favorable que celle des personnes jugées avant l'entrée en vigueur du nouveau code, puisque ces peines ne seront pas automatiques mais résulteront d'une décision expresse de la juridiction. Leur situation sera également plus favorable que celle des individus jugés pour ces mêmes infractions commises après l'entrée en vigueur du nouveau code, puisque ces peines ne pourront être prononcées qu'en même temps qu'une peine de réclusion ou qu'une peine d'emprisonnement dépassant un certain seuil.

3) Dispositions prévoyant des circonstances aggravantes

Les dispositions prévoyant des circonstances aggravantes présentent la particularité de pouvoir être analysées à la fois comme des dispositions d'incrimination, car elles prévoient certains éléments constitutifs de l'infraction, et comme des dispositions de pénalité, car elles augmentent les peines encourues. Cette dualité doit être prise en compte pour apprécier leur application dans le temps.

En principe, les nombreuses dispositions du nouveau code pénal prévoyant de nouvelles circonstances aggravantes sont plus sévères et elles ne peuvent donc s'appliquer aux infractions commises avant son entrée en vigueur. Ainsi en est-il, par exemple, des circonstances de réunion ou de qualité de conjoint ou de concubin de la victime en matière de violences, de celle de mutilation en matière de viol, de bande organisée en matière de proxénétisme, de racisme en matière d'atteinte à l'intégrité du cadavre, de personne vulnérable en matière de vol ou d'escroquerie, de bande organisée en matière d'escroquerie ou de recel, etc.

Il en est toutefois différemment lorsque, en application d'une circonstance aggravante prévue par le nouveau code pénal mais non prévue par le droit actuel, la répression de l'infraction considérée n'est pas plus sévère qu'aujourd'hui. Cette hypothèse se retrouve très fréquemment dans le nouveau code pénal : le législateur, soucieux d'édicter des incriminations traduisant plus fidèlement l'importance des valeurs auxquelles il est porté atteinte, a diminué les peines encourues pour de nombreuses infractions tout en les réprimant, lorsque ces infractions sont commises dans certaines conditions non prévues par les textes actuels, de peines aggravées qui correspondent aux peines aujourd'hui encourues quelles que soient les circonstances.

Ainsi, le meurtre actuellement puni de la réclusion à perpétuité est désormais puni de trente ans de réclusion, sauf s'il est commis sur un mineur de quinze ans, une personne vulnérable, un dépositaire de l'autorité publique, un témoin ou une victime, la peine demeurant alors celle de la réclusion perpétuelle. De même l'enlèvement avec demande de rançon actuellement puni de la réclusion à perpétuité est puni de trente ans de réclusion, sauf si la victime est mineure, la réclusion perpétuelle continuant alors d'être encourue.

Dans certains cas, la peine résultant de la circonstance aggravante prévue par le nouveau code reste inférieure à celle prévue par les textes actuels lorsque l'infraction est commise en l'absence de cette circonstance. Ainsi, le vol à main armée, actuellement réprimé de la réclusion à perpétuité, est puni de vingt ans de réclusion, et de trente ans de réclusion lorsqu'il est commis en bande organisée.

Dans toutes ces hypothèses, les circonstances prévues par le nouveau code pourront être retenues par les juridictions à l'encontre des auteurs d'infractions commises avant l'entrée en vigueur du nouveau code, car elles ne viennent pas aggraver la répression prévue par les textes anciens même si elles aggravent les peines normalement prévues par le nouveau code pénal. En effet, au regard de la question du conflit de lois pénales dans le temps, il ne s'agit pas de dispositions plus sévères, mais au contraire de dispositions plus douces, puisqu'elles exigent de nouveaux éléments constitutifs de l'infraction pour que les peines auparavant encourues - ou même dans certains cas des peines inférieures à celles-ci - puissent être prononcées.

Ainsi, l'auteur d'un vol à main armée commis avant l'entrée en vigueur du nouveau code pourra être condamné à trente ans de réclusion en application des nouveaux textes s'il est établi que le vol a été commis en bande organisée, bien que cette circonstance ne soit pas aujourd'hui une circonstance aggravante du vol à main armée, parce que les textes actuels, qui prévoient pour tous les vols à main armée la réclusion criminelle à perpétuité sont plus sévères. De même l'auteur du meurtre d'un mineur de quinze ans pourra être condamné à la réclusion perpétuelle en application de l'article 221-4, article moins sévère que le troisième alinéa de l'actuel article 304 qui prévoit cette peine quelles que soient les circonstances du meurtre.

La situation est en réalité similaire à celle des incriminations pour lesquelles la loi exige de nouveaux éléments constitutifs et qui ne sont désormais plus réprimées que si elles sont commises dans certaines circonstances particulières. Ces circonstances doivent être relevées par les juridictions pour condamner les auteurs d'agissements commis avant l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions alors qu'elles n'étaient pas prévues par les textes applicables au moment des faits.

Une situation particulière est celle de la circonstance aggravante nouvelle dont résulte une peine plus sévère que celle prévue par les anciens textes, mais en l'absence de laquelle le nouveau code prévoit une peine moins sévère que celle encourue en application de la loi ancienne. Il en est ainsi en matière d'importation ou d'exportation illicites de stupéfiants, actuellement punies de vingt ans d'emprisonnement, et punies dans le nouveau code pénal de dix ans d'emprisonnement, sauf lorsque les faits ont été commis en bande organisée, la peine étant alors de trente ans de réclusion. Dans cette hypothèse, la peine maximum encourue pour les infractions commises avec cette circonstance avant l'entrée en vigueur du nouveau code est évidemment celle prévue par le texte ancien moins sévère, donc vingt ans d'emprisonnement. Toutefois, dans la mesure où la peine de vingt ans a été supprimée de l'échelle des peines correctionnelles par le nouveau code pénal, le législateur a estimé nécessaire de préciser dans l'article 368 de la loi d'adaptation que cette peine pourrait être prononcée contre les auteurs d'importation ou d'exportation illicites de stupéfiants commises en bande organisée avant l'entrée en vigueur du nouveau code.

2) Questions de forme (visas des articles applicables)

La question du visa des textes applicables est gouvernée par les dispositions du deuxième alinéa de l'article 551 du code de procédure pénale qui dispose que la citation énonce le fait poursuivi "et vise le texte de loi qui le réprime" et par le deuxième alinéa de l'article 485 du même code selon lequel le dispositif du jugement doit énoncer "les textes de loi appliqués".

S'agissant des infractions commises avant l'entrée en vigueur du nouveau code mais jugées après cette date, l'application de la loi pénale dans le temps soulève deux questions relatives à la détermination et à la présentation des visas.

a) Détermination des visas

S'il est communément admis qu'en cas de conflit de lois dans le temps il est préférable de viser à la fois les dispositions anciennes et les dispositions nouvelles, il n'existe toutefois pas de jurisprudence précise sur cette question, et les pratiques judiciaires suivies en la matière sont en réalité très diverses.

Le plus souvent, en raison de l'informatisation des juridictions et de l'utilisation des codes NATINF, les textes visés sont ceux en vigueur au moment de l'établissement de la pièce de procédure. En effet, la mise à jour régulière de la table NATINF ne permet pas en principe d'utiliser les versions antérieures de cette table (1), qui font référence aux textes abrogés, et seuls les textes en vigueur au moment de l'utilisation de la table apparaissent dans les documents édités par les applications. Lorsque les textes relatifs à une même incrimination, à laquelle correspond un numéro NATINF inchangé, sont modifiées en cours de procédure (par exemple une peine complémentaire nouvelle, prévue par un article additionnel, est instituée par le législateur), les textes visés dans la citation, puis dans le jugement, puis dans les pièces d'exécution, sont modifiés au fur et à mesure de la mise à jour de la table. (1) A l'exception des applications "nouvelle chaîne pénale".

En pratique donc, les doubles visas apparaissent dans les actes de procédure qui ne font pas l'objet d'une édition automatique (tels que réquisitoires définitifs, ordonnances de règlement du juge d'instruction, arrêts des chambres d'accusation, arrêts des chambres des appels correctionnels..), mais pas dans ceux qui résultent d'un traitement automatisé (c'est à dire la plupart des citations directes et des jugements correctionnels...).

En raison de l'ampleur de la réforme, il a été un moment envisagé de faire coexister au sein des applications informatiques utilisées par les juridictions, à compter de l'entrée en vigueur du nouveau code pénal, l'actuelle table NATINF, qui vise les textes de l'actuel code pénal, et la nouvelle table mise à jour au 1er septembre (2), visant les dispositions du nouveau code. Ces deux tables auraient été alternativement utilisées (un "mixage" des deux tables étant techniquement impossible) pour permettre aux juridictions de viser les anciennes références pour les faits commis avant l'entrée en vigueur du nouveau code, et les nouvelles pour les infractions commises après cette date. Cette solution semblait cependant difficilement praticable car la plupart des matériels utilisés par les juridictions ne disposent pas d'une mémoire suffisante pour contenir en même temps deux tables NATINF. Mais surtout, cette solution ne présentait en réalité que peu d'intérêt juridique, parce que, même pour les infractions commises avant l'entrée en vigueur du nouveau code, il est nécessaire de viser les nouveaux textes (a) et parce qu'elle ne permettait pas de viser à la fois les anciens et les nouveaux textes, dans les hypothèses où ce double visa paraît devoir être envisagé (b).

(2) Ou à une autre date si l'entrée en vigueur est reportée.

a) Il est nécessaire de viser les nouvelles dispositions

Lorsque les textes nouveaux sont plus doux, ils doivent être appliqués aux infractions commises avant l'entrée en vigueur du nouveau code : il convient donc de viser ces dispositions.

Lorsque les nouvelles dispositions sont plus sévères (ou d'une sévérité égale), les juridictions doivent faire application, conformément au principe de non-rétroactivité de la loi pénale, des règles de fond posées par les anciens textes. Toutefois, toutes les dispositions de l'ancien code pénal ayant été abrogées par l'article 372 de la loi d'adaptation, leur application n'est possible qu'à la condition qu'une disposition du nouveau code vienne incriminer et réprimer, éventuellement plus sévèrement, les faits tombant sous le coup des anciens textes.

Il est donc toujours nécessaire, pour respecter les droits de la défense en permettant à la personne poursuivie de savoir si les faits qui lui sont reprochés demeurent pénalement sanctionnés par des textes en vigueur au moment de l'acte de poursuite, de viser les dispositions du nouveau code pénal.

C'est la raison pour laquelle ne sera normalement utilisable, au moment de l'entrée en vigueur du nouveau code, et comme cela a toujours été le cas à l'occasion des modifications législatives ou réglementaires intervenues dans le droit pénal ces dernières années (même si ces modifications ne peuvent être comparées à la réforme du code pénal), qu'une seule table NATINF, qui fera référence aux nouvelles dispositions et utilisera les qualifications développées correspondant aux rédactions des incriminations retenues par le nouveau code (1). (1) Rien n'interdira cependant aux applications capables de gérer simultanément deux tables, de conserver l'ancienne table NATINF. Celle-ci pourra alors être utilisée pour éditer les jugements rendus avant l'entrée en vigueur du nouveau code et les pièces d'exécution les concernant, qui pourront ainsi viser les anciens textes. Mais cette table ne présentera pas d'intérêt pour les procédures poursuivies ou initiées après l'entrée en vigueur de la réforme, même si elles concernent des faits commis avant cette date.

b) hypothèses dans lesquelles le visa cumulatif des textes anciens et des textes nouveaux doit être envisagé

Lorsque les nouvelles dispositions sont plus douces et devront seules être appliquées, il sera inutile de viser les anciens textes. Lorsque les nouvelles dispositions sont d'une égale sévérité, et ne modifient donc pas le droit applicable à la personne poursuivie, le visa des anciens articles ne présente également aucun intérêt. Il en est de même des qualifications développées apparaissant dans les citations ou les jugements, et qui correspondront à la nouvelle rédaction des incriminations : au demeurant, ces qualifications développées sont le plus souvent plus explicites pour la personne poursuivie (ainsi le terme plus simple de "violences" se substituant aux " coups et blessures volontaires ", la définition de l'escroquerie mettant en évidence les éléments constitutifs de l'infraction, celle du recel, inexistante dans le droit actuel...). La question du double visa ne se pose donc que lorsque les nouveaux textes sont plus sévères.

Toutefois, dans cette dernière hypothèse, on peut estimer que l'absence de visa des anciens textes ne constitue pas une cause de nullité de la citation en vertu de l'article 565 du code de procédure pénale. Cet article dispose en effet que la nullité d'un exploit de citation ne peut être prononcée que lorsqu'elle a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la personne qu'elle concerne, c'est-à-dire, puisque les articles visés sont le fondement de la poursuite, lorsqu'elle a eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense. Or, tel n'est pas le cas en l'espèce, qu'il s'agisse des textes d'incrimination ou des textes de pénalité.

En effet, s'agissant de l'incrimination, les droits de la défense ne seraient méconnus que si le texte visé - et la qualification développée qui en résulte - ne faisait pas état de certains éléments constitutifs de l'infraction pouvant être retenus par la juridiction, empêchant ainsi le prévenu d'en contester utilement l'existence. Si l'incrimination nouvelle est plus sévère, c'est-à-dire plus large, un tel risque n'existe donc pas.

En ce qui concerne les dispositions répressives, l'atteinte aux droits de la défense résulterait du visa d'un texte ne prévoyant pas toutes les peines encourues et ne permettant pas au prévenu de contester le bien fondé d'une peine susceptible d'être prononcée à son encontre. Tel n'est pas le cas si ces dispositions sont justement plus sévères et prévoient au contraire des peines que la juridiction, en raison des règles de fond de conflit de lois dans le temps, ne pourra évidemment pas prononcer.

De même, l'absence de visa des anciens textes dans le jugement ne constitue pas non plus une cause de nullité de la décision, dès lors, pour reprendre les expressions utilisées par la Cour de cassation en cette matière, qu'il n'existe aucune incertitude sur la nature de l'infraction retenue, ni sur les textes dont il a été fait application, et dès lors que, sur le fond, les règles de conflit de lois ont été respectées.

En pratique, lorsque les juridictions souhaiteront faire apparaître le visa des textes anciens, il conviendra donc de compléter manuellement ou par traitement de texte, les documents édités par les applications de la table NATINF et dans lesquels seront déjà visés les nouveaux textes. Ces indications supplémentaires figurant dans les citations ou les jugements pourront être insérées en même temps que les informations qui doivent habituellement faire l'objet d'une saisie manuelle (identité du prévenu, date et lieu des faits, précisions sur les circonstances de l'infraction - telles qu'identité de la victime, nature des objets dérobés en cas de vol, nature du contrat violé en cas d'abus de confiance... -, motivation du jugement, etc.). Toutes les indications utiles seront données ultérieurement aux juridictions à cet égard, mais il peut d'ores et déjà être fait quelques observations concernant la présentation respective des anciens et des nouveaux textes.

b) présentation des visas

La terminologie utilisée dans la présente circulaire, qui, par commodité, fait référence à l'ancien, ou à l'actuel code pénal et au "nouveau code pénal" est juridiquement inexacte (les dispositions du code pénal ont été entièrement rénovées, mais celui-ci conserve la dénomination de code pénal), et elle ne pourra normalement pas être retenue, après l'entrée en vigueur des dispositions nouvelles, dans les actes de procédure.

Ainsi, une citation pour abus de confiance devra viser les articles 314-1 et 314-10 du code pénal, et ce sont les visas relatifs aux anciennes dispositions du code pénal qu'il conviendra de présenter sous une forme différente, afin d'éviter toute ambiguïté.

Il avait été envisagé, pour éviter de confondre les anciennes et les nouvelles dispositions, de rédiger les articles de la partie législative du "nouveau code pénal" en les précédant de la lettre L, ce qui aurait permis de les distinguer des anciens articles abrogés. Cette solution n'a toutefois pas été retenue, le système de numérotation décimale qui a été adopté étant déjà très novateur en droit pénal (mais, comme aujourd'hui, les articles de la partie réglementaire du nouveau code seront précédés de la lettre R). Au demeurant, l'utilisation de cette numérotation décimale fait qu'en pratique aucune des nouvelles dispositions ne porte un numéro correspondant à celui d'un article abrogé. Les numéros des quelques articles actuels qui comportent trois chiffres suivis d'un tiret n'ont en effet pas d'équivalent dans le nouveau code.

La solution la plus simple consiste à viser les anciens textes en les présentant comme "abrogés par la loi du 16 décembre 1992 mais en vigueur au moment des faits" ou "abrogés postérieurement à la commission des faits". Les visas des textes relatifs à l'abus de confiance pourraient ainsi se présenter de la façon suivante : "faits prévus et punis par les articles 314-1 et 314-10 du code pénal, et par les articles 406 et 408 (abrogés postérieurement à la commission des faits) du code pénal".

Il doit par ailleurs être précisé qu'en ce qui concerne les citations délivrées avant l'entrée en vigueur du nouveau code pour des affaires devant être audiencées après cette entrée en vigueur, seuls les articles applicables à la date de l'acte de procédure devront être visés. Que la date d'entrée en vigueur du nouveau code soit connue à l'avance parce qu'elle a été différée par le législateur est sans conséquence : le destinataire de l'acte doit être avisé des textes applicables à la date de rédaction de celui-ci. En tout état de cause, il n'est d'ailleurs juridiquement pas impossible qu'entre la date de citation et celle de l'audience intervienne une loi plus douce qui serait applicable immédiatement (et on ne peut reprocher au ministère public de ne pas en avoir fait état), ou que le législateur reporte à nouveau, comme cela est envisagé, la date d'entrée en vigueur du texte dont l'entrée en vigueur a déjà été différée (et il serait alors dommageable que la citation fasse état de dispositions qui ne pourront en réalité pas être appliquées par le tribunal).

Toutefois, pour éviter toute incertitude dans l'esprit des personnes poursuivies, il pourrait être envisagé de préciser à la suite du visa des textes figurant dans les citations délivrées avant l'entrée en vigueur de la réforme pour des audiences fixées après cette date, qu'il s'agit de "dispositions en vigueur à la date des faits".

II. Peines en cours d'exécution lors de l'entrée en vigueur du nouveau code pénal

Si en principe une loi pénale nouvelle ne remet pas en cause les décisions passées en force de chose jugée (principe que rappelle le premier alinéa de l'article 112-4, qui dispose que l'application immédiate de la loi nouvelle est sans effet sur la validité des actes accomplis conformément à la loi ancienne), l'entrée en vigueur du nouveau code pénal aura cependant certaines incidences sur les peines en cours d'exécution, en raison des règles posées par les articles 112-2 (3) et 112-4 (deuxième alinéa).

1) incrimination supprimée (art. 112-4)

En application du deuxième alinéa de l'article 112-4, les peines prononcées pour des faits qui ne revêtent plus le caractère d'une infraction pénale doivent cesser de recevoir application. Cette question est examinée à l'occasion des commentaires consacrés à cette disposition, commentaires auxquels il convient de se reporter.

2) confusion

Il a déjà été indiqué dans la première partie de la présente note, car cette question concerne également les infractions non encore jugées, que les règles de confusion prévues par le nouveau code pénal ne peuvent préjudicier aux condamnés que si l'une des deux infractions en concours est commise après l'entrée en vigueur de la réforme, ainsi que le prévoit l'article 371 de la loi d'adaptation.

3) peines privatives de liberté

a) peines de réclusion inférieures à dix ans, ou d'emprisonnement supérieures à dix ans

Bien que les peines de réclusion inférieures à dix ans ou d'emprisonnement supérieures à dix ans ne soient plus prévues par le nouveau code, il est évident que les peines de ce type en cours d'exécution conservent leur nature criminelle ou délictuelle en application du principe posé par le premier alinéa de l'article 112-4. Cette question n'est pas seulement théorique : s'agissant des peines criminelles, il en résulte pour le condamné un intérêt pratique considérable, relatif aux règles de la confusion, puisque, par exemple, une peine de sept ans de réclusion absorbe une peine de dix ans d'emprisonnement.

b) période de sûreté obligatoire

Les périodes de sûreté de 30 ans prononcées en application des anciens textes pour des crimes pour lesquels une telle mesure n'est pas prévue par les nouveaux textes ne sont pas automatiquement ramenées à 22 ans, la seule disposition du nouveau code interdisant d'exécuter les peines valablement prononcées avant son application concernant l'hypothèse de l'abrogation de l'infraction. Les intérêts pratiques de cette question sont cependant très limités, car la réduction de la période de sûreté pourra de toute façon être demandée en application de l'article 720-4 du code de procédure pénale.

c) fractionnement des peines d'emprisonnement

Les dispositions de l'article 720-1 du code de procédure, tel que modifié par la loi d'adaptation, limitent les possibilités de fractionnement des peines privatives de liberté postérieurement au jugement, en prévoyant, comme le fait l'article 132-27 relatif au fractionnement ab initio, que cette mesure n'est possible que lorsque la peine d'emprisonnement restant à subir est inférieure ou égale à un an et que la durée du fractionnement ne peut excéder trois ans. Ces limites, qui ont pour résultat de rendre plus sévères les peines prononcées par la juridiction de jugement au sens du (3) de l'article 112-2, ne seront donc pas applicables aux condamnations prononcées avant l'entrée en vigueur du nouveau code, ni même aux condamnations prononcées postérieurement pour des infractions commises avant cette entrée en vigueur.

d) peine d'emprisonnement contraventionnel

En théorie, ces peines doivent continuer de recevoir application, aucune disposition transitoire n'ayant été prévue par le législateur. En pratique, de telles peines ne sont toutefois pas prononcées par les tribunaux. Il peut cependant en avoir été autrement dans les hypothèses de contraventions connexes à un délit pour lequel une peine d'emprisonnement ferme aurait également été prononcée. L'équité demande toutefois de ne pas mettre ces peines à exécution.

4) interdiction de séjour

La peine d'interdiction de séjour ayant été judiciarisée par le nouveau code pénal, le législateur a insérée une disposition de droit transitoire dans la loi d'adaptation afin que les modifications des peines en cours d'exécution puissent être ordonnées par le juge d'application des peines.

5) peines accessoires

Le nouveau code pénal a supprimé la peine accessoire de privation des droit civiques, civils et de famille résultant notamment de la dégradation civique attachée aux peines criminelles ou de l'article L.5 du code électoral. En raison de la nature particulière de ces peines, il semble que ces interdictions auraient dû disparaître au moment de l'entrée en vigueur du nouveau code : une personne condamnée à la réclusion à perpétuité aurait ainsi immédiatement retrouvé ses droits civiques. Pour éviter de telles conséquences, le législateur a inséré dans la loi d'adaptation un article 370 qui dispose que les interdictions des droits civiques, civils et de famille résultant de plein droit d'une condamnation pénale devenue définitive avant l'entrée en vigueur du nouveau code pénal demeurent applicables.

En ce qui concerne les mineurs, la suppression des peines accessoires n'est pas limitée à la privation des droits civiques, civils et de famille, mais elle concerne l'ensemble des interdictions, déchéances et incapacités résultant de plein droit d'une condamnation, ainsi que le prévoit le nouvel article 20-6 de l'ordonnance du 2 février 1945. Ces dispositions plus douces seront applicables dès l'entrée en vigueur du nouveau code. A cette date, les mineurs condamnés retrouveront donc le bénéfice de ces droits, à l'exception, en application de l'article 370 précité de la loi d'adaptation, des droits civiques, civils et de famille. Disparaîtront notamment les interdictions professionnelles qui pouvaient résulter des condamnations.

6) exécution des sursis avec mise à l'épreuve

Le régime de la mise à l'épreuve prévu par les dispositions du nouveau code pénal est globalement plus sévère que celui du droit actuel, notamment quant au point de départ du délai, quant à sa computation, quant à la révocation des sursis antérieurs en cas de révocation d'un nouveau sursis. Il ne sera donc pas applicable aux sursis en cours d'exécution au moment de l'entrée en vigueur du nouveau code.

7) réhabilitation

Les nouvelles règles relatives aux conditions de la réhabilitation (des condamnations inférieures ou égales à un an d'emprisonnement - au lieu de six mois - sont réhabilitées après cinq ans ; des condamnations inférieures à dix ans - au lieu de cinq ans - sont réhabilitées après dix ans) sont évidemment plus douces. Elles s'appliqueront donc immédiatement aux condamnations prononcées avant l'entrée en vigueur du nouveau code.

Il en est de même des règles relatives aux effets de la réhabilitation, qui prévoient en particulier la suppression de la condamnation du bulletin No1 du casier judiciaire.

8) effet du non-avenu

Seront également applicables immédiatement les dispositions de l'article 769 alinéa 3 (3) du code de procédure pénale qui prévoient l'effacement du bulletin No 1 du casier judiciaire des condamnations assorties du sursis à l'expiration d'un certain délai à partir duquel elles sont devenues non avenues.

9) effacement des condamnations prononcées contre les mineurs

De la même façon, seront immédiatement applicables les dispositions du nouvel article 769-2 du code de procédure pénale prévoyant l'apurement du casier judiciaire des mineurs.

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© 1997 - Texte proposé par Jérôme Rabenou - Avertissement sur la fiabilité des textes